Les députés ont rejeté le volet recettes du projet de loi de finances, mardi 12 novembre, lors d’un vote solennel, qui s’est soldé par le rejet de l’ensemble du budget. Le texte sera donc transmis dans sa version initiale au Sénat, avant probable recours à l’article 49.3.
C’était attendu, c’est désormais chose faite : mardi 12 novembre, en fin d’après-midi, les élus du Palais-Bourbon ont rejeté la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour l’année 2025. Ce vote négatif entraîne le rejet du l’intégralité du budget de l’État examiné à l’Assemblée nationale. Le deuxième volet, consacré aux dépenses, ne sera donc pas discuté par les députés, pour la troisième année consécutive.
Avec 362 voix contre et 192 pour, la coalition gouvernementale (Renaissance, Horizons, MoDem, Les Républicains) et les élus d’extrême droite ont rejeté un budget fortement révisé sous la houlette du Nouveau Front populaire (NFP). Seule la gauche unie s’est prononcée en faveur d’un texte jugé “compatible NFP”, et doté de “75 milliards d’euros” de recettes supplémentaires, ciblés sur les multinationales et les grands actifs, selon le président de la Commission des finances, Eric Coquerel.
Le texte n’a donc pas franchi la première étape parlementaire et se dirige désormais vers le Sénat, où il devrait connaître un sort plus doux, sans en sortir indemne. A l’issue des débats, qui se tiendront du 18 novembre jusqu’au vote final le 12 décembre, une commission mixte paritaire devrait se tenir avant un probable recours à l’article 49.3.
Quatre « axes d’amélioration » au Sénat
Au Sénat, le gouvernement veut s’appuyer sur la majorité de droite et du centre pour que le budget voté reflète au mieux ses intentions. Mais cet aval s’accompagne d’ajustements substantiels, dont quatre « axes d’amélioration », selon le rapporteur, le sénateur LR Jean-François Husson. Les sénateurs entendent ainsi se pencher sur « la taxe sur l’électricité, l’effort des collectivités locales, la lutte contre la fraude et la réduction des dépenses ».
L’axe le plus important concerne la taxe sur l’électricité. Alors que Bercy souhaitait débloquer plus de 3 milliards d’euros en augmentant les accises au-delà de son niveau d’avant-crise, la commission des Finances du Sénat a voté ce mercredi un amendement qui supprime cet article. Pour compenser ce manque à gagner, un autre amendement, voté également ce mercredi, prévoit d’augmenter la taxe sur le gaz de 4 euros par MWh. Un chemin qui divise, mais qui générerait 900 à 950 millions d’euros de recettes, selon le rapporteur.
Autre axe d’amélioration : l’effort demandé aux autorités locales, vivement critiqué par les élus locaux, alors que le très attendu congrès des maires se profile dans quelques jours. C’est le cas de la maire de Paris, Anne Hidalgo, qui a dénoncé un « hold-up » de l’État, avec une augmentation de 320 euros par foyer pour les Parisiens. Jean-François Husson propose donc de réduire l’effort demandé aux collectivités locales, qui atteint au moins 5 milliards d’euros dans le projet gouvernemental.
Parallèlement, le rapporteur général propose également d’augmenter les recettes via diverses mesures antifraude et anti-abus, comme l’encadrement du crédit d’impôt recherche (400 millions), ou la lutte contre la fraude fiscale en s’attaquant notamment à la pratique du « CumCum » qui concerne l’arbitrage de dividendes, et pour lequel elle présentera un système dans un futur amendement.
Enfin, la commission sénatoriale des finances envisage également de s’attaquer aux dépenses. Il a ainsi approuvé une baisse de 200 millions d’euros de l’aide médicale de l’État (AME), voté la suppression du service national universel (SNU) ou encore adopté un amendement visant à réduire le budget de la formation des enseignants. Les aides à l’apprentissage sont également dans le viseur, pour des économies de plus de 750 millions d’euros.
Au total, les propositions de la commission des Finances du Sénat entraîneraient plus de 4 milliards d’euros d’économies supplémentaires, indique le rapporteur, ce qui permettrait d’éviter une dégradation de l’équilibre prévu par le gouvernement.
Commission mixte mixte, puis 49.3 ?
Après le projet de loi de finances, c’est le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) que le Sénat devra examiner, comme chaque année. Plusieurs dispositions devraient évoluer sensiblement, notamment les modalités d’évolution des retraites en 2025, ou encore le niveau des cotisations des entreprises sur les bas salaires. Les députés n’ayant pas pu voter sur l’intégralité du projet de loi, c’est aussi une première version qui a été transmise au Sénat.
Comme pour le PLF, la séance au Sénat devrait offrir une seconde chance à certains amendements de l’Assemblée nationale qui ne pourraient pas être examinés, s’ils sont repris par les sénateurs. A l’issue de ces débats, les textes seront votés, et probablement adoptés par le Sénat, avant qu’une commission mixte paritaire (CMP), composée de sept députés et sept sénateurs, ne se réunisse pour prendre une décision définitive sur l’avenir. du projet.
En cas de désaccord persistant entre les deux assemblées, la solution la plus probable sera l’adoption du texte par le biais de l’article 49.3 de la Constitution, sans le vote des parlementaires, comme l’a annoncé le Premier ministre Michel Barnier. Le cas échéant, le gouvernement s’exposerait à une motion de censure, et potentiellement à une forte mobilisation des Français.
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