Des dizaines de milliers de Libanais chassés par la guerre entre le Hezbollah et Israël ont repris le chemin du retour mercredi, pour retrouver leurs villes et villages dévastés après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu.
La trêve met fin au conflit débuté il y a plus de 13 mois entre l’armée israélienne et le mouvement islamiste libanais, qui s’est transformé en guerre ouverte en septembre et a fait des milliers de morts. Environ 900 000 personnes ont été déplacées au Liban et 60 000 dans le nord d’Israël.
Avant l’aube, les habitants déplacés du sud du Liban, de la banlieue sud de Beyrouth et de la Bekaa à l’est du pays, fiefs du Hezbollah, sont partis par milliers sur le chemin du retour, dans des voitures et des minibus surchargés, matelas et valises entassés sur le chemin du retour. toits.
Dans les ruines des banlieues sud, des partisans du Hezbollah brandissaient son drapeau jaune ou des portraits de leur chef, Hassan Nasrallah, tué fin septembre par Israël.
“Cette banlieue héroïque” a “conquis, nous en sommes fiers”, a déclaré à l’AFP Nizam Hamadé, un ingénieur.
Le mouvement chiite, décapité par les frappes israéliennes, a néanmoins proclamé sa « victoire », ajoutant que ses combattants « resteront pleinement prêts à affronter […] aux attaques de l’ennemi israélien.
De retour à Nabatiyé, au sud du Liban, Ali Mazraani s’est dit « choqué par la destruction massive » de cette ville qui lui semble désormais étrangère.
« Malgré l’ampleur des destructions et notre douleur, nous sommes heureux d’être rentrés », a déclaré Oum Mohamed Bzeih, une veuve de 44 ans qui a retrouvé sa maison dévastée dans le village de Zebqine. « On se sent renaître. »
Le Hezbollah, allié de l’Iran, a ouvert un front « de soutien » au Hamas contre Israël au début de la guerre dans la bande de Gaza, déclenchée le 7 octobre 2023 par l’attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien.
Après des mois d’échanges de tirs des deux côtés de la frontière israélo-libanaise, Israël a lancé le 23 septembre une campagne de bombardements massifs sur les bastions du mouvement, suivie d’opérations terrestres dans le sud du Liban. , affirmant vouloir sécuriser sa frontière nord et permettre le retour des personnes déplacées.
Retrait progressif
Aux termes de l’accord parrainé par les États-Unis et la France, l’armée israélienne dispose de 60 jours pour se retirer progressivement du Liban. Le Hezbollah doit également se retirer au nord du fleuve Litani, à une trentaine de kilomètres de la frontière, et démanteler ses infrastructures militaires au sud du Liban.
L’armée libanaise a annoncé mercredi qu’elle entamait, “en coordination” avec la force de paix de l’ONU, la FINUL, le renforcement de sa présence dans le sud.
L’armée israélienne a de son côté appelé les habitants à ne pas s’approcher de ses positions au sud du Liban.
« Nous contrôlons des positions au sud du Liban, nos avions continuent de voler dans le ciel libanais. […] Aujourd’hui, nous avons arrêté des suspects et tué des terroristes”, a déclaré le porte-parole de l’armée, le contre-amiral Daniel Hagari. Il a ajouté que l’armée avait frappé « 180 cibles » dans la nuit précédant le cessez-le-feu.
Selon les autorités libanaises, au moins 3 823 personnes ont été tuées dans le pays depuis octobre 2023, la plupart depuis fin septembre. Côté israélien, 82 soldats et 47 civils sont morts en 13 mois, selon les autorités.
Selon le président américain Joe Biden, l’accord doit empêcher « ce qui reste du Hezbollah » et d’autres groupes de « menacer une fois de plus la sécurité d’Israël ».
Washington et Paris s’appuient sur la résolution 1701 du Conseil de sécurité de l’ONU, qui a mis fin à la précédente guerre entre Israël et le Hezbollah en 2006 et qui stipule que seules l’armée libanaise et la FINUL peuvent être déployées dans les régions frontalières du sud du Liban.
Israël se réserve « une liberté totale d’action militaire » au Liban, « si le Hezbollah viole l’accord et tente de se réarmer », a prévenu son Premier ministre, Benjamin Netanyahu.
Le mouvement chiite va coopérer avec l’Etat libanais pour renforcer le déploiement de l’armée dans le sud, a assuré mercredi à l’AFP l’un de ses adjoints, Hassan Fadlallah. Mais ses membres « sont les enfants des villages » du sud, d’où « personne » ne peut les chasser, a-t-il ajouté.
« Pas complètement rassuré »
Après plus d’un an à se précipiter vers les abris dès que les sirènes ont retenti, les habitants du nord d’Israël ont profité du calme retrouvé mercredi, mais sont restés sur leurs gardes.
A Nahariya, ville côtière à portée de roquettes du territoire libanais, Baha Arafat, un homme de 44 ans, s’est dit soulagé. « Je me sens beaucoup mieux maintenant que je sais qu’il y a un cessez-le-feu », confie-t-il. Il n’y a aucun abri dans la région et les derniers jours ont été tendus. »
“Il y a un sentiment de plus grande sécurité, nos enfants peuvent retourner à l’école”, a déclaré Yuri, 43 ans, déplacé de son kibboutz Yiron, près de la frontière, à Haïfa. Mais « nous ne nous sentons pas complètement rassurés », car « le Hezbollah a encore de la force », a-t-il ajouté.
Selon M. Netanyahu, la trêve permettra à Israël de « se concentrer sur la menace iranienne » et d’« intensifier » sa pression sur le Hamas.
Les éditorialistes israéliens se sont montrés sceptiques, craignant une reconstitution des forces du Hezbollah ou soulignant l’absence de progrès vers une trêve à Gaza.
Israël entend “faire tous les efforts nécessaires pour créer les conditions d’un nouvel échange d’otages”, a assuré le ministre israélien de la Défense, Israel Katz.
A deux mois de la fin de son mandat, Joe Biden renouvellera ses efforts pour parvenir à un cessez-le-feu à Gaza, en impliquant « la Turquie, le Qatar, l’Egypte et d’autres acteurs de la région », selon son conseiller à la sécurité nationale, Jake Sullivan.
Un responsable du Hamas a déclaré mercredi à l’AFP que son mouvement était “prêt à un accord de cessez-le-feu” à Gaza.