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sur la question du discernement, les avis des experts divergent

P.Pour ceux qui ont peut-être raté l’épisode précédent, le président de la cour d’assises de Charente-Maritime, Franck Wastl-Deligne, l’a rappelé encore une fois ce mercredi 13 novembre : « la question du discernement est centrale dans ce processus. »

Pour les laïcs, il existe trois scénarios : l’abolition du discernement, la modification ou aucun des deux. Dans ce dernier cas, l’accusé est tenu pleinement responsable pénalement. En revanche, il est reconnu irresponsable s’il souffrait, “au moment des faits, d’un trouble psychologique ou neuropsychologique qui avait aboli son discernement ou le contrôle de ses actes”. En cas de manque de discernement au moment des faits, la personne souffrant de troubles mentaux reste punissable et sa peine est réduite d’un tiers.

«Cocktail explosif»

Ces questions se posent donc dans l’affaire qui concerne la cour d’assises de Charente-Maritime, réunie à Saintes depuis mardi 12 novembre. Le juge Hamza Charfeddine, 31 ans, accusé d’avoir tenté d’assassiner son jeune voisin, armé d’un couteau de cuisine, dans la nuit du 23 février 2021, à Rochefort. Et ce, sans raison apparente. Depuis 2017, l’accusé souffre d’hallucinations.

Avant cette nuit d’horreur, il avait connu cinq hospitalisations à l’hôpital psychiatrique Marius-Lacroix de La Rochelle. En cause, sa consommation de cannabis combinée à la suspension du traitement recommandé par son psychiatre, le Dr Paris. « Un cocktail explosif » qui provoque une décompensation psychotique, faisant qu’il ne sait plus distinguer ce qui est réel et ce qui ne l’est pas. Cela se manifestait très souvent par des hallucinations auditives.

“Attaqué par un monstre”

Lorsque le trentenaire est interrogé sur les raisons de ses actes, son discours est confus, changeant et, parfois, peu crédible. Mardi, on a parlé de “magie noire et de sorcellerie” qui le mettaient dans cet état depuis plusieurs années. Le soir des événements, il se souvient de deux histoires différentes : il est allé rendre visite à sa voisine parce qu’il pensait qu’elle avait été « attaquée par un monstre » ; Dans un autre scénario, il entendait des bruits venant de sa maison et cela le dérangeait.

« J’avais mal à l’oreille alors je suis descendu voir s’il allait bien », se défend l’interviewé. « Or, tous les témoins disent que vous l’avez insultée derrière la porte et menacée de mort », souligne le président.

Schizophrène?

Les experts ont défilé mercredi après-midi et leurs avis divergent. En résumé, trois psychiatres estiment que Hamza Charfeddine est totalement responsable, au point que sa capacité de discernement est compromise. En face, un autre psychiatre, le docteur Bescond, et une psychologue, Anne Jolly, estiment que l’accusé souffre de troubles schizophréniques, allant dans le sens de l’abolition du discernement à l’occasion de la tentative de meurtre de cette nuit de février 2021.

Une première expertise médicale psychiatrique, réalisée par le docteur Foulounoux, peu après les faits, a plutôt conclu à une altération car “il y a eu une rupture avec la réalité”. « La schizophrénie n’existe pas », insiste le praticien. Pour elle, si l’accusé arrêtait de consommer du cannabis et suivait une thérapie, cela suffirait pour qu’il se sente bien. A ses yeux, ce sont les joints qu’il fumait et l’arrêt des traitements qui ont conduit à ce drame : « il connaissait les conséquences néfastes de la prise de drogues toxiques, pour moi il en reste responsable. »

“Sa relation toxique avec des personnes toxiques lui permettait d’agir plus facilement”

Idem pour le docteur Pillette, qui a été sollicité avec son confrère pour un deuxième avis lors des investigations : « c’est en raison de sa relation toxique avec les substances toxiques, qui a facilité le geste. » Lors d’une nouvelle contre-expertise demandée par la défense, le Dr Bertrand va dans le même sens : l’accusé a une attitude manipulatrice mais ne souffre pas de schizophrénie.

Le Dr Bescond, psychiatre, n’est pas de cet avis. « Il souffre d’un trouble psychotique chronique, en l’occurrence de schizophrénie paranoïde », résume-t-il. Il n’est pas répertorié dans le registre des manipulations. » Thèse soutenue par Anne Jolly, psychologue experte : « après 2017, sa réflexion est clairement délirante. Il n’a aucun souvenir des faits et est détruit. Il essaie d’expliquer ce qui lui est inexplicable. »

Ce jeudi est l’heure des mémoires des avocats des parties civiles et de la défense, ainsi que des requêtes du procureur général. Verdict attendu aujourd’hui.

 
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