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André Blais reçoit le prix Warren E. Miller de l’American Political Science Association

Professeur émérite au Département de science politique de l’Université de Montréal, André Blais est devenu le premier chercheur non américain à recevoir le prestigieux prix Warren E. Miller, décerné par l’American Political Science Association.

Cette distinction, décernée tous les deux ans pour récompenser une carrière exceptionnelle dans le domaine des élections, de l’opinion publique et du comportement électoral, marque l’aboutissement d’une carrière remarquable.

De Drummondville à l’UdeM en passant par Toronto

Hésitant entre les mathématiques et la science politique, André Blais était loin de se douter qu’il mènerait une carrière de professeur et de chercheur qui le ferait connaître à l’échelle internationale. Avant d’être admis au baccalauréat en science politique à l’Université Laval en 1966, il se destinait plutôt à l’enseignement au niveau collégial.

« J’ai finalement choisi la science politique parce qu’à l’époque, les sciences sociales étaient dans l’air, se souvient-il, faisant référence au contexte de la Révolution tranquille au Québec. Il y avait des choix collectifs qui étaient imposés à l’État providence et c’est ce qui m’intéressait. »

Ce choix allait façonner non seulement sa carrière, mais l’ensemble du domaine d’étude du comportement électoral.

Le parcours d’André Blais vers la renommée internationale n’a pas été linéaire. Après son baccalauréat, il s’est dirigé vers l’Université York à Toronto pour y compléter sa maîtrise et son doctorat.

Ses études l’ont amené à explorer des sujets aussi variés que la politique agricole et les résultats des élections. « J’essayais de concilier deux intérêts : les élections et les politiques publiques liées au monde agricole », explique-t-il. Cette approche innovante, mêlant des domaines a priori disparates, deviendra sa marque de fabrique.

Après son doctorat, il a enseigné pendant deux ans à l’Université d’Ottawa, puis pendant un an à l’Université Laval, avant d’obtenir un poste de professeur à l’Université de Montréal.

Contributions majeures à la science politique

Au fil des ans, André Blais a laissé une marque indélébile dans plusieurs branches de la science politique. Son livre Voter ou ne pas voterÉcrit en solo et publié en janvier 2000, il remet en cause la théorie des choix rationnels, très en vogue à l’époque en économie. Il sera cité par près de 1000 auteurs scientifiques par la suite.

« J’ai démontré que cette théorie est imparfaite pour expliquer la décision de voter ou de ne pas voter », explique André Blais. En mettant l’accent sur la position morale du devoir de voter, il ouvre ainsi de nouvelles perspectives dans l’étude de la participation électorale.

Ses travaux sur le vote stratégique bousculent également les idées reçues : en clarifiant le concept et en développant des méthodes pour le mesurer précisément, le professeur Blais démontre que, contrairement à la croyance populaire, le vote stratégique est moins fréquent qu’on pourrait le croire au Canada.

Plus largement, André Blais a publié une vingtaine d’ouvrages et plus de 200 articles dans des revues scientifiques telles queRevue américaine de science politiqueLE Revue britannique de science politique, Études politiques comparées Et Choix publicIl était membre du comité de rédaction duEncyclopédie internationale des élections et co-chercheur principal de l’Étude électorale canadienne.

Engagement constant dans les débats publics

Loin de demeurer confiné dans sa tour d’ivoire, André Blais participe à de nombreux débats nationaux et internationaux sur les modes de scrutin. Ses recherches révèlent que les conséquences des différents systèmes électoraux sont souvent surestimées, notamment pour les électeurs.

« Tous les modes de scrutin ont leurs avantages et leurs inconvénients et je suis critique envers les partisans de la proportionnelle intégrale qui y voient trop de vertus, souligne-t-il. Au mieux, elle améliore le taux de participation de deux à trois points, pas plus. »

Il poursuit : « Au Canada, si nous avons décidé de conserver le mode de scrutin actuel, c’est parce que les partis y trouvent leur intérêt – ce qui n’est pas une bonne raison ! Comme il existe des dizaines d’autres modes de scrutin, il est difficile de croire que notre mode de scrutin est le meilleur. »

Bien qu’il ait ralenti son rythme, André Blais demeure animé par la même curiosité qui l’a poussé à poursuivre des études supérieures. Il travaille actuellement sur un projet ambitieux en Allemagne, explorant la question cruciale de l’acceptabilité des résultats électoraux.

Il a notamment présenté à 5 000 personnes différents scénarios de résultats électoraux et leur a demandé quelle était la probabilité qu’elles participent à une manifestation pour contester les résultats électoraux proposés.

« L’idée de cette recherche est née du refus de Donald Trump et de ses partisans de reconnaître l’élection présidentielle de 2021, ce qui pose la question de la légitimité du processus électoral, observe André Blais. Car ce qui est important dans une démocratie, c’est qu’on accepte de perdre… Reconnaître la victoire légitime le processus électoral. »

Une reconnaissance bien méritée

Alors que la démocratie est confrontée à de nouveaux défis partout dans le monde, les travaux d’André Blais soulignent l’importance de comprendre les mécanismes du vote et de la participation citoyenne.

À cet égard, le prix Warren E. Miller couronne une carrière inspirante qui incarne l’idéal du chercheur engagé, capable de concilier rigueur académique et pertinence sociale.

Et s’il se dit fier et honoré de ce prix « très spécial », il avoue avoir été grandement surpris de le remporter. « Je ne savais pas que j’étais en lice, ce sont des gens qui ont soumis ma candidature sans que je le sache et j’ai hâte de savoir de qui il s’agit ! », s’exclame-t-il.

 
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