Daniel Rampulla, le photographe qui capture et réécrit ses souvenirs

Daniel Rampulla, le photographe qui capture et réécrit ses souvenirs
Daniel Rampulla, le photographe qui capture et réécrit ses souvenirs

L’œuvre de Daniel Rampulla a toujours été influencée par les lieux qu’il a fréquentés et les gens qu’il connaît. En bref, il photographie ce qui lui est familier, immortalise ce qui est devant lui comme pour mieux s’y plonger et, par extension, se souvenir du passé. Qu’il s’agisse de lieux de vie ou de passage, l’Américain est en quête constante des traces que laisse derrière lui l’existence. De sa ville natale de San Francisco à celle qui l’a adopté, New York, cet artiste n’a cessé de tenir son appareil photo en main. Avec des outils plus traditionnels ou instantanés, Polaroid et Fuji, Daniel Rampulla a multiplié les productions.

Alternant entre publications pour magazines et fanzines comme celle de JW Anderson en 2019, galeries d’expositions ainsi que livres — Endroit sauvage (2016-2021) et Augure (2022) —, et même pour des affiches de théâtre. Célébrer toutes ces facettes, c’est ce qu’a fait la maison Yves Saint Laurent, sous la houlette de son directeur artistique Anthony Vaccarello, durant ce mois de juin et jusqu’à ce premier jour de juillet, le temps d’une rétrospective dans deux de ses boutiques ainsi qu’à travers les pages d’un fanzine — disponible chez Saint Laurent Babylone et Saint Laurent Rive Droite.

Point de départ

Daniel Rampulla est un pur enfant de San Francisco. Originaire de sa Californie natale, il a embrassé sa passion pour la photographie dès son plus jeune âge. Au lycée, il rencontre un professeur qui lui permet de faire ce qu’il aime faire, en lui donnant les clés d’une chambre noire, une pièce utilisée pour le développement de films. A ses côtés, l’adolescent apprend à s’intéresser davantage aux sujets qu’il capture ainsi qu’aux formes et aux lumières ; seconds aspects qui deviendront plus tard «personnages» central dans son œuvre. Mais la véritable révélation arrive en 2010, lorsqu’il rejoint le San Francisco Art Institute : «Je chéris les années que j’y ai passées. J’ai eu la chance d’y rester dix ans avant sa fermeture. Choisir d’y aller était un aveu que j’étais un artiste et un engagement à poursuivre cette pratique. J’ai suivi des cours avec des artistes extraordinaires comme Linda Connor, Henry Wessel, Keith Boadwee et George Kuchar.» En passe de ressusciter après une faillite annoncée en 2023, cet établissement aura marqué de son empreinte les méthodes de l’adolescent.

De son passage sur la côte Ouest, lorsqu’il reviendra là où tout a commencé, sept ou huit ans après son départ, Daniel Rampulla réalisera une série de photos. En se retrouvant dans ces espaces qu’il connaît si bien, notamment les forêts et les plages de sa jeunesse, l’inspiration revient aussi : «Je me promenais dans ces zones et me mettais dans l’état d’esprit dans lequel j’étais enfant. Il s’agissait principalement d’anxiété concernant l’homosexualité et le fait d’être gay. Je photographierais le paysage avec ce sentiment en tête. Je les considère comme des portraits car ils sont en quelque sorte le reflet de ma mémoire émotionnelle. Ils sont très occupés à cet égard, mais l’expérience a été réparatrice et je me suis senti reconnecté à ma ville natale.« Le cœur léger, l’esprit apaisé et le goût du devoir accompli avec ses photos, l’artiste peut désormais se concentrer sur la côte Est. Il s’envole pour la Grosse Pomme pour compléter sa formation à l’Université Steinhardt de New York en 2012. Selon lui, cette deuxième étape n’a pas influencé sa photographie.

cote est

Lorsqu’il s’installe à New York, Daniel Rampulla doit changer sa façon de composer. N’ayant plus accès à cette fameuse chambre noire, il donne un nouveau souffle à son travail, changeant son matériel au profit des films instantanés, qu’il abandonnera définitivement en 2015.C’est toujours ma façon préférée de prendre des photos, il explique. Après la prise de vue, je peux les montrer directement au modèle, puis recommencer et les revoir avec lui. C’est la forme de photographie la plus collaborative. C’est ainsi que je me suis senti à l’aise pour capturer les nouvelles personnes que j’ai rencontrées.« En plus de certaines de ses impressions apparaissant dans des magazines, l’artiste rassemble ses photos et cette façon de faire dans la série Polaroïds (2012-2016). Avec ce qui suit, Plage de Riis (2017-2019), Daniel Rampulla reprend le thème du corps en focalisant son regard sur la communauté LGBT. Un choix qui n’est pas anodin pour lui.

