Pour lui répondre, un casting imparable de talents comiques : Laure Calamy en rappeuse trash face à un Jean-Pascal Zadi déboussolé, Camille Cottin qui écoute sa meilleure amie tout en discutant avec elle-même, Melha Bedia et Lison Daniel qui suivent un atelier pour combattre leur addiction à la râlerie… Drôle, rafraîchissante et intelligente.
ELLE. – Dans « Chamouxland », l’humour est féminin mais aussi féministe…
Camille Chamoux. L’égalité au travail est l’un des sujets qui me hante. Bien que privilégiée, j’ai vécu beaucoup d’injustices professionnelles, à la radio, à la télé, sur scène… Et l’humour est la meilleure arme de dénonciation sociale. Une fois que les gens rient, leur cerveau est disponible, prêt à nous écouter.
ELLE. – Et être féministe n’empêche pas de critiquer des comportements a priori typiquement féminins !
CC – J’essaie de créer de nouveaux modèles, c’est-à-dire des femmes comme nous, comme je vois, comme je connais. Mais cette représentation n’est pas forcément positive. Au contraire, c’est vraiment cool d’avoir des personnages névrosés, comme dans le sketch avec Audrey Fleurot qui se croit super indépendante alors qu’elle est incapable de demander une augmentation. Évidemment, on n’est pas encore parfaites… parce qu’on nous a vraiment, vraiment empêchées de l’être.
Un homme attiré par une femme drôle est souvent intelligent.
ELLE. – Pendant longtemps, l’humour féminin semblait dangereux…
CC – J’ai fait beaucoup de recherches et, dans l’histoire de France, on trouve plus de destins tragiques, de supplices et de guillotines que de femmes spirituelles. Elles ont pourtant existé, dans les salons des XVIIe et XVIIIe siècles. Madame de Sévigné et Madame de Maintenon étaient hilarantes, mais personne n’en parle… On dirait que les femmes comiques sont nées en 1985 !
ELLE. – Aujourd’hui, l’humour est-il un atout pour la séduction ?
CC Pour moi, c’était plutôt un atout social, avec le rire comme arme fatale. Mais le rire ne me semble pas être un véritable atout pour draguer. En revanche, un mec attiré par une femme drôle est souvent intelligent, et drôle lui-même. En fait, l’humour est un filtre pour les connards !
ELLE. – « La vulve est le pilier de l’humour féminin » : votre objectif était-il de contredire ce que dit le personnage d’Élise Lucide dans le film ?
CC Absolument. Le monde de l’humour fait partie des milieux misogynes, notamment autour de cette obsession de producteurs, majoritairement sexagénaires, convaincus que les meufs ne devraient parler que de trucs de filles. Pourtant, l’intérêt de notre sujet ne réside pas dans les sujets que nous traitons mais dans notre point de vue.
Si le regard est féminin, les personnages seront plus riches, leurs défauts comme leurs qualités seront plus justes. On pourra tous parler de politique, de société, de couple et d’intimité, et pas seulement de soi. C’est ça la diversité, et c’est ce que promeut une nouvelle génération d’humoristes masculins, de Tristan Lopin à Hakim Jemili.
« Chamouxland » (62 min), dès le 3 juillet, Canal+.
