l’explosion anti-juive. Par Céline Pina

l’explosion anti-juive. Par Céline Pina
l’explosion anti-juive. Par Céline Pina
Sciences-Po Paris occupé en soutien à la Palestine, 26 avril 2024. © HOUPLINE RENARD/SIPA

L’antisémitisme se propage dans les universités tandis que l’administration ferme les yeux…

Sciences Po, Sorbonne, Nanterre, Lyon-2, Toulouse, Strasbourg… Les universités françaises sont devenues des lieux hostiles, voire carrément dangereux, pour les étudiants juifs. L’antisémitisme atmosphérique s’est transformé en soutien au Hamas et les références au nazisme sont devenues monnaie courante, dans l’indifférence complice de l’administration.


« Le 7 octobre a littéralement galvanisé les élans de haine antisémites à Sciences Po. Elle a explosé quelques jours après le 7 octobre, lorsqu’un hommage à Omri Ram, un étudiant assassiné par des terroristes islamistes, a été vandalisé par des étudiants pro-palestiniens. Toutes les affiches à sa mémoire accrochées sur la péniche (hall d’entrée de Sciences Po) ont été arrachées ou recouvertes de tracts pro-palestiniens. C’était très choquant mais l’administration n’a pas réagi ». Cet étudiant, comme tous ceux qui nous parlent, préfère rester anonyme. Les témoignages sur Sciences Po publiés par l’Union des étudiants juifs de France (UEJF) sont frappants par leur violence : un étudiant a été informé que « Tous les Israéliens qui sont morts méritaient de mourir ». Rappelons que les habitants du kibboutz massacré étaient des civils. En boucle avec des militants pro-palestiniens à l’école, un élève a naïvement posté : « Je suis presque sûr qu’aucun d’entre nous n’a justifié de violents pogroms contre le peuple juif. » Réponse cinglante : “Vous ne nous connaissez pas bien.”

Autre témoignage d’un étudiant juif, interrogé par un militant pro-palestinien : “Vos chaussures vintage sont mignonnes, elles vous rappellent l’époque où ces chaussures vous ont été enlevées.” Evidemment, certains étudiants de Sciences-Po, LFI et militants pro-palestiniens (ou plutôt pro-palestiniens-de-la-mer-au-jourdain), ne pèchent pas par ignorance… Ils savent très bien ce qui s’est produit en l’histoire de la haine des Juifs et ils en acceptent parfaitement les conséquences – par exemple, ceux qui écrivent sur les réseaux que Hitler aurait dû terminer le travail. Sciences Po Paris est loin d’avoir le monopole en la matière. Dans le monde universitaire, la journée du 7 octobre a révélé un antisémitisme à peine latent sur lequel les étudiants juifs tirent la sonnette d’alarme depuis plusieurs années, sans jamais être entendus.

Mots clés « Mort à Israël, mort aux Juifs » fleurir sur les murs…

À l’Université de Strasbourg, les tags antisionistes apposés sur les piliers en béton des immeubles doivent être effacés chaque jour. L’antisémitisme atmosphérique se traduit aussi par des agressions physiques, un climat délétère, l’impossibilité d’aborder le conflit Gaza/Israël autrement que par l’invective et l’accusation. Des étudiants juifs accusés de génocide. Quiconque se souvient du pogrom du 7 octobre peut devenir une cible. Sur le campus de Strasbourg, des membres du Collectif du 7 octobre ont été frappés parce qu’ils posaient des affiches pour la libération des otages. Leurs agresseurs avaient adopté tous les codes des terroristes : attaque en meute, visage masqué. On a observé les mêmes codes devant Sciences Po où, pour certains, se déguiser en terroriste palestinien est le comble du snobisme et le summum de la mode.

A Nanterre, on ne prend plus la peine d’habiller l’antisémitisme d’un voile antisioniste. Mots clés « Mort à Israël, mort aux Juifs » fleurissent sur les murs, et les croix gammées deviennent récurrentes sur les tables des professeurs. « Le signe n’est même plus un marqueur d’extrême droite, certains l’utilisent pour désigner Israël »» dit un étudiant qui ne souhaite pas être identifié.

A l’université Lyon-2, il a fallu la mobilisation de la préfecture et des élus de droite pour annuler une rencontre organisée par Solidarité étudiante et le Collectif 69 Palestine, intitulée « Colonisation et apartheid israélien, quel avenir pour les Palestiniens ? », dont l’invitée vedette devait être Maryam Abou Daqqa, représentante du FPLP, reconnu comme organisation terroriste par l’Union européenne, les États-Unis… Cela a bouleversé beaucoup de monde, mais pas la direction de l’université. En fin de compte, les craintes pour la sécurité des étudiants juifs ont motivé la décision d’interdiction.

Poursuivons ce triste tour de France : à l’université de Toulouse, un étudiant a été suspendu pour avoir diffusé des propos antisémites sur Instagram. Son dossier a cependant dû passer en commission à deux reprises. En décembre 2023, en La dépêcheLéo Bilfeld, président de l’UEJF Toulouse, a déclaré que les lycéens toulousains de confession juive évitaient systématiquement l’université Jean-Jaurès, tant l’antisémitisme y était décomplexé grâce notamment à l’action du collectif Palestine Vainra.

