Au procès pour viol de Mazan, Charly A., l’accusé qui ne sait pas pourquoi il est venu six fois aux Pélicots

Au procès pour viol de Mazan, Charly A., l’accusé qui ne sait pas pourquoi il est venu six fois aux Pélicots
Au procès pour viol de Mazan, Charly A., l’accusé qui ne sait pas pourquoi il est venu six fois aux Pélicots

LDans la soirée du 7 décembre 2018, Gisèle Pelicot a fêté ses 64 ans. Pour son anniversaire, son mari, Dominique, lui a préparé une terrible surprise. Elle l’apprendrait des années plus tard. Dans la soirée, Charly A., alors âgé de 24 ans, est venu la maltraiter à leur domicile de Mazan (Vaucluse), avec la complicité de son mari.

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Au total, le jeune Charly A. est venu six fois entre 2016 et 2020. Un sinistre record. La première fois, il approchait tout juste des 22 ans. “M. Pelicot m’a envoyé un message privé sur Coco.fr. Il m’a proposé un rendez-vous, j’ai dit oui, a décrit doucement Charly depuis le box du tribunal correctionnel du Vaucluse ce vendredi. J’ai l’impression de parler au couple. Il m’a dit : « Ne t’inquiète pas : elle est d’accord. » Que sa femme se couchera et fera semblant de dormir. A LIRE AUSSI Procès pour viol à Mazan : trente et un mois d’enquête extraordinaire

On sait depuis que Gisèle Pelicot ne dormait pas. Elle a été droguée par son mari. Charly A. nie « l’intention » des viols. Il risque néanmoins vingt ans de prison pour viol aggravé. Ainsi, chaque question semble le figer. Il reste raide, le regard fixe. La peur d’en dire trop le paralyse : quelques monosyllabes s’échappent de sa bouche, des discours hésitants qui éclairent peu la cour. Il faut écouter attentivement pour comprendre ce que veut dire le jeune homme au pull blanc, orné d’un col barbelé et d’une moustache.

“À ce stade, je pense qu’elle fait semblant.”

La première fois, en 2016, Charly A. avait pour consigne de ne pas avoir fumé ni de s’être parfumé au préalable. Après s’être garé sur le parking du stade Mazan, il a envoyé un SMS : « Je suis là. » Sur le pas de sa porte, Dominique Pelicot agite le flash de son téléphone pour lui montrer le chemin. Une fois dans la maison, Charly se déshabille sur ordre du mari. Il se réchauffe les mains sur le radiateur. S’ils ont trop froid, ils risquent de réveiller la victime. « Je suis complètement nue, je suis Dominique Pelicot dans le noir jusqu’à la chambre. La lumière est tamisée. Je vois le dos d’une femme endormie, allongée dans son lit », décrit-il.

Dominique Pelicot commence un travail sur l’inconscient de Gisèle Pelicot. Sans que cela interpelle Charly. « À ce moment-là, je pense qu’elle fait semblant, poursuit le jeune homme. Il me dit de venir, de m’écarter. J’ai fait des caresses, des cunnilingus, il m’a demandé de la pénétrer. » « Est-ce qu’elle réagit ? » demande le président du tribunal, Roger Arata. « Elle bouge un peu », hésite Charly. “Cela ne vous a pas posé de questions?” » « Non, ça revient toujours à la même chose… Monsieur m’a dit qu’il n’y avait pas de problème. » « Est-ce qu’elle a une réaction normale d’une personne ayant des relations sexuelles ? ” Silence. “Je ne sais plus…”

Dominique Pelicot suggère de maltraiter la mère de Charly A.

Malgré ses six déplacements à Mazan, Charly A. ne sait plus grand chose. « Monsieur, ce sont des images qui doivent rester gravées dans votre mémoire ! » Roger Arata lui fait la leçon. Il faudra attendre le troisième ou le quatrième rendez-vous pour que le jeune homme se remette en question. En sixième, Charly a finalement « cliqué ». Il ne reviendra plus à Mazan, perturbé par la proposition de Dominique Pelicot d’aller droguer et abuser… de sa propre mère.

