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A Genève le blues des voix russes contre la guerre en Ukraine

La manifestation de Genève, qui s’est déroulée sur la place des Nations, faisait écho à un appel à la mobilisation lancé à Berlin par trois opposants. Incapables d’agir en Russie, ces derniers tentent depuis leur exil de relancer un mouvement exsangue et divisé. Il s’agit de Ioulia Navalnaïa, veuve d’Alexeï Navalny décédé en prison dans des circonstances difficiles en février dernier, Ilya Yashin, ancien député municipal de Moscou récemment sorti de prison, et Vladimir Kara-Mourza, qui a survécu à la prison et à deux tentatives d’empoisonnement. Ce dimanche également, dans la capitale allemande, une marche a été organisée à laquelle ont participé environ un millier de personnes. A Zurich, une manifestation similaire avait rassemblé la veille une cinquantaine de participants, dont des membres de l’opposition biélorusse.

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« Poutine fait de son mieux pour créer le mythe selon lequel sa guerre criminelle est voulue et soutenue par les Russes. Nous le réfutons. De plus, il ne s’agit pas d’un conflit ethnique mais d’une guerre entre démocratie et dictature », explique Véra. La Russie du futur exige la démission de Vladimir Poutine, qu’elle considère comme « illégitime », son procès pour crimes de guerre, le retrait des troupes russes d’Ukraine, le versement d’indemnisations à ce pays, la justice pour toutes les victimes du conflit et la libération des prisonniers politiques en Russie. Il appelle également la communauté internationale à introduire des sanctions plus sévères contre le régime de Vladimir Poutine et à surveiller leur mise en œuvre. Les organisateurs soulignent également que Genève abrite le siège de la société STMicroelectronics, dont les puces équipent des missiles et des drones de fabrication russe.

Genève me semble être un cas à part, car de nombreux Russes installés ici travaillent pour des organisations internationales, des ambassades ou dans le commerce des hydrocarbures. Il s’agit donc de personnes fidèles au régime.

Un peu fatigué

De l’aveu même des organisateurs, la mobilisation à Genève a été faible. Pour ça ? “Je pense qu’il y a une certaine lassitude, car on ne trouve pas de moyens efficaces pour arrêter cette guerre”, répond Véra. «En outre, de nombreux Russes estiment que manifester ne sert à rien. Enfin, Genève me semble être un cas particulier, car de nombreux Russes installés ici travaillent pour des organisations internationales, des ambassades ou dans le négoce des hydrocarbures. Ce sont donc des gens fidèles au régime. »

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Rédacteur en chef du plus ancien journal en ligne russophone de Suisse, Nacha Gazeta, Nadia Sikorsky, habitante de Genève, n’a pas participé à la manifestation genevoise dont elle n’a eu connaissance que tardivement. Cela met en évidence le manque de soutien des gouvernements occidentaux aux Russes anti-guerre. “Même si je ne figure pas sur la liste des agents étrangers du Kremlin, puisque je n’ai aucune activité en Russie, je sais que le régime me surveille”, explique le journaliste dont les médias ont été qualifiés de “russophobes” par les autorités russes. ambassade à Berne suite à la publication d’une caricature de Poutine en juillet 2022. «Trois ans se sont écoulés depuis la dernière fois que j’ai vu mes parents et je ne sais pas si je veux prendre le risque de retourner en Russie: même si je suis Suisse citoyen, je travaille et paie des impôts ici, je ne pense pas que les autorités suisses feront ou pourront faire quoi que ce soit pour moi si j’étais arrêté.” Selon Nadia Sikorsky, « les médias, comme Ioulia Navalnaïa ou Vladimir Kara-Mourza, n’ont aucun problème à obtenir le soutien des gouvernements occidentaux. Mais d’autres opposants meurent dans les prisons russes. Mais tout le monde n’est pas prêt à mourir d’idées, même ceux qui apprécient Brassens.

Tout le monde n’est pas prêt à mourir pour des idées, même ceux qui apprécient Brassens.

Manque de soutien des gouvernements occidentaux

Le journaliste, dont les médias ont perdu deux sponsors majeurs (une banque privée suisse et une clinique privée) après avoir pris position contre la guerre le 24 février 2022, estime que les valeurs défendues par l’Occident ne sont pas respectées dans la pratique. « D’une manière ou d’une autre, Poutine gagnera cette guerre et ne restituera pas les territoires occupés. Tout redeviendra normal, mais qu’arrivera-t-il aux Russes qui ont manifesté ? Si elle ne regrette pas de s’exprimer publiquement, Nadia Sikorsky a aussi été frappée par le manque de soutien de ses compatriotes installés en Suisse. «Je pensais parler en leur nom, mais aujourd’hui, je me rends compte que je ne parlais qu’en mon nom. C’est une désillusion.”

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Docteur en sciences sociales à l’Université de Lausanne, Léa Moreau a rédigé une thèse sur les communautés russophones en Suisse romande. Selon elle, cette faible mobilisation s’explique par « une lassitude de certains qui les amène à tourner le dos à ce qui se passe en Russie. Les gens veulent aussi rompre avec tout cela et se concentrer sur leur vie ici parce qu’ils se sentent impuissants. Et de manière générale, on ne peut pas dire que les manifestations organisées par le passé à Genève, notamment pour la libération d’Alexeï Navalny, aient attiré beaucoup de monde.

*Nom fictif

 
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