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Depuis les attentats de « Charlie Hebdo », qu’il pleuve, qu’il neige ou qu’il vente, Nadia Vadori-Gauthier danse une minute chaque jour, le plus souvent dans la rue. Un « acte de résistance poétique » pour « créer la vie » face à la violence barbare du terrorisme, explique-t-elle.
« Cela fait dix ans que je danse une minute par jour » : depuis l’attentat contre “Charlie Hebdo”, la chorégraphe et danseuse Nadia Vadori-Gauthier a lancé une campagne « acte de résistance poétique »qui est devenu un travail de longue haleine, ouvert et « témoin de notre époque ».
Cette performance est visible depuis ses débuts sur le site www.uneminutededanseparjour.com et sur les réseaux sociaux où l’on peut découvrir chaque jour une nouvelle vidéo : à ce jour, 3 643 ont été postées.
Des extraits de cette œuvre seront présentés mardi 7 janvier lors d’une soirée d’hommage à la rédaction de l’hebdomadaire décimé, à Chaillot-Théâtre national de la Danse à Paris : solo de son initiatrice, performances chorégraphiques avec une dizaine de danseurs, installations vidéo , lectures de danse, musique, etc.
« Le 7 janvier 2015, après la stupeur du choc, je me suis demandé ce que je pouvais faire pour faire vivre la vie. […] Que pouvais-je faire mais rien ? Ce soir-là, j’ai décidé de danser en pleine ville plutôt que de me cacher.dit Nadia Vadori-Gauthier à l’AFP.
Danser pour créer du lien
La Franco-Canadienne, aujourd’hui âgée d’une cinquantaine d’années, était artiste associée à l’université Paris 8 et venait de réaliser une thèse de recherche-création dans le domaine de la danse portant sur les relations entre l’art et la vie.
Après avoir dansé le lendemain du drame à seize heures place de la Concorde à Paris pendant «faire preuve de solidarité»l’idée lui est venue de « danser pour que la journée en vaille la peine »inspiré par un “citation du philosophe Nietzsche qui dit : “Et on considère comme perdu chaque jour quand on n’a pas dansé au moins une fois””.
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Quelques jours plus tard, devant une petite caméra posée sur un stand, la « minute » était lancée, avec l’inspiration du moment – ici des gestes doux et amples, là des jeux de jambes, sans ou avec musique. Rue, boulangerie, boutique, laverie, fontaine, RER, forêt, Nadia Vadori-Gauthier place son travail, les premières semaines, « dans les interstices du quotidien ».
Politiser la danse
Avec les attentats du 13 novembre 2015, la nouvelle arrive “tisser” à la performance. Sa « minute » ce jour-là sera une danse des mains sur fond noir.
“J’ai commencé à manifester”, « témoigner pour les milieux naturels, pour la planète, pour la défense des sites, pour le droit à la différence »explique-t-elle. Après la crise sanitaire, on le voit dans les services hospitaliers, les Ehpad…
En 2020, dès le premier jour du confinement, elle ouvre son « protocole » (quelques règles qu’elle a établi pour réussir sa minute) à tout le monde. Et reçoit, dès le premier mois, quelque 5 000 vidéos de « des personnes de tous âges, hommes et femmes, des adolescents aux personnes âgées »qu’elle archive et publie sur Internet. Certains continuent encore, s’émerveille-t-elle.
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Se plonger dans ses vidéos, c’est aussi s’offrir une rétrospective des grands moments de l’actualité de ces dernières années : dans l’une, elle danse parmi les “gilets jaunes” entourés de gaz lacrymogènes, dans une autre, devant la foule qui manifeste contre la réforme des retraites. , ou, plus récemment, son corps se balance devant des graffitis à l’effigie de Gisèle Pelicot.
En 2023 et 2024, la chorégraphe invite également ses pairs à se lancer dans le projet : une quarantaine ont répondu présent, comme Ambra Senatore, Kaori Ito, Meg Stuart. Cette expérience fut l’occasion de développer sa méthode de danse, “le corps du sismographe”qu’elle partage via des ateliers.
Le projet se poursuit jusqu’au 14 janvier. Fin de l’histoire ? “Je pense que je vais m’arrêter là.”dit le danseur, qui confie avoir « des raisons de continuer » et d’autres “arrêter”. Le livre retraçant les dix années de cette aventure, qui paraît ce lundi 6 janvier (Editions Les Presses du Réel), devrait l’aider à y mettre un terme, pense-t-elle.
Par Le Nouvel Obs avec AFP