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fluoroscopie d’une société en évolution

C’est le quotidien au tribunal de Bir Mourad Raïs [commune de la banlieue sud d’Alger]les allers-retours pour la procédure de divorce se déroulent sans problème. Les conflits dans les couples diffèrent, mais le verdict est le même : le divorce.

Toutes les discussions que nous avons eues avec certaines femmes sont similaires. Les raisons des ruptures se trouvent principalement dans la trahison, les mensonges, les réseaux sociaux, les difficultés financières, le manque de transparence ou encore parce que les couples se forment trop vite.

En Algérie, durant les trois premières années de mariage, trois couples sur quatre divorcent. L’Office National des Statistiques (ONS) a recensé 91.402 divorces sur 278.664 mariages en 2023, soit un taux de 33,5%.

La femme algérienne se libère

Mais quelle est l’explication scientifique de cette augmentation des divorces ? Saliha Ouadah, professeur des universités, chercheuse en démographie et sociologie urbaine, directrice du laboratoire Lasap à l’École nationale de statistique et d’économie appliquée (Enssea) et également chercheuse associée à l’université de Tours, envisage la situation sous un angle sociologique et de sociologie urbaine. . Il y a beaucoup de divorces et il y en aura encore davantage à l’avenir.

Premièrement, les femmes en âge de travailler ou en pleine carrière aujourd’hui sont celles qui ont pris des risques pendant la période du terrorisme. [la décennie dite “noire”, 1992-2002] pour terminer leurs études et ont fait de grands efforts et sacrifices pour accéder à l’université et ensuite se positionner dans le monde du travail.

Pas question aujourd’hui d’abandonner leur vie professionnelle. Ces femmes ont contribué à former une « société moderne ». Un exploit pour eux, et c’est à partir de là que l’Algérie est devenue une société moderne.

La femme veut travailler, être indépendante, libre et partager toutes les tâches avec l’homme. Mais, en même temps, elle a gardé toutes les tâches traditionnelles : s’occuper des enfants, de la maison, de la belle-famille notamment…

Elle s’est ainsi assignée un second rôle ce qui lui a causé une grande pression. Un double rôle pleinement assumé mais sous pression. Par conséquent, elle n’exerce plus son rôle d’épouse.

En transition vers une société occidentalisée

Vient après cette nouvelle génération d’âge nubile aujourd’hui, où l’homme contribue également à toutes les tâches du couple. Dans cette nouvelle société, les femmes deviennent impatientes, indépendantes financièrement et n’attendent plus rien des hommes. Elle exige que son mari soit un véritable partenaire, sinon elle préférerait une rupture.

Ce qui explique le nombre croissant de cas de divorce. Nous sommes ici en pleine transition vers une nouvelle société qui se met en place, où il y aura davantage de divorces. On se dirige vers une société occidentale ou occidentalisée, où il s’agirait d’enregistrer davantage de célibataires pour éviter toute pression conjugale, selon Saliha Ouadah.

Contrairement à la génération actuelle (les plus jeunes), les femmes de la société moderne (les plus âgées) ont été préparées par leurs mères, issues de la société traditionnelle, au rôle traditionnel qu’elles doivent assumer.

Les plus jeunes, ceux qui sont censés être en couple maintenant, sont autrement préparés pour ne pas s’encombrer de responsabilités et de tâches inutiles. Une rupture avec les vieux concepts : le rôle traditionnel des femmes n’est plus hérité !

En plus des mères qui font tout pour que leurs filles poursuivent leurs études pour une plus grande indépendance et n’aient pas besoin d’un mari, le père installe chez sa fille une forte culture de confiance en soi. Le père est très proche de sa fille qui deviendra la femme forte de demain. Il fait d’elle une fille gâtée qui refusera à l’avenir de se laisser dénigrer et rabaisser par un homme.

La place du père

La sociologie urbaine a connu des évolutions très importantes, de l’avis du spécialiste, au point que le père recevra volontiers son gendre en cohabitation, un choix mal réfléchi par le passé. [traditionnellement, c’est la bru qui va s’installer dans sa belle-famille].

Les femmes des sociétés modernes et traditionnelles, auparavant privées de leurs droits, peuvent désormais les avoir grâce à leurs filles !

Et c’est cet homme (père) qui a changé la donne. Il faut savoir aussi qu’en Algérie, contrairement à certains pays, se marier coûte cher, mais pas divorcer. Autrefois, les femmes hésitaient à divorcer pour éviter de retourner auprès de leurs parents et frères, mais aujourd’hui, cette indépendance financière et la loi sur le divorce lui garantissent un logement, la rupture du contrat de mariage ne pose plus de problème.

La nouvelle loi, relative aux mesures spécifiques garantissant aux enfants placés en garde et aux femmes divorcées l’obtention d’une pension alimentaire ordonnée à leur profit par la justice, a été publiée au Journal officiel le 7 février. Les femmes divorcées et les enfants de parents divorcés qui ne peuvent exécuter une décision alimentaire peuvent profitez-en maintenant.

Le magistrat et président de la section des affaires familiales statuera par ordonnance, dans un délai n’excédant pas cinq jours. Ce texte permet à l’État d’intervenir en cas de refus du débiteur de payer cette pension, un des problèmes soulevés par les femmes divorcées et inactives.

Un nouveau texte qui décide de mettre la Caisse alimentaire sous l’autorité du ministère de la Justice afin que les tribunaux puissent prendre en charge le dossier et payer. Une démarche qui a rendu plus rapide ce mécanisme créé par la loi 15-01, selon les témoignages de certains avocats, même si aucune statistique n’a à ce jour été rendue publique.

 
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