Mel Gibson – « Vol à haut risque »

Riche actualité en cette dernière décade de janvier 2025 pour Mel Gibson : en même temps que la sortie française de Vol à haut risquel’acteur est devenu l’un des trois ambassadeurs à Hollywood du quarante-septième président des États-Unis d’Amérique Donald J. Trump, afin d’être « ses yeux et ses oreilles » au sein d’une usine à rêves qui penche allègrement du côté démocrate de l’échelle politique américaine. Au-delà du signal très négatif que contiennent intrinsèquement l’initiative et les propos utilisés par le président Trump, tant envers la liberté d’expression qu’une certaine idée de l’art « non officiel », cette actualité politique déboule ironiquement au moment même de la sortie d’une œuvre. marquant artistiquement parlant les premiers signes de la cécité de son réalisateur. Que l’on aime ou non le très controversé Mel Gibson, tant l’homme que l’acteur ou le cinéaste, il semble incontestable qu’il a évolué de film en film (de Un cœur brave [1995] a Tu ne tueras pas [Hacksaw Ridge, 2016]au fond) une esthétique puissante faisant de la grossièreté de la représentation de la violence, aux excès presque boschiens, une manière de caractériser la démarche sacrificielle de ceux qui résistent à un système ou à un ordre établi avec des excès aussi brutaux qu’absurdes. Le cinéaste Mel Gibson avait en effet un œil (nous n’entrerons pas dans le domaine de l’oreille). Il est donc surprenant de constater à quel point Vol à haut risque cherche à éviter tout risque, se blottit dans le confort de la volatile petite série B, lisse toutes les aspérités possibles pour mener à bien sa petite routine sans broncher jusqu’à sa résolution attendue et concise.

Trio en huis clos (M. Dockery, T. Grace, M. Wahlberg) (©Metropolitan FilmExport)

Le synopsis, poussiéreux, semble avoir été retrouvé au fond du tiroir du bas d’un meuble des années 80 ou 90 chiné lors d’une brocante dominicale : Winston (Topher Grace), un comptable talentueux qui a trahi le baron. de la mafia pour laquelle il travaillait, est arrêté alors qu’il fuyait vers l’Alaska par les US Marshals Madelyn Harris (Michelle Dockery), de retour après une longue absence sur le terrain causée par une mission antérieure qui s’est soldée par un drame tragique et traumatisant. chemin. La policière doit s’occuper du transfert du prisonnier devenu témoin du procès du mafieux, depuis sa planque de motel perdue au milieu de nulle part à Anchorage ; ils prennent un avion dont le pilote, nommé Daryl Booth, (Mark Wahlberg) devient très vite méfiant…

Ce qui est prévisible arrive toujours dans ce film qui ne reste pourtant jamais vraiment ennuyeux, grâce à un sens de la narration, avouons-le, plutôt maîtrisé. Si tout reste assez téléphonique, rien n’est fondamentalement désagréable dans ce film, rendu efficace par son suspense grâce à un dispositif d’une simplicité presque déconcertante: trois personnages (sans compter ceux qui n’interviennent qu’au téléphone, adjuvants et/ou menaçants, avec cette nouvelle question : « Y a-t-il une taupe au sein des US Marshals »), un avion duquel on ne peut échapper, volant au-dessus des montagnes hostiles sans civilisation possible ? Alaska. C’est grâce à cet appareil que Mel Gibson se connecte Vol à haut risque de son cinéma précédent, créant un espace de décivilisation : trois humains qui ne peuvent s’échapper que par la violence, perdus au milieu d’une étendue sauvage et donc, par essence, menaçante.

Un US Marshals prêt à tout (M. Dockery) (©Metropolitan FilmExport)

Le fil qui tisse ce lien reste cependant mince et fragile, Gibson et le scénariste du film Jared Rosenberg misant cependant globalement sur le divertissement forain, entre angoisse calibrée et pulsions carnavalesques dont Mark Wahlberg, chauve et délirant, est ici le parfait et méchant représentant. de dessin animé aussi dangereusement vicieux que profondément stupide. Et Vol à haut risque assumer son incohérence par sa vacuité histrionique, par ses incohérences qui n’auraient alors plus la moindre importance (la loi de la gravité variant selon les besoins scénaristiques d’un film dans lequel un couteau de chasse qui traîne dans l’avion choisit ou non de glisser vers l’un ou l’autre sans se soucier de l’attraction terrestre), par son insouciance quant à savoir s’il réinvente la ligne de découpe à l’eau chaude. A sa manière, enfin, de ne vouloir rien faire d’autre qu’un divertissement au mètre (rien de mal à cela d’ailleurs), sans aucune réflexion ni vision sur le monde, propre à être diffusé dans les foyers par la magie des plateformes de streaming sans déranger aucun membre de la même famille regardant distraitement l’écran.

-

Un méchant de carnaval (M. Wahlberg) (©Metropolitan FilmExport)

Divertissement certes efficace mais aseptisé, mixage thriller galvaudé et film de copain stéréotype, Vol à haut risque est déjà obsolète, et pose sérieusement la question de sa légitimité dans les salles obscures en 2025. Il y a peut-être deux réponses à cette question ; la première hypothèse serait que Mel Gibson, pour ses projets suivants, veuille redorer artistiquement son image à Hollywood avec une œuvre inoffensive qui ne provoque aucun grincement de dents (on comprendra que politiquement, les événements récents ont érodé cette surface de nouvelle respectabilité). La seconde s’appuierait sur cette volonté hollywoodienne de mettre le réveil sur la profession, cela non sans un certain mercantilisme. Ce « film pour rien » n’avait-il donc pas le but un peu cynique, dès ses débuts, de permettre à Mel Gibson d’exhumer la lucrative saga Arme mortelledont il termine actuellement le cinquième volet ? Je ne suis pas sûr d’être pressé de voir ça.

© Tous droits réservés. Culturopoing.com est un site entièrement bénévole (Association loi 1901) et respectueux du droit d’auteur, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à promouvoir. Les photos visibles sur le site le sont à titre indicatif uniquement, ne sont pas destinées à une exploitation commerciale et ne sont pas la propriété de Culturopoing. Toutefois, si une photographie échappe néanmoins à notre contrôle, elle sera immédiatement supprimée. Nous comptons sur la gentillesse et la vigilance de chaque lecteur – anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe.
Merci de contacter Bruno Piszczorowicz ([email protected]) ou Olivier Rossignot ([email protected]).

(function(d, s, id) { var js, fjs = d.getElementsByTagName(s)[0]; if (d.getElementById(id)) return ; js = d.createElement(s); js.id = identifiant; js.src=”https://connect.facebook.net/fr_FR/sdk.js#xfbml=1&appId=249643311490&version=v2.3″; fjs.parentNode.insertBefore(js, fjs); }(document, ‘script’, ‘facebook-jssdk’));

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

-

PREV Décès de Stéphane Venne, auteur-compositeur du générique de Star Académie à Québec
NEXT à La Queue-en-Brie, l’explosion des coûts de chauffage fait bouillir ces locataires