A la Sorbonne – qui pour une fois n’est pas à la pointe d’un mouvement étudiant – les tensions sont très vives. Les étudiants ont expliqué à leurs camarades juifs que le 7 octobre était mérité. Le pire, c’est que si tous les témoins réclament l’anonymat, ce n’est pas seulement parce qu’ils craignent la violence ou le rejet de leurs camarades. Ils craignent aussi des représailles de la part de l’administration censée les protéger ! Et il est difficile de leur en vouloir tant l’attitude du personnel administratif et enseignant des universités et des grandes écoles est ambiguë.

91% des étudiants juifs déclarent avoir été victimes d’un acte antisémite

Le 10 avril 2024, Guillaume Gellé, président de France Universités et Isabelle de Mecquenem, professeur de philosophie et membre du Conseil des Sages de la laïcité, ont été auditionnés par la mission sénatoriale sur l’antisémitisme dans l’enseignement supérieur. Leurs propos oscillaient entre le déni, l’arrogance et le refus d’admettre la moindre responsabilité de l’institution et la médiocrité des réponses apportées par l’institution. Quand on regarde les auditions des présidents de Harvard et de Columbia devant le Congrès à Washington, on se dit qu’en matière de banalisation de l’antisémitisme dans les universités, la France n’a rien à envier à l’Amérique.

On n’est plus surpris, la violence de l’antisémitisme arabo-musulman et son caractère totalement décomplexé font l’objet d’une omerta prudente. Dans sa présentation introductive, Isabelle de Mecquenem, qui revient sur l’histoire de l’antisémitisme, semble complètement occulter cette dimension. On sait pourtant parfaitement, depuis les années 2000, que les sentiments anti-juifs sont plus répandus chez nos compatriotes musulmans que dans la population en général. Quant aux actes antisémites, notamment à l’université, ils sont plus souvent commis par des étudiants d’origine arabo-musulmane et/ou d’extrême gauche que par des « fascistes ». Lors des déplacements de Rima Hassan et de Jean-Luc Mélenchon, qui multiplient les meetings politiques dans les universités, plusieurs étudiants juifs disent se sentir encore plus en danger que d’habitude. Les dirigeants universitaires ne font pas le lien. Imaginons qu’après le 7 octobre, une association d’extrême droite appelle à la haine des musulmans. Des présidents d’université auraient-ils hésité à réclamer sa dissolution et à lui interdire les réunions ?

Nos éminences universitaires semblent ignorer que, selon des sondages, 91 % des étudiants juifs déclarent avoir été victimes d’un acte antisémite, 67 % des actes dénoncés ayant eu lieu à l’université. Résultat : 36% cachent le fait qu’ils sont juifs. Il suffit de les écouter pour comprendre pourquoi l’UEJF comme le MEJF (Mouvement étudiant juif français) peinent à faire entendre la voix des étudiants juifs. A HEC, d’anciens étudiants n’ont pas sanctionné un professeur qui avait qualifié le 7 octobre de « soulèvement des colonisés » et dénoncer le silence de la direction. En effet, on ne sait pas si des enseignants coupables de propos déplorables ont été sanctionnés. Ce silence reflète le même conflit d’intérêts que celui qui paralyse la gestion de Sciences Po : l’argent éteint toute considération morale. Accueillir des étudiants étrangers qui paient très cher leurs études est une aubaine, mieux vaut donc ne pas froisser les candidats. Le partenaire d’HEC, le Qatar, également banquier des Frères musulmans et du Hamas, finance une partie des activités. Les universités en difficulté ou avides de financements et de prestige international sont des proies faciles pour les États étrangers déterminés à diffuser leur vision du monde.

Face au procès pour lâcheté intenté contre eux, 70 présidents d’université ont finalement signé une tribune. Ce plaidoyer pro domo dénué de toute empathie envers les étudiants juifs ne laisse présager aucune prise de conscience. L’antisémitisme n’est pas près de disparaître des campus.

Science-Po Menton : un campus « Juifs libres » : Sciences Po Menton est le cas d’école d’un antisémitisme décomplexé. Le 8 octobre, l’association Sciences Palestine de Menton postait ce message : « Hier, les résistants palestiniens ont lancé une attaque contre Israël. » Les membres de l’association ont été convoqués par la direction, mais aucune sanction n’a été prise. Les pressions se sont donc poursuivies. Or, sur ce campus, rattaché à celui de Paris, 60 % des étudiants viennent de l’étranger, principalement du monde arabe. Selon les représentants du syndicat étudiant, il était nécessaire de rapatrier les étudiants juifs rue Saint-Guillaume, car l’école ne pouvait plus assurer leur protection. A Loucedé bien sûr. Sciences Po Menton a réalisé le rêve des militants pro-palestiniens : une école « Juifs libres ».

© Céline Pina

Source : Causeur

https://www.causeur.fr/universites-lexplosi

 
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