Le 4 décembre, la mort subite du PDG d’UnitedHealthcare a choqué les États-Unis. Son assassin présumé vient d’être retrouvé par les autorités. Et son acte est salué par de nombreux Américains.
Positionné dans l’une des entrées de l’hôtel Midtown, au cœur de Manhattan, un individu attend son but. Vêtu d’un costume bleu, Brian Thompson, directeur de UnitedHealthcare, passe calmement devant. Se positionnant derrière lui, le criminel déverrouille l’arme et tire trois coups consécutifs. Touché au mollet et au dos, le PDG fait quelques pas avant de se tourner vers son agresseur. Sur cette dernière image, il s’effondre. A la fin du crime, le tueur s’est enfui vers Central Park à vélo électrique. La police tente de le suivre, mais perd sa trace en cours de route.
Ce criminel avait un mobile précis, on le sait désormais, et a été rapidement identifié. Le suspect est un jeune homme appelé Luigi Mangione. Et son identification constitue un pas en avant important pour la justice, mais elle dit aussi quelque chose sur notre société. Sur les réseaux sociaux, les réactions à l’attaque prennent des proportions surprenantes. Le compte Instagram de Luigi Magione gagne rapidement des milliers de followers. Pendant ce -, le hashtag #FreeLuigi fait le tour des plateformes.
Pour une petite partie de la population, le meurtrier présumé symbolise quelque chose : il est considéré comme une figure anticonformiste qui a lutté contre la dérive du système de santé américain. Il y a ceux qui en profitent aussi pour le complimenter sur son physique, comme si sa beauté excuse son crime : « Il est juste coupable d’être beau. #FreeLuigi», commente un utilisateur X, en guise de synthèse de dizaines de messages.
Ces réactions traduisent avant tout une forme de colère de la population envers le système de santé américain, accusé de s’enrichir aux dépens des patients. Pour cause, l’accès aux soins aux États-Unis est véritablement unique. La plupart des Américains sont couverts par une assurance privée, principalement par le biais de leur emploi et secondairement par le biais du marché de l’assurance individuelle. « Ce système est vulnérable aux chocs du marché du travail, le chômage entraînant la perte de l’assurance maladie.
Certains chômeurs choisissent d’étendre la couverture de leur employeur, mais doivent alors garantir un financement intégral”, indique la Fondation Jean-Jaurès. Par exemple, une naissance aux Etats-Unis peut coûter 15 000 dollars (soit environ 14 000 euros) voire 50 000 aux Etats-Unis. cas de complications.
“Ce n’est pas un héros“
Certains Américains ont sans doute été déçus en apprenant qu’il avait été arrêté ce lundi 9 décembre par des membres de la police à Altoona, une ville située à 500 kilomètres à l’ouest de New York. Il a été reconnu par un employé d’un restaurant McDonald’s qui a immédiatement contacté la police locale. Son arrestation a été filmée par de nombreux médias américains. Dans les images, on le voit sortir d’un véhicule de police menotté avant d’être escorté jusqu’à un tribunal de l’État de Pennsylvanie. L’homme de 26 ans est accusé de meurtre, de détention illégale d’armes et de faux documents.
Pourquoi ce meurtre ? Les enquêteurs ont retrouvé sur lui un document manuscrit de trois pages évoquant son “hostilité envers les entreprises américaines”. Par ailleurs, sur les obus récupérés sur les lieux du crime, étaient inscrits les mots « retard » et « déni » (refus), qui évoquent le rejet des demandes d’indemnisation pour soins par les compagnies d’assurance.
Face à l’ampleur des réactions suscitées par cet assassinat, le gouverneur démocrate de Pennsylvanie, Josh Shapiro, s’est exprimé mardi 10 décembre : “Nous ne tuons pas les gens de sang-froid pour des raisons politiques ou pour exprimer un point de vue”. Malgré sa compassion pour les personnes frustrées par le système de santé américain, il affirme n’avoir « aucune tolérance » pour un homme qui recourt à la « violence ». « Ce tueur est salué comme un héros, mais écoutez-moi, ce n’est pas un héros », conclut-il.