Il faisait frais et venteux samedi dernier à l’Université Bishop’s. Sous un ciel sans nuages et sous les chauds rayons du soleil, les Gaiters ont affronté les Huskies de l’Université Saint Mary’s en finale de la Coupe Loney.
Les Gaiters soulèveraient, quelques heures plus tard, le précieux trophée, emblème du championnat de football universitaire canadien de la Conférence maritime.
Ils atteignent ainsi une première demi-finale canadienne depuis leur arrivée dans les Maritimes en 2017.
Matt McBrine, directeur sportif de Bishop’s, a souri en regardant son programme de football affronter Saint Mary’s en finale.
Une quatrième participation pour Bishop’s à la Coupe Loney, une première à Lennoxville.
Ma question était plutôt simple.
« Est-ce qu’il y aurait encore du football à Bishop’s si vous n’aviez pas quitté le Québec pour jouer dans les Maritimes ?
« Non », a-t-il répondu.
Une décision mûrement réfléchie
C’est en 2016 que l’idée de se joindre aux autres universités de la Maple League commence à se concrétiser.
Ayant récemment pris ses fonctions, McBrine a eu de nombreuses discussions avec plusieurs parties prenantes. Et surtout, avec son principal de l’époque, Michael Goldbloom.
Celui qui a pris sa retraite en 2023 ne manque pas un seul match de football des Gaiters.
Il a été un spectateur attentif, mais aussi un peu nerveux, samedi dernier.
Les Gaiters ont finalement quitté le Réseau sportif étudiant du Québec (RSEQ) en 2016 et ont rejoint les rangs des Maritimes, dès la saison 2017.
Une décision qui était loin de faire l’unanimité. Qui a même été critiqué par d’anciens joueurs de l’équipe.
« Je suis arrivé au pouvoir en 2008. Au fil des années, j’étais de plus en plus inquiet pour nos jeunes. Et plus sceptique quant à la valeur de notre participation au RSEQ. Je crois fermement aux sports d’équipe, qui peuvent constituer un élément très important dans la mission éducative d’une université », a déclaré M. Goldbloom.
« Mais la valeur éducative est presque nulle lorsqu’une équipe gagne 70-3, à plusieurs reprises. J’ai vu les mêmes résultats année après année. On savait, saison après saison, que Montréal et Laval allaient gagner. Le but n’était pas seulement de gagner. Mais les leçons que le sport peut enseigner n’étaient pas accessibles à nos jeunes. Ils ne pouvaient pas travailler plus dur ; commencer un match, ou une saison, en sachant comment ça allait se terminer, ça enlève toutes les valeurs du sport. »
Et cette poursuite des victoires a provoqué quelques faux pas, déplore Michael Goldbloom.
« J’ai vu Bishop’s poursuivre ses efforts pour être compétitifs, ce qui nous a amenés à faire des choses que je pensais être mauvaises. Nous avons recruté des jeunes qui n’avaient pas les capacités académiques, parce que nous voulions gagner. Les jeunes sont venus ici et n’ont pas obtenu leur diplôme. On dépensait, on n’arrivait pas à suivre Laval et Montréal. Nous avons pris de mauvaises décisions.
Forts vents contraires
Une fois la décision prise, Goldbloom et McBrine savaient que les vents contraires allaient souffler fort. Très fort.
« C’était loin de faire l’unanimité. De nombreuses personnes, et certaines sont encore ici aujourd’hui, nous ont critiqués. A notre époque, ce n’était pas comme ça, on ne travaillait pas assez, etc. Il était évident pour nous que ce n’était plus possible. Avec Matt, nous avons pris la décision de déménager. Je donne beaucoup de crédit à Matt pour avoir eu le courage de présenter ce projet », se souvient M. Goldbloom.
« J’ai vu des entraîneurs d’équipe qui avaient des attitudes qui me mettaient mal à l’aise. Et je savais que Matt pensait la même chose. Des entraîneurs qui crient, pour qui la réussite sportive est plus importante que la réussite scolaire, on ne voulait pas de ça.»
« Matt a bâti un programme fondé sur des valeurs dans lequel les jeunes sont avant tout des étudiants. Les entraîneurs engagés, dans le football et dans tous les sports, ont pour rôle d’aider les jeunes à réussir leur parcours académique.
Les Gaiters mangeaient leur pain noir à leur débarquement dans les Maritimes ; que ce soit contre Acadia, St-Francis-Xavier, Saint Mary’s ou Mount Allison, personne n’a fait de cadeaux de bienvenue aux Mauves.
Ils n’ont gagné que deux fois lors de leurs 16 premiers matchs, sur deux saisons.
Malgré tout, la troupe du Chérif Nicolas, embauchée en 2016, a tenu bon.
« Tout le monde pensait que ce serait facile pour nous à notre arrivée dans les Maritimes. Lors de notre premier match, à Acadia, j’étais assis à côté du président d’Acadia. Et nous avons été écrasés. Il a mis son bras autour de mes épaules pour me réconforter ! »
« Chérif a établi un programme solide. La majorité de nos joueurs sont originaires du Québec. Mais pourquoi choisissent-ils de venir chez nous ? Ils choisissent ce modèle universitaire. Ces anglophones et ces francophones qui jouent ensemble, j’adore ça », poursuit Michael Goldbloom.
Ce samedi, les Golden Hawks de l’Université Laurier, champions de l’Ontario, affronteront les Gaiters au Coulter Field.
La parité, possible ?
Le bilan des équipes représentant les Maritimes en demi-finale canadienne n’est pas reluisant, peu importe l’adversaire.
La parité, encore une fois, sera probablement sur toutes les lèvres durant cette semaine de préparation.
Mais quel que soit le résultat du match de samedi, Bishop’s a prouvé son point de vue et se qualifie pour le carré d’as national.
« Ça fait quoi, 11 ans que Montréal et Québec s’affrontaient en finale de la Coupe Dunsmore ? À quand remonte la dernière fois qu’une autre équipe a gagné?», demande l’ancien directeur de Bishop’s.
« Le sport professionnel a compris qu’un niveau égal de compétition était essentiel ; nous avons donc trouvé un moyen de donner leur chance à différentes équipes, à travers différentes mesures, comme le repêchage, ou le plafond salarial. On ne peut pas utiliser ces éléments dans le sport universitaire.
« Nos dirigeants universitaires doivent trouver des moyens d’atteindre la parité. Ce sera à mes successeurs d’y répondre ! dit-il avec un sourire.
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