Cette proposition insensée a même été évoquée en action avec Gisèle Pelicot. Dans une conversation retranscrite par les enquêteurs, Dominique Pelicot revient à la charge. « Ce week-end, ça ne va pas être possible mais le week-end d’après, ouais », élude le jeune homme en lui donnant une adresse à Avignon. Dominique Pelicot lui donne quelques doses de Temesta dans du papier aluminium. Il ne les utilisera pas.

Et ce malgré les nombreux SMS envoyés par Dominique Pelicot à Charly A., le pressant de trouver une date pour ce sombre projet. Le premier cherchait une Gisèle bis. Le second a alors proposé à sa mère « comme ça », car il était « insistant ». Cette curieuse pensée pourrait trouver son origine dans les non-dits de l’histoire familiale chaotique du jeune homme. Mais quand le tribunal veut approfondir, il reste stoïque, presque muet.

Un scénario porno ?

Reste l’expertise détaillée d’un psychiatre. Celui-ci souligne la forte consommation de pornographie du jeune intérimaire perdu. « Le porno véhicule un scénario normatif, explique l’expert Mathieu Lacambre. Le scénario classique est celui du fantasme de la MILF – « Mère que j’aimerais baiser » – qui reçoit la visite d’un plombier qui couche avec elle. Plus Charly A. consomme, plus il aura envie d’explorer davantage. On peut supposer que Dominique Pelicot a effectivement offert à Charly A. l’objet qu’il a vu sur son écran. La MILF « princesse endormie » à seulement 30 minutes de route.

L’hypothèse intrigue le tribunal. « Avez-vous eu l’impression d’être dans un film pornographique ? » demande-t-on à Charly A. « C’est possible… » ​​balbutie-t-il. La brièveté des réponses reste inversement proportionnelle à la longueur des questions posées. Un autre rapport psychologique le décrit comme timide, influençable et facilement influençable.

Et dangereux ? « Ce n’est pas un prédateur sexuel, dans le sens où ce n’est pas un carnivore qui chasse. Il ne cherchait pas la proie idéale», précise l’expert psychiatre. L’accusé cache cependant une face sombre. Dans sa chambre, les enquêteurs retrouveront divers objets sexuels, ainsi que des sous-vêtements appartenant à sa mère. « Je me cherchais », justifie celui qui assure n’avoir pris « aucun plaisir » à Mazan malgré ses six voyages.

Un « privilégié »

Sur la seule vidéo – sur les 47 dans laquelle apparaît Charly A. – diffusée au tribunal, Dominique Pelicot aide le jeune homme à réaliser un acte sexuel sur Gisèle Pelicot inconsciente. Les deux hommes étaient très souvent en contact. En seulement quelques mois en 2020, ils ont échangé plus de 200 messages. La plupart envoyés par Dominique Pelicot.

Les derniers échanges ont eu lieu à l’été 2020. Charly A. ne veut plus “y retourner” [sic] « . Il fait néanmoins partie des cinq coaccusés que Dominique Pelicot a choisi de prévenir par téléphone après son interpellation chez Leclerc à Carpentras, afin qu’ils effacent leurs traces de contacts. « Plutôt de « bons clients », si je puis dire, remarque un évaluateur. « Il faisait peut-être partie des privilégiés », confirme Dominique Pelicot.

Concernant Charly A., le principal accusé – comme à son habitude – souffle le chaud et le froid. «Je ne savais pas qu’il avait cet âge», assure-t-il. J’avoue que j’ai été directif avec lui. Mais dans les discussions qui ont suivi, je n’ai senti personne impressionné, forcé. »


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« Si on vous présentait à nouveau un scénario de cette nature, que diriez-vous ? » dit le président Roger Arata à Charly. Alors qu’il restait enfermé jusqu’à présent, l’accusé est saisi d’un élan inattendu de sincérité : « Je dirais clairement, excusez l’expression, allez vous faire foutre ! »

Après avoir regardé les vidéos très crûment, Me Stéphane Babonneau, avocat des parties civiles, tente une astuce. « Par mon intermédiaire, il y a une main qui vous est tendue de la part de Gisèle Pelicot. Huit ans après ces événements, ce que vous avez fait s’appelle un viol. Avez-vous violé Madame Pélicot ? » Réponse de Charly A. : « Non. »

 
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