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“En politique, on perd plus qu’on ne gagne”

Elisabeth Martichoux et Catherine Mangin publient un livre : L’art de perdre en politique, vingt exemples à ne pas suivre quand on veut gagner (Éditions de réserve).

Elisabeth Martichoux : « Compte tenu de ses difficultés judiciaires, Nicolas Sarkozy sait aujourd’hui qu’il ne peut pas »

Peut-on dire que certains dirigeants politiques sont intéressés par la défaite ? “Ils étaient très intéressés à perdre. La défaite est un matériau romantique et théâtral. Les plus grands héros sont en réalité des perdants. J’ai donc proposé à Catherine d’appliquer cet état, cette situation à nos hommes politiques. Nous les voyons comme d’éternels conquérants, mais ce que nous savons moins… ce n’était pas pour freiner l’agression politique. Mais il est vrai que ce que nous ne savons pas, c’est qu’en politique, nous perdons plus que nous ne gagnons. Et c’était intéressant de s’intéresser aussi à cette dimension du parcours de nos grands hommes et femmes politiques.“, a déclaré Elisabeth Martichoux.

Et Nicolas Sarkozy ? “Nicolas Sarkozy est convaincu qu’il aurait gagné. Il estime donc qu’il n’a pas perdu car il pense qu’il aurait pu gagner s’il avait eu plus de temps. Et c’est plus dans l’intellectualisation de sa défaite… C’est un grand perdant. Il esthétise sa défaite parce qu’il y a une chose importante, c’est un sociologue, Marc Abélès, qui nous l’a très bien dit : quand tu es un beau perdant, on dit de toi : “il a perdu avec la classe”tu es un gentleman. Donc au final vous restaurez aussi votre image», a expliqué Catherine Mangin. “Je pense qu’il a compris. On parlait de ne pas aimer les Français… Vu ses difficultés judiciaires… Aujourd’hui, il sait qu’il ne peut pas. Je vous le dis, il ne peut pas, il ne s’enfuira plus. Mais si toute la vient le chercher, il s’en ira ! Il y a ce désir que nous ne pouvons pas éliminer du plus profond du cortex de ses politiciens qu’un jour ils puissent redevenir ce qu’ils étaient.», a commenté Elisabeth Martichoux.

E Valéry Giscard d’Estaing? “Tout le monde se souvient de ce départ. Ce que l’on sait peut-être moins, c’est qu’il a lui-même organisé les modalités pratiques de ce départ. C’est dire qu’il avait lui-même souhaité cette mise en scène. Mais ce qu’il n’avait pas mesuré, c’était la distance entre la table et la porte, qui est aujourd’hui dans toutes les mémoires. Puis, plus sérieusement, il a vécu cette défaite comme une profonde injustice.», adore Elisabeth Martichoux.

“En France, cela prend trente ans : pensez à Chirac”

Les femmes gagnent-elles moins en politique parce qu’elles manquent de vanité ? “Vanité, pas toujours, mais souvent. Vous ne pouvez pas prétendre diriger le pays si vous ne pensez pas que vous êtes meilleur que tout le monde. Et puis c’est peut-être un obstacle qu’ont les femmes, qui ont plus de mal à se projeter. Il est impératif de se dire : « Je serai président et j’en ai la capacité ». Si vous n’avez pas cette capacité de projection, vous ne pouvez pas le faire, car c’est une compétition présidentielle infiniment plus difficile. Les points faibles sont immédiatement visibles. Et puis je pense que c’est culturellement plus difficile pour les femmes“, rispose Elisabeth Martichoux.

Pourquoi les Américains n’ont-ils aucun problème à voter pour un nouveau venu politique ? “Les Français, cela nous surprend. Par exemple, prenons un Reagan ou un Schwarzenegger en Californie. Ils viennent de nulle part. La seule exception en France, la seule analogie, c’est Macron. Mais aux États-Unis, nous acceptons de voter pour des gens qui sont pratiquement vierges en politique. En France, ils ont dû avoir beaucoup perdu, ils ont dû avoir beaucoup de cicatrices, ils ont dû beaucoup souffrir pour pouvoir enfin être nommés au suffrage universel. En France, cela prend trente ans. Pensons à Chirac : trois élections présidentielles ratées, après la troisième nous y arriverons. Vous vous rendez compte, après une carrière de parlementaire, d’élu local“, a déclaré Elisabeth Martichoux.

Retrouvez « L’invité média » de Gilles Ganzmann tous les jours à partir de 10h00 sur « Sud Radio Média » avec Valérie Expert.

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