En matière de contestation de la saisie mobile, le juge d’exécution est mort, vive le tribunal judiciaire ! – Procédure civile

Un an ! Un an était le délai imparti au législateur pour apporter une modification au paragraphe 1ET de l’article L. 213-6 du Code de l’organisation judiciaire suite à son abrogation partielle par les sages du Conseil constitutionnel par décision de la QPC du 17 novembre 2023. Aux termes de l’article 62 de la Constitution, l’abrogation de la disposition déclarée inconstitutionnelle prend effet à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, à moins que celui-ci ne décide d’en reporter promptement les effets. Dans le cas présent, les anciens de la rue Montpensier ont estimé qu’une abrogation immédiate aurait des conséquences manifestement excessives et ont en fait décidé de la reporter jusqu’à l’entrée en vigueur d’une nouvelle loi ou plus tard 1.ET décembre 2024 (Cons. const. 17 nov. 2023, n° 2023-1068 QPC, Dalloz actualité, 21 nov. 2023, oss. F. Kieffer ; D. 2023. 2050 ; ibid. 2024. 1301, oss. A. Leborgne e J.-D. Pellier ; RST civ. 2024. 727, oss. N.Cayrol ; Actes 2024. Comm. 7, obs. R. Laher ; JCP N 2023. Loi. 1189 ; JCP 2023. Loi. 1326 ; Gaz. Ami. 2024, n° 10, p. 5, note C. Brenner).

Parvenu à l’expiration de ce délai, on ne peut que constater qu’aucune loi n’est entrée en vigueur pour modifier l’article L. 213-6 du Code de l’organisation judiciaire. Il ne s’agit certainement pas d’un manque de volonté du gouvernement – le 24 avril 2024 a été déposé au Sénat un projet de loi de simplification de la vie économique contenant un article 28 qui tirait les conséquences de l’abrogation – mais de la dissolution de la Présidente. L’Assemblée nationale de Macron a interrompu les travaux parlementaires le 9 juin 2024.

Il n’a donc pas été possible de respecter le délai. L’effet papillon continue de produire ses effets (F. Kieffer, Tsunami sur la vente forcée des droits immatériels ou effet papillon, Actualité Dalloz, 21 novembre 2023). Que faire alors à partir du 1ET Décembre 2024 ? La réponse vient d’une circulaire datée du 28 novembre 2024 de la Direction des Services Judiciaires : le juge de l’exécution est mort, vive le tribunal judiciaire !

Une précision importante. Tous les pouvoirs du juge de l’exécution ne sont pas remis en cause. En réalité seulement le paragraphe 1ET de l’article L. 213-6 du Code de l’organisation judiciaire – qui ne concerne pas la compétence du juge de l’exécution en matière de saisie immobilière prévue à l’alinéa 3 du même texte – et uniquement sur « les litiges nés à l’occasion de l’exécution forcée. Que faut-il en déduire ? D’une part, le juge de l’exécution reste compétent pour résoudre toutes les difficultés liées à la mesure exécutoire ; il perd cependant sa compétence en matière de saisies mobilières, sauf exception a priori de la saisie sur salaire prévue au 4° de l’article L. 213-6 du code de l’organisation judiciaire. Les conséquences de la déclaration d’inconstitutionnalité vont bien au-delà de la simple confiscation des droits immatériels à l’origine de la saisine du Conseil constitutionnel. Il faut donc regarder plus attentivement ce que dit la circulaire, mais surtout ce qu’elle ne dit pas.

Ce que dit la circulaire

Le juge d’exécution perd sa compétence en matière de saisies mobilières. Il n’existe donc plus de compétence exclusive en la matière. En application de l’article L. 211-3 du Code de l’organisation judiciaire, « Le tribunal judiciaire connaît de toutes les affaires civiles et commerciales pour lesquelles la compétence n’est pas attribuée, en raison de la nature de la demande, à une autre juridiction ». Selon le matériella compétence appartient au tribunal judiciaire. La circulaire précise également qu’au regard de l’article R. 212-8 du Code de l’organisation judiciaire, le tribunal judiciaire connaîtra en juge unique les actions immobilières jusqu’à la valeur de 10 000 euros. Cette première affirmation conduit à deux observations. Premièrement, le contentieux de l’exécution ne sera plus concentré entre les mains d’un seul juge – comme c’était l’objectif de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 qui réforme les procédures civiles d’exécution – et, d’autre part, le principe n’est plus obligatoire un juge unique au-delà de 10 000 €,…

 
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