«Au début et pendant longtemps chez ces gens, il s’agissait moins d’un désir de documenter que d’un désir de connecter.. Peut-être même un besoin de créer une communauté, continue l’Américain. Quand j’étais jeune, je ne voyais pas beaucoup de représentations de l’homosexualité auxquelles je m’identifiais, alors j’ai créé les miennes. Je n’avais pas la compréhension de moi-même qui me permettait de considérer mon travail comme une documentation, car je le vivais en même temps que je le photographiais. Il y avait très peu de distance entre mes photographies et ma vie.« Même si cet exercice est très personnel pour lui, ses photos correspondent à son style ainsi qu’à sa vie et il n’avait pas confiance en ses capacités pour pouvoir shooter pour des marques, en 2019, il se lance chez JW Anderson. Avec les Britanniques, il atteindra la finale de la compétition Votre photo notre avenir, participeront à leur exposition à Londres et seront invités à collaborer à l’une de leurs campagnes. Grâce à cela, sa perception de son travail va changer. Daniel Rampulla comprend alors qu’il peut être lui-même, quel que soit le support.

Livres et galeries

Justement, ces derniers vont se multiplier. D’abord, grâce à ses relations avec les acteurs de l’art, ses photos s’invitent dans les galeries. Véritable consécration après des années de travail, il signe avec la Kapp Kapp Gallery de Philadelphie et la Chart Gallery de New York ses premières expositions personnelles, respectivement intitulées Effondrement et Endroit sauvage. “J’ai beaucoup appris sur le processus d’édition et d’impression en travaillant avec les galeries. Ce sont des compétences que je n’avais pas encore développées. Le montage pour une exposition a fait de moi un meilleur photographe. Cela m’a aidé à voir ce que je photographiais et à comprendre ce que je voulais dire. Cela m’a également permis de terminer la série sur laquelle je travaillais depuis une demi-décennie, Wild Place (2016-2021), et de passer à Augury (2022).», avoue Daniel Rampulla. Avec ces derniers noms qu’il murmure, l’artiste évoque subtilement son passage au format livre. Ses clichés glacés dans deux livres distincts cochent l’une des autres cases que le photographe avait toujours espérées.La photographie a du sens dans un livre car elle ne ressemble pas à une copie de l’original, comme c’est le cas par exemple avec la peinture. Tout comme un album photo, les livres photo sont la capsule temporelle ultime, une façon de partager les souvenirs que j’ai collectés.», sourit Daniel.

Evidemment, toutes ces manifestations de son talent ont fait flasher Anthony Vaccarello. Séduite, la directrice artistique de la maison Saint Laurent la contacte en octobre 2023. Durant les mois qui suivent, les échanges sont nombreux avec la marque. Mais finalement, ils se sont mis d’accord sur une sélection de 40 images pour mettre en valeur le travail de l’artiste. Exposé tout au long du mois de juin 2024 dans les boutiques Saint Laurent Babylone (Paris) et Saint Laurent Rive Droite (Los Angeles), les Français ont également invité l’Américain à contribuer à leur fanzine, édition 14. »J’ai été ravie de voir mon travail séquencé et contextualisé par Anthony et Saint Laurent. La marque représente une longue histoire de créativité et de classe. Ces images en noir et blanc deYves Saint Laurent posant nu dans les années 70 ont été très formatrices pour ma compréhension du portrait et de la lumière. J’y pense souvent et il m’a donc semblé particulièrement approprié et, je l’avoue, surréaliste de collaborer avec eux sur une exposition de mes photographies.», conclut Daniel Rampulla. Mieux comprise, son œuvre s’invite dans de plus en plus d’espaces et diffuse ainsi tous les sentiments de son auteur. Un juste retour pour ce photographe qui conçoit son travail exactement ainsi.

 
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