L’opposition contre Jean-Marie Le Pen, décédé ce mardi à l’âge de 96 ans, s’est aussi menée en musique. En 1985, un an après la percée du Front National aux élections européennes, le Bérurier Noir, groupe punk rock français, signe Déchets. « Le monde est une vraie porcherie/Les hommes se comportent comme des cochons », scande le leader François Guillemot dans cette chanson anticapitaliste et anti-oppression.
Son slogan, « la jeunesse fait chier le Front national », n’apparaît que plus tard, au fil des concerts. « Nous sommes partis en tournée et avons vite réalisé que les jeunes réagissaient énormément à cette chanson en particulier. Surtout quand on dit « Le Pen ? Porcherie !”, nous avons ressenti une énorme vibration soudaine venant du public […] La vérité c’est qu’on s’est dit wow, c’est la jeunesse qui fait chier le Front National ou quoi ? », expliquait le guitariste en 2017 au magazine Salle verte.
Devenu depuis l’hymne de la jeunesse contre l’extrême droite – comme en témoignent les manifestations avant les législatives de l’été dernier -, Déchets a inspiré d’autres artistes, comme Diam’s, en 2004, avec le titre Marin. “Tu t’appelles Le Pen/N’oublie jamais que tu es le problème/D’une jeunesse qui saigne”, a notamment rappé l’artiste.
« L’international est l’affront »
Dans le monde du rap, de nombreux artistes ont très tôt élevé leur voix contre la montée du Front National. Impossible de ne pas évoquer NTM et des titres comme Blanc et noir en 1991 ou jamais plusen 1995, qui vise directement le chef du parti : « National est ce front, international est l’affront. C’est pourquoi je me lève, les sourcils froncés. Quand le borgne sénile s’amuse à marquer 25% dans ma ville. Non, plus jamais ça, arrêtons tout ça. Quelques semaines plus tard, Jean-Marie Le Pen recueille 15 % des voix à l’élection présidentielle, se hissant à la 4e place dès le premier tour.
En 2002, son accession au second tour face à Jacques Chirac suscite de nombreuses réactions. Chants fluviaux et collectifs semblent dénoncer la montée de l’extrême droite, comme le soulignait France Inter vingt ans plus tard : Le combat est lancé Avec Sniper, Arsenik, Abd Al Malik… Citoyen hip-hop initiée par la princesse Aniès ou encore Nous devrions avec la réforme du Ministère AMER.
Côté variétés et pop françaises, une poignée d’artistes ont déclaré, à leur manière, leur opposition à Jean-Marie Le Pen. En 1988, en Chanson dégoûtantele chanteur Renaud décrit un homme « Comme un type qui aurait mangé un vautour, roulé des galoches à un troupeau de hyènes » [et qui] repoussé du goulot d’étranglement comme s’il avait toujours embrassé les idées de Le Pen.
« Une hydre aux discours envoûtants »
Mylène Farmer qui, au cours de sa carrière s’est bien gardée de prendre position explicitement, a néanmoins réagi lorsque, en 1995, la candidate du Front national à la présidentielle a fait appel à l’un de ses sosies lors d’un meeting. « Je suis scandalisé d’apprendre que M. Le Pen a pu utiliser mon image et tromper ainsi les gens. Je trouve ce processus révoltant. C’est scandaleux et surtout je suis triste, profondément malheureuse, que des gens comme moi aient pu penser un instant que je pouvais soutenir une telle politique”, a-t-elle déclaré à France 2.
En 1998, Zazie listait des prénoms de tous horizons dans sa chanson Tout le monde où elle a dit qu’elle était « du même pays que Sigmund, que Sally, qu’Alex et Ali ». Une sorte d’hymne fédérateur dans le refrain dont elle proclamait « Tout le monde est beau », et cela « quitte à blesser Jean-Marie », allusion évidente, jeu de mots inclus sur la douleur, au leader d’alors des Français. extrême droite.
La même année, marquée par les élections régionales, Pierre Perret, inquiet de la montée du Front national, chante La bête est revenue. Le texte ne mentionne pas directement Jean-Marie Le Pen, mais les paroles, évoquant une « hydre aux discours séduisants qui forge une nouvelle race d’oppresseurs » ne laissent aucun doute sur le message que souhaite faire passer le chanteur.
« Honte à notre pays, voici à nouveau l’ennemi »
Lorsqu’en 2002 le leader du Front national accède au second tour de l’élection présidentielle, Damien Saez exprime son désarroi. « J’ai vu la nouvelle ce matin les larmes aux yeux. 20 % pour l’horreur, 20 % pour la peur », commence-t-il dans Fils de France. A la fin de l’article, il appelle à la « résistance » : « Honte à notre pays, voici à nouveau l’ennemi. Venez, marchons ensemble, enfants de la patrie. A l’époque, la qualification de l’extrême droite pour le second tour avait été un choc pour un grand nombre de Français, dont certains descendaient spontanément dans la rue pour appeler à faire barrière au FN.
Our file Jean-Marie Le Pen
Dans les années suivantes, Jean-Marie Le Pen se retire progressivement du paysage politique français, passant le relais à sa fille Marine. Ceci est directement cité dans 20.04.2005 où Philippe Katerine tente de lui échapper alors qu’elle le suit dans la rue. En 2014, Benjamin Biolay déplorait la percée du FN aux élections européennes en 2014. Le vol noir – une référence à Chanson des partisans. “A toi, cher défunt, oh ce soir, si tu avais vu tomber et tomber sur le cul ce vieux pays des Lumières”, chante-t-il dans ce qui reste à ce jour l’une des dernières chansons grand public dénonçant le parti d’extrême droite.