(Dnipro) Le président russe Vladimir Poutine a déclaré jeudi que le conflit en Ukraine avait désormais tous les atouts d’une guerre « mondiale » et a prévenu qu’il n’excluait pas de frapper les pays occidentaux.
Publié à 6h32
Mis à jour à 14h04
Stanislav DOSHCHITSYN avec Barbara WOJAZER et Ania TSOUKANOVA à Varsovie
Agence France-Presse
Ces menaces du maître du Kremlin interviennent au terme d’une journée de tensions extrêmes où la Russie a utilisé sur le territoire ukrainien un missile balistique de portée intermédiaire (jusqu’à 5 500 km), conçu pour emporter une tête nucléaire.
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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a déclaré que la fusillade était l’acte d’un « voisin fou » qui utilise l’Ukraine comme « terrain d’essai » militaire. Plus tard, il a appelé le monde à « réagir », et a vu dans ce cliché « la preuve que la Russie ne veut absolument pas la paix ».
Les Etats-Unis ont renvoyé le président russe à ses propres accusations : « C’est la Russie qui provoque l’escalade » en Ukraine, a déclaré le porte-parole de la Maison Blanche. Washington a également déclaré qu’il n’avait « aucune raison » de modifier sa doctrine nucléaire sur la base du « discours irresponsable » de Moscou. Le Pentagone a de son côté confirmé avoir été informé par Moscou peu avant le lancement du missile via des « canaux de réduction du risque nucléaire ».
L’Ukraine avait accusé dans la journée la Russie de l’avoir frappé à Dnipro (centre) à l’aide d’un missile ayant “toutes” les caractéristiques d’un missile intercontinental dépourvu de sa tête nucléaire, une première dans l’histoire constituant une escalade sans précédent de la guerre et des tensions russo-occidentales. .
M. Poutine a donc confirmé, dans un bref discours diffusé à la télévision, qu’en réponse aux frappes de missiles occidentaux sur son territoire, la Russie avait tiré jeudi sur l’Ukraine avec un nouveau type de missile balistique hypersonique baptisé « Orechnik ». , qui était dans sa « configuration nucléarisée ».
Ce tir visait « un site du complexe militaro-industriel ukrainien », a-t-il précisé.
La ville de Dnipro abrite le groupe Pivdenmach, anciennement YuzhMash, qui était à l’époque soviétique l’un des centres de l’industrie des missiles militaires.
“Nous considérons que nous avons le droit d’utiliser nos armes contre les installations militaires des pays qui autorisent l’utilisation de leurs armes contre nos installations”, a prévenu M. Poutine.
La Russie « prête à tout »
Dans son discours à la nation d’une durée de moins de dix minutes, Vladimir Poutine a dénoncé les deux frappes menées ces derniers jours par l’Ukraine sur le territoire russe à l’aide de missiles américains ATACMS et britanniques Storm Shadow, des armes d’une portée d’environ 300 km.
Le président américain Joe Biden, qui s’y était longtemps refusé, a autorisé dimanche ces frappes sur le territoire russe avec des armes américaines, malgré les avertissements de la Russie qui avait brandi la menace nucléaire.
Avec l’autorisation de ces frappes par Washington, « le conflit provoqué par l’Occident en Ukraine a pris les éléments d’un [conflit] de nature mondiale», a déclaré le président russe.
“Nous considérons que nous avons le droit d’utiliser nos armes contre les installations militaires des pays qui autorisent l’utilisation de leurs armes contre nos installations”, a-t-il ajouté.
Outre les missiles américains ATACMS, les Ukrainiens disposent donc de missiles de croisière franco-britanniques Storm Shadow/Scalp fournis par ces deux pays. L’Allemagne, sollicitée depuis longtemps pour fournir ses propres missiles de croisière Taurus, a catégoriquement refusé.
Au milieu de l’escalade du conflit, M. Poutine a assuré que la Russie était « prête à tous les scénarios », tant contre l’Ukraine que contre l’Occident.
L’utilisation d’un tel missile pour frapper l’Ukraine constitue un « nouveau développement inquiétant », a commenté le porte-parole du secrétaire général de l’ONU.
« Extrêmement sérieux »
Avant même la confirmation de ce tir par Vladimir Poutine, le ministère français des Affaires étrangères avait dénoncé un événement « extrêmement grave ».
L’Union européenne et Londres avaient souligné que cela constituerait « une escalade » de la part de Moscou.
Le président russe tente de “réécrire les principes des relations internationales en revenant à la loi du plus fort et à l’anéantissement de l’architecture de sécurité qui assure la paix depuis des générations”, ont souligné les chefs de la diplomatie française et britannique dans une tribune commune publiée jeudi. soirée par Le Figaro.
Selon lui, les Etats-Unis avaient “ces derniers jours informé l’Ukraine et ses partenaires et alliés proches” de l’éventuelle utilisation de ce missile par les Russes, afin de les aider à “s’y préparer”.
Moscou doit notamment “reconsidérer” sa position sur l’implication “escalade” des soldats nord-coréens dans le conflit, a de son côté souligné le ministre français des Armées Sébastien Lecornu.
C’est le déploiement de milliers de soldats nord-coréens pour affronter l’armée ukrainienne dans la région frontalière russe de Koursk qui a été avancé par les États-Unis pour faire évoluer leur position sur la question des frappes de missiles. Occidentaux sur le territoire russe.
L’étendue des dégâts après le tir du missile balistique russe sur Dnipro n’était pas immédiatement claire. Deux personnes ont été blessées dans la zone par des frappes russes jeudi, selon le gouverneur régional Serguii Lyssak.
Alertes nucléaires
L’attaque intervient au moment où les tensions sont à leur plus haut entre Moscou et l’Occident, à l’approche du retour de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier, anticipé comme un tournant.
La Russie, qui a envahi l’Ukraine il y a près de trois ans, a multiplié ces derniers jours ses frappes à grande échelle ainsi que ses avertissements contre les alliés de Kiev.
Moscou a notamment renforcé ses alertes nucléaires.
Selon sa nouvelle doctrine sur l’usage des armes nucléaires, rendue officielle mardi, la Russie peut désormais les utiliser en cas d’attaque « massive » d’un pays non nucléaire mais soutenu par une puissance nucléaire, une référence claire à l’Ukraine et aux États-Unis.
Ailleurs en Ukraine, 26 personnes ont été blessées lors de frappes à Kryvyï Rig, une ville située à environ 100 kilomètres au sud-ouest de Dnipro, selon le gouverneur Serguiï Lyssak.
Dans le même temps, l’armée russe continue de progresser dans l’est de l’Ukraine. Le ministère russe de la Défense a revendiqué jeudi la prise d’une petite ville proche de la ville de Kourakhové, dans l’est du pays.
Les avancées russes sont particulièrement inquiétantes pour Kiev, qui craint d’être poussée à la table des négociations dans une position défavorable.