La scission de Vivendi, le géant français des médias et de l’édition, devient effective lundi 16 décembre avec la cotation de trois nouvelles entités à Londres, Amsterdam et Paris, toujours sous le contrôle du milliardaire Vincent Bolloré.
Dès 9h (heure française), le groupe de télévision Canal+ sera coté à la Bourse de Londres, Havas sur Euronext Amsterdam et Groupe Louis Hachette [comprenant le numéro un français de l’édition Hachette Livre, l’acteur de la distribution Relay, des médias tels Europe 1, JDD, Voici, Géo…] à Paris sur le marché Euronext Growth, réglementé mais non réglementé.
Pas « un chemin pavé de roses »
Les premiers sacs seront soigneusement examinés. Mais” c’est le long terme qui compte », estime une Source proche de Vivendi, qui s’attend dans un premier - à une forte volatilité.
Maxime Saada, patron de Canal+, n’attend pas” que le cours de l’action » ça le concerne « suivre un chemin pavé de roses les premières semaines, les premiers mois ». « Nous mesurerons le succès de cette introduction en bourse dans deux à trois ans. », a-t-il établi dans un entretien avec Figaro, du 13 décembre. Pour le reste, la holding reste cotée à la Bourse de Paris et son cours devra s’adapter.
Pour une action Vivendi détenue avant la scission, une action Canal+, une action Havas et une action Groupe Louis Hachette ont été attribuées, l’action Vivendi étant conservée. A terme, Vivendi devrait sortir du CAC 40.
Une première étape a été franchie avec succès lundi 9 décembre : le projet de scission a été approuvé par l’assemblée à une majorité de plus de 97 %. Selon le président du conseil d’administration, Arnaud de Puyfontaine, « un nouveau chapitre de son histoire » ouvre pour Vivendi, « tout en restant fidèle à qui il est ».
Pourquoi cette opération, annoncée il y a un an ? Le cours collectif » cela ne reflétait pas la vraie valeur de ses actifs », a rappelé Yannick Bolloré, fils de Vincent Bolloré et président du conseil de surveillance de Vivendi, qui constituait « un handicap pour nos actionnaires et pour le développement de nos activités ».
Quelle valorisation pour un Vivendi reconfiné ?
Vivendi, qui comptait environ 73 000 salariés fin 2023, était valorisé vendredi 13 décembre à près de 8,55 milliards d’euros. Le pari est donc que la somme des quatre valeurs indépendantes est bien supérieure.
Fin octobre Yannick Bolloré a présenté une évaluation de l’ensemble « environ 16 milliards » d’euros, dont 6,8 milliards pour Canal+, 3,4 milliards pour Havas, 2,1 milliards pour le groupe Louis Hachette et 4,5 milliards pour Vivendi. Mais les analystes s’attendent à moins dans les prochains jours.
L’opération” ne fournit aucune certitude », estimait la société de gestion Phitrust en novembre. Il avait particulièrement peur” une réduction de participation » pour Vivendi, qui continuera à gérer diverses participations minoritaires ainsi que Gameloft, maison d’édition de jeux vidéo détenue à 100%. Devant les actionnaires, les dirigeants de Vivendi ont défendu leurs choix, affirmant qu’il n’y avait pas « autre alternative ».
Les ambitions internationales de Canal+
Alors pour Canal+ à Londres, « la stratégie est clairement d’amener le groupe à l’international » et permettre un « une plus grande visibilité sur les marchés anglophones », a souligné Yannick Bolloré. Les deux tiers des abonnés sont déjà hors de France et ce pourcentage est appelé à augmenter avec l’offre publique d’achat lancée par le géant sud-africain de la télévision MultiChoice.
Canal+ a réalisé « une taille critique, avec 27 millions d’abonnés dans plus de 50 pays et nous ambitionnons d’atteindre 50 à 100 millions dans les prochaines années », souligne Maxime Saada. Un signe d’espoir pour Canal+, côté britannique : la ministre des Finances Rachel Reeves a reçu ce responsable vendredi 13 décembre.
Quant à Havas, le siège d’Amsterdam a été choisi pour la possibilité d’y créer une fondation pour le protéger d’une éventuelle OPA hostile et ainsi rassurer ses équipes. Les bureaux resteront en France, à l’exception de Havas. Les sociétés seront toutes résidentes fiscales en France.
La scission déchaîne certains petits actionnaires qui craignent d’être perdants et voient Vincent Bolloré, à la tête de Vivendi depuis 2014, renforcer son contrôle. Le groupe Bolloré était jusqu’à présent le principal actionnaire de Vivendi avec 29,9%, et atteindra environ 31% dans les nouvelles entités.
Le fonds activiste CIAM (0,025% du capital de Vivendi) poursuit ses recours en justice pour obtenir l’annulation de la scission, qui selon ses dirigeants ” contourne la loi sur les offres publiques d’achat obligatoires ».