Louis-David Najar « n’a plus rien ». Sa maison. Son atelier. Ses motos. Son studio de photographie. Les incendies de Los Angeles lui ont tout pris. Installé à Altadena depuis 2018, ce Français, né à New York de parents colombiens en 1983 et naturalisé à 25 ans, se bat désormais pour se reconstruire grâce à une campagne de financement participatif sur le site GoFundMe.
Sa maison d’Altadena détruite par l’incendie d’Eaton, Louis-David Nadjar la restaure et installe son atelier de broderie au point de chaînette, une technique artisanale réalisée avec des machines datant de 1870. Malgré son désarroi, il
Comment s’est produit l’incendie ? Avez-vous reçu un ordre d’évacuation ?
Tout s’est passé lundi dernier. Il y avait des vents très forts et j’ai pu constater des dégâts dans mon jardin. J’ai passé la journée sans Internet, sans électricité. Mais ça n’a pas commencé à brûler tout de suite. A 19 heures, mon voisin a couru chez moi pour me dire qu’il fallait absolument partir au plus vite. Je n’ai pas eu d’alerte, je n’ai pas eu de notification, je n’ai pas eu de message, car je n’avais ni réseau, ni Internet, ni électricité.
Là, je suis monté sur mon toit, j’ai vu la ligne de feu. Je l’ai vu avancer dans ma direction. Et puis j’ai paniqué et j’ai récupéré des choses. Je suis monté dans ma voiture et je suis parti. Le lendemain, j’ai essayé de rentrer chez moi le matin. Et il y avait tellement de fumée que ce n’était pas possible. Et dans l’après-midi, j’ai enfin pu rentrer et j’ai vu qu’il ne restait plus rien.
Comment gérez-vous la situation aujourd’hui ?
Je vis un peu au jour le jour. En matière de logement, je compte sur des personnes que je connais ici, qui m’ouvrent leurs portes pour me donner soit un bout de canapé, soit un lit, soit une chambre d’amis. Au niveau du travail, je tiens à vous dire que j’en ai plus, puisque je n’ai plus d’outils, plus d’atelier. Je n’ai plus rien. Donc pour l’instant, la vie est un peu sur pause, avec l’envie de rentrer chez moi pour peut-être récupérer quelques outils ou quelques pièces de moto.
Je ne me suis jamais vraiment demandé ce que ça faisait de vivre une véritable catastrophe. Ayant grandi en France, j’ai vu des gens perdre leur maison à cause d’inondations, d’incendies, des gens perdre des membres de leur famille. Mais c’est moi qui me retrouve aujourd’hui au fond de la vague, je suis un peu abasourdi. Je suis heureux d’être en vie mais j’ai aussi très peur. J’ai peur de l’avenir et j’ai peur d’avoir tout perdu, d’avoir perdu mon investissement. D’une certaine manière, j’ai l’impression que le temps est figé et que l’avenir est devenu très incertain.
Quelle sera la prochaine étape pour vous ?
Je sens au fond de moi que je n’ai que deux options. Option 1 : je me laisse mourir, je désespère, j’abandonne, j’abandonne, je me dis que la vie est finie. Option 2 : J’imagine un projet encore plus pharaonique et encore plus incroyable et je donne tout pour y parvenir, que ce soit me reconstruire, déménager à nouveau, commencer une nouvelle vie ailleurs, peut-être revenir en France pour faire un projet gastronomique, je n’en ai pas. je n’en sais rien.
Retrouvez notre dossier sur les incendies à Los Angeles
Beaucoup de gens me disent que je vais me relever, que je le ferai, que je suis courageux, mais je veux vous le dire… Franchement, ce n’est pas facile. Aujourd’hui, mon cerveau est surtout occupé à survivre, à respirer, à boire de l’eau, à recommencer à courir pour me détendre un peu. Malheureusement, la qualité de l’air est vraiment mauvaise.