« Un monde proustien, un héritage familial et le cœur de mon père »

« Un monde proustien, un héritage familial et le cœur de mon père »
« Un monde proustien, un héritage familial et le cœur de mon père »

Le JDD. Vous venez de recevoir le prix Interallié 2024. Comment recevez-vous la nouvelle ?

Thibault de Montaigu. Avec une joie d’autant plus grande que ce prix est lié à mes souvenirs d’enfance. Dans la maison de mon grand-père, à la campagne, je me souviens avoir découvert de nombreux auteurs lauréats de ce prix : Antoine Blondin, Michel Déon, Félicien Marceau, mais aussi d’autres moins connus comme René Fallet et Roger Vailland, qui ont tous nourri mon imaginaire et ma culture littéraire. . Aujourd’hui, je suis heureuse et fière de rejoindre cette famille !

Il me semble essentiel de se rappeler d’où l’on vient, où sont nos racines.

Votre travail, Cœur, est une enquête sur votre ancêtre, Louis, capitaine des hussards tombé en 1914 dans une charge de cavalerie. Est-ce aussi un voyage dans une époque révolue ?

C’est une exploration dans un monde disparu. À notre époque marquée par la vitesse et le virtuel, il me semble essentiel de se rappeler d’où l’on vient, où sont nos racines, ne serait-ce que pour savoir qui nous sommes. Même si l’univers que j’explore est une sorte de monde proustien submergé, il se poursuit avec la mémoire d’une certaine mythologie française, que j’essaie de faire vivre dans ce livre.

Vous évoquez un univers proustien. L’auteur deA la recherche du temps perduà laquelle on pense en vous lisant, a-t-il été une Source d’inspiration ?

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Oui, c’est un auteur fondamental pour moi. Dans les toutes dernières années de sa vie, mon père l’a relu, ou plus précisément sa compagne Nancy le lui a lu. Moi aussi j’aimerais relire cette œuvre avant de partir, on ne finit jamais de la découvrir ! C’est un auteur mondial, qui contient tout. Mon père était revenu à Proust, pour la nostalgie du monde submergé, sans doute, mais aussi pour les grands thèmes universels qu’il aborde : l’amour, la mort, la transmission…

Comme si ce livre et le cœur de mon père étaient liés…

Pourquoi as-tu nommé ton livre avec un seul mot, Cœur ?

Il s’agit du cœur de mon père. Il souffrait d’une insuffisance cardiaque, il allait mourir. Mais ce qui me fascinait, c’est qu’à chaque fois que je lui parlais de mon enquête familiale, j’avais l’impression de lui redonner un peu de vie. Comme si ce livre et le cœur de mon père étaient liés, et que tant que j’écrirais, il continuerait de battre…

Ne t’inquiète pas d’avoir signé avec Cœur ton meilleur livre ?

On m’avait déjà posé cette question dans mon livre précédent, Grâce (Plon, Prix de Flore 2020). Les gens s’inquiétaient de ce que je pourrais écrire d’autre après une telle révélation spirituelle. Pour répondre à ta question, je ne sais pas ce que Dieu me donnera comme prochain livre, mais je suis sûr d’une chose : je me retrouverai à nouveau seul, devant ma page, car c’est l’activité que je préfère le plus. dans le monde !

Que représente à vos yeux l’éthique des Hussards ? Y a-t-il un lien entre le régiment auquel appartenait votre ancêtre Louis et le mouvement littéraire qui a pris son nom ?

Au total – parce que tenir une plume est moins risqué que d’aller au front – les hussards, le régiment militaire comme le mouvement littéraire, incarnent chacun à leur manière une forme du panache français. Les soldats de la Grande Guerre chargeaient en pantalons coquelicots, par fierté et par goût du chic, sans considérer le risque supplémentaire auquel ils s’exposaient. De même, le mouvement littéraire éponyme, lui-même friand de panache, fasciné par le beau geste, avait tendance à privilégier le style sur le fond. Mais dans les deux cas, ils étaient à l’offensive !

 
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