« Une France désemparée et en quête de tranquillité ». Le titre de l’enquête établie par le cabinet d’études Elabe en partenariat avec l’Institut Montaigne et la SNCF donne déjà des indices sur l’état d’esprit des Français.
Pensée à l’échelle nationale, elle s’appuie sur le quotidien des femmes et des hommes pour comprendre « ce qui construit leurs opinions, motive leur vote ou leur abstention, produit la colère, la joie, le partage, le repli ou la lassitude », puis propose une analyse par région. . 10 000 Français y ont participé dans les douze régions métropolitaines, dont 800 dans le Grand Est.
Insécurité croissante
Selon le cabinet d’études, nous entamons « une nouvelle ère : celle de la polycrise ». En effet, depuis la pandémie de Covid-19, il y a eu de l’inflation et une succession de crises géopolitiques, climatiques, politiques, budgétaires et économiques… Un contexte qui a fait monter en flèche le sentiment d’insécurité. “Jamais les habitants du Grand Est n’ont été confrontés à une telle accumulation de chocs et de transitions”, note l’étude. A tel point que l’insécurité « se conjugue au pluriel ».
Elle est économique et sociale puisque « 63 % des salariés et ouvriers craignent d’avoir des difficultés à joindre les deux bouts, 46 % des professions intermédiaires et 51 % des cadres ». Elle est liée à un climat de plus en plus tendu. “43% des habitants ont peur d’être victimes d’agressions physiques.” C’est aussi climatique. « 50 % des personnes interrogées craignent des conditions de vie de plus en plus dures » […] 30% considèrent que leur lieu de vie est exposé aux catastrophes naturelles » et « 31% estiment que le changement climatique menace l’activité économique de leur région. Enfin, il y a la précarité sanitaire. « 42 % craignent de tomber malade à cause de la pollution », tandis que « 44 % craignent d’avoir des difficultés à se faire soigner faute de soignants ou pour des raisons financières (41 %) ».
Face à ce constat, la majorité des habitants du Grand Est estiment que le pays « a perdu sa puissance économique et son influence sur la scène internationale et ne tient pas sa promesse sociale. »
Une adaptation nécessaire mais contrariée
La crise inflationniste n’a pas effacé les inégalités de revenus. Pas de surprise là-bas. En revanche, elle impacte toutes les catégories sociales. Qu’ils soient cadres, enseignants ou ouvriers, « la plupart des habitants de la région sont contraints de s’adapter, de faire de nouveaux arbitrages pour préserver « ce qui compte » ». 82% attendent les bons plans et les promotions avant d’acheter (dont 77% des cadres, 87% des professions intermédiaires et 80% des ouvriers et employés). Par ailleurs, 76% déclarent réduire leurs dépenses non essentielles pour maintenir leur niveau de vie sur les achats dits essentiels (c’est le cas de 64% des cadres, 72% des professions intermédiaires et 77% des ouvriers) .
-« Les habitants, les plus modestes – déjà pour la plupart contraints avant même la crise inflationniste de mettre en place des stratégies de « survie » – subissent de plein fouet la hausse du coût de la vie. 58% des personnes ont restreint les activités extrascolaires ou les cours de pension alimentaire pour enfants, 48% déclarent demander une aide financière à leurs proches et 32% ont recours à l’aide alimentaire.
Protection du climat et solidarité
Concernant désormais le changement climatique, « 33 % des habitants du Grand Est déclarent prendre en compte dans leur manière de vivre l’impact de leur mode de vie et de leur consommation sur les ressources naturelles, la pollution et les émissions de gaz à effet de serre ». Pour 47%, c’est parfois une contrainte mais le chemin qu’ils tentent de parcourir au quotidien. 10% placent ce changement de vie directement dans la case « problème », jugeant qu’ils ne peuvent pas le faire et les 10% restant considèrent que « ce n’est pas leur problème ».
L’enquête constate que cette adaptation est parfois empêchée par le manque d’informations, de solutions et de ressources financières. « 65 % des personnes interrogées déclarent être freinées par le manque de moyens financiers pour adapter leur mobilité, rénover leur logement, etc. »
Face aux nombreuses insécurités énumérées ci-dessus, les « Français choisissent massivement la solidarité » – moins de 10 % préfèrent la responsabilité individuelle – même si « des doutes persistent sur la capacité financière de la France à la sauvegarder. » Ainsi 55% sont convaincus qu’il est possible de trouver des solutions pour maintenir le système de retraite actuel contre 35% qui estiment que la France n’en a plus les moyens. Concernant le système de santé, 56% des habitants du Grand Est pensent pouvoir le maintenir tandis que 34% ne voient pas les solutions pour y parvenir.
Un besoin de tranquillité
Dans ce contexte, l’enquête souhaite démontrer que « le travail tient toujours une place importante » dans la vie des habitants du Grand Est « mais sa centralité est concurrencée par la recherche d’un nouvel équilibre ». 85% indiquent que leur vie familiale doit occuper une place importante pour qu’ils se sentent bien dans leur vie, 77% souhaitent que ce soit leur vie sociale et 72% estiment que la place occupée par le travail doit être importante (73% des moins de 35 ans actifs ans et idem chez les plus de 35 ans).
Enfin, pour se sentir bien dans la vie, on apprend que dans le Grand Est, 83% des habitants privilégient la stabilité avec un CDI, 89% comptent sur la fiabilité de quelques amis proches sur lesquels ils peuvent compter, 79% ont besoin de la sérénité de une vie sereine, 73% estiment dépenser juste le nécessaire et épargner le plus possible et 73% visent à vivre sereinement en faisant des projets à long terme.