Le volet agricole du projet d’accord de libre-échange UE-Mercosur est en vigueur depuis 2019. La Commission européenne parle de « petits volumes » en comparant les quotas prévus à ce que l’UE produit annuellement. Les produits du Mercosur pour lesquels les droits de douane seront réduits, voire supprimés, représenteront au maximum 99 000 tonnes pour la viande bovine, soit 1,6 % de la production de l’UE. Pour la viande porcine, ce sera 25 000 tonnes (0,1% de la production de l’UE), pour la volaille 180 000 tonnes (1,4%), pour le sucre 190 000 tonnes (1,2%).
Bruxelles assure que l’accord représente des opportunités pour les produits européens actuellement retenus en Amérique latine: le vin (actuellement taxé à hauteur de 27%) ou les fromages, qui peuvent bénéficier de “la montée d’une classe moyenne”.
Pour le secteur sucrier, déjà bousculé par les facilités accordées à l’Ukraine, les 190 000 tonnes ne représentent que 1,2% de la production européenne, mais la moitié des exportations françaises vers les autres pays de l’UE, qui représentent la grande majorité des exportations totales du pays. Cela ne fera « que déstabiliser ce marché », notamment pour la France, explique Alain Carré, agriculteur et président de l’interprofession (AIBS).
Les filières de l’éthanol, du miel et du porc sont également menacées, souligne Stefan Embecque, économiste à l’institut de recherche Inrae, qui évoque notamment le risque d’une baisse des prix payés aux agriculteurs européens. « Les coûts de production diffèrent et le problème est que les normes sanitaires et environnementales ne sont pas les mêmes. »
Quelles normes ?
La Commission nous l’assure : « Tous les produits du Mercosur doivent respecter les normes strictes de l’UE en matière de sécurité alimentaire. » Les opposants à l’accord réclament des « clauses miroir » : que les règles imposées aux agriculteurs européens en matière sociale, environnementale ou de bien-être animal s’appliquent également aux producteurs du Mercosur afin d’éviter des distorsions de concurrence. Il est “vendu comme un accord de nouvelle génération prenant en compte les aspects environnementaux et climatiques mais les engagements sont faibles : il n’y a pas de conditionnalité”, constate Stefan Embecque.
Quels contrôles ?
« En théorie, les viandes traitées par exemple aux antibiotiques et aux hormones de croissance ne peuvent pas entrer, mais en pratique la traçabilité est imparfaite », explique Stefan Embecque. « Il y a des audits d’abattoirs organisés avec la Commission, mais on ne contrôle pas facilement le cheptel avant cette étape. Le traçage depuis la naissance jusqu’à l’abattage dans le Mercosur n’existe qu’en Uruguay. »
Et de fait, un audit de l’UE vient de révéler des failles dans les contrôles de la viande bovine au Brésil, incapables de garantir l’absence de l’hormone estradiol, interdite en Europe. En attendant que les procédures soient réexaminées, le Brésil a suspendu ces exportations.
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