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la bataille juridique ne fait que commencer

Après quatre mois d’un débat public intense et animé autour du projet de mine de lithium Échassières, dans l’Allier, le rapport final sera présenté ce lundi à Moulins. L’occasion de faire le point des quinze réunions publiques, qui visaient à informer les citoyens et recueillir leurs avis sur ce projet stratégique portée par le groupe Imerys, leader mondial des spécialités minérales pour l’industrie. Mais une décision, prise en plein été, a bousculé la donne et accentué les tensions.

« C’est une transition forte. Ils ont sorti les chars et les bulldozers”, ne vous mettez pas en colères Jacques Morisot, membre du bureau collégial de l’association Préservons la Forêt des Colettes, qui s’oppose à l’extraction et à la transformation de minerais rares en terres bourbonnaises.

Cet habitant de Saint-Bonnet de Rochefort fait référence à l’arrêté signé par le gouvernement de Gabriel Attal et publié le jour même du second tour des élections législatives, le 7 juillet.

Le texte place la mine Échassières sur la liste des « Projets d’intérêt national majeur ». Ce statut particulier, créé par la loi relative à l’industrie verte, permet à des projets industriels jugés importants pour la souveraineté nationale et la transition écologique de bénéficier de mesures d’accélération ou de dérogations administratives, dans le but de faciliter leur mise en œuvre.

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Pour l’État, qui entend se débarrasser de sa dépendance aux importations du métal précieux, notamment en provenance de Chine, ce projet baptisé EMILI s’inscrit tout à fait dans cette catégorie. Elle doit en effet permettre d’extraire 34 000 tonnes d’hydroxyde de lithium par an pendant au moins 25 ans afin de fabriquer les batteries d’environ 700 000 voitures électriques chaque année.

Manque de transparence et d’honnêteté pointé du doigt

Une aberration que dénoncent, de leur côté, les associations Préservons la Forêt des Colettes et StopMines03 qui ont déposé, le 5 septembre, un recours devant le Conseil deEtat contre ce décret. Elle a également été signée par une quarantaine de personnes, habitant les communes concernées ou voisines.

« A A aucun moment du débat public il n’a été fait référence à ce classement, alors même qu’Imerys l’avait demandé au printemps. Cependant, le groupe n’a cessé de dire qu’il faisait preuve de transparence. C’est un manque d’honnêteté et même un mensonge »underlines Jacques Morisot.

« Imerys ne fait qu’irriter des associations comme la nôtre qui demandent que l’opportunité de cette mine soit vraiment débattue », poursuit cet habitant.

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Imerys confirme La Tribune ayant demandé à en faire partie liste des « projets d’intérêt national majeur » et précise « hhonoré par cette décision qui constitue une reconnaissance du caractère stratégique du projet EMILI pour la transition écologique et la souveraineté nationale ».

L’entreprise tient également à préciser que cette reconnaissance l’engage et ne remet pas en cause l’intérêt et la portée du débat public.

Insuffisance des motivations

Pour les avocats des associations et des habitants, « étant donné que ce projet aura un impact sur l’environnement, nous estimons que ce décret aurait dû faire l’objet d’une consultation publique avant d’être pris. ».

« Cela contrevient, à notre avis, au Code de l’environnement et au Convention d’Aarhus, qui énonce les grands principes de la participation du public »explains Maître Benjamin Cottet-Emard, lawyer with Théodore Catry of associations and residents.

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Ces deux conseils dénoncent également le fait que le décret n’est accompagné que d’une fiche d’impact budgétaire, et non d’une évaluation environnementale relative aux espèces protégées.

« La fiche d’impact ne précise pas quels types de faune ou de flore seront touchés. Il n’y a rien sur la consommation d’eau, sur les impacts sur le paysage…», poursuit l’avocat.

Or, selon eux, il est indispensable de se prononcer sur ce caractère d’« intérêt national majeur ».

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Le recours fait, enfin, l’objet d’une QPC, une « question prioritaire de constitutionnalité ». “Nous contestons la constitutionnalité d’une partie de la loi industrie verte qui permet, avec cette qualification d’intérêt national majeur, d’obtenir l’une des trois conditions nécessaires pour bénéficier d’une dérogation à l’interdiction de destruction des espèces protégées”, explains Master Benjamin Cottet-Emard.

En clair, ce décret peut faciliter le projet EMILI, même s’il menace des espèces protégées et notamment sur ce territoire d’Échassières, les rosalies des Alpes, petits insectes gris bleuté.

Permis de construire accélérés

L’autre avantage de cette qualification est qu’elle permet d’accélérer et de centraliser les procédures de modification des documents locaux d’urbanisme.

Comme indiqué dans la fiche d’impact associée au décret, que La Tribune a pu consulter : « les procédures de droit commun pourraient prendre entre 8 mois et 24 mois, retardant ainsi la commercialisation des produits en 2028 et la viabilité financière du projet ». Toutefois, une qualification permettrait d’ouvrir une procédure accélérée par l’État. Ce qui indigne les associations, qui demandent que ces questions soient débattues lors des conseils municipaux.

De son côté, Imerys estime que le gain de temps sera marginal et souligne que cela ne change rien à ses obligations réglementaires.

« De vraies questions se posent »

Même s’il est très difficile de préjuger de la décision du Conseil d’État, elle sera suivie de près, selon Maître Andréa Rigal-Casta, avocate au barreau de Paris, spécialiste du droit de l’environnement. Les réponses ne sont pas attendues avant 14 à 18 mois. Pour autant, le recours ne suspend pas le projet.

« Pour moi, l’appel n’est pas voué à l’échec, car il y a de réelles questions quant à sa régularité, notamment en matière de participation et d’information du public. ».

« La décision du Conseil d’État sera très intéressante à suivre. Il lui faudra aussi se prononcer sur le bien-fondé de la raison impérative ici édictée et donc, de la balance entre les avantages économiques et les inconvénients sur l’environnement, et notamment la faune. Si l’aspect politique n’entre pas en jeu, les aspects économiques et écologiques oui », analyse Maître Andréa Rigal-Casta.

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Et la fiche d’impact rappelle que le projet EMILI devrait générer près de 1 510 emplois dans l’Allier et le département voisin du Puy-de-Dôme et qu’il a également fait l’objet d’un financement public. Une aide d’un million d’euros a en effet déjà été allouée par le plan Relance. Vingt-deux millions d’euros ont également été engagés dans le projet dans le cadre de France 2030.

D’autres attaques à venir

En fin de compte, ce recours ne devrait être que le premier d’une longue bataille judiciaire.

« Ce décret de l’Etat n’est autre que le premier acte juridique d’existence de la mine de lithium. Nous avons dû l’attaquer », note Master Benjamin Cottet-Emard.

« Nous sommes conscients que ce recours n’arrêtera pas le projet, même si nous gagnons au Conseil d’Etat. Mais cela obligerait l’État à prendre des décisions juridiques», complète Etienne Josse, membre de StopMines03.

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D’autres recours ne devraient pas tarder. Imerys confirme en effet La Tribune ayant déposé des demandes de permis de construction pour les pilotes de Beauvoir (mine et usine de concentration) et de La Loue (usine de conversion), ainsi que des demandes d’autorisations environnementales pour la galerie pilote, l’usine pilote de concentration ainsi que celle de l’usine pilote de conversion.

 
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