Le laboratoire Univers et Particules de l’Université de Montpellier est impliqué dans la mission Svom. Le satellite, lancé en juin dernier, permettra d’étudier de puissants rayonnements provenant des profondeurs de l’espace.
A 625 km d’altitude, 30° d’inclinaison par rapport à l’équateur, Svom tourne autour de la Terre, offrant à ses instruments le noir profond de l’Univers. Guetteant, silencieusement, la mort inévitable, redoutable et lumineuse, d’une étoile massive tapie aux confins de l’espace et du temps, trahie par une émission d’énergie telle qu’elle brillera plus fort que toute autre Source du cosmos. En quelques instants, mesurés en secondes, en minutes tout au plus, « l’équivalent de ce que rayonnera le Soleil durant toute sa vie »dit Frédéric Piron, sa vie de dix milliards d’années…
Svom est un gardien aux aguets. L’avant-poste franco-chinois de dix laboratoires français, du Centre national d’études spatiales, du Cnes, et de dizaines de cosmologues et astrophysiciens du monde entier, dévoués, fascinés, à comprendre ce que sont les mystérieux sursauts gamma, révélés en 1973 par une publication américaine. . Le LUPM, laboratoire Univers et Particules de l’Université de Montpellier, est l’un des dix, Frédéric Piron, chercheur en astrophysique au CNRS, à la tête du petit groupe impliqué, depuis une décennie, dans la genèse de Svom et qui, antennes VHF et aiguisées algorithmes, en écoute depuis le 22 juin, jour du vol à Xichang, dans le Sichuan chinois.
Décollage ! UN #LongMarch2C fusée transportant le moniteur d’objets variables spatiaux ???(#SVOM)Satellite, a été lancé depuis le #Xichang Centre de lancement de satellites dans la province du Sichuan.@CNES @esa @NMK_ZeroG @IRAP_France @CNRS @iafastro @jamesdcarpenter @aarti_holla
(Vidéo : Xu Lihao) pic.twitter.com/vC1cuIi2So–Wu Lei (@wulei2020) https://twitter.com/wulei2020/status/1804420721336291396?ref_src=twsrc%5Etfw
L’histoire remonte à 1967. Américains, Russes et Britanniques “a signé un accord en 1963 interdisant les essais nucléaires dans l’atmosphère et l’espace”échoue le chercheur héraultais. Et pour contrôler le respect, les États-Unis envoient en orbite des satellites capables de détecter les particules émises par une explosion atomique. Rayons gamma, donc : photons, particules de lumière.
Salves courtes ou longues
« En 1967, les Américains ont détecté une émission gamma, puis d’autres. Ils ne viennent pas de la Terre, de la Lune ou du Soleil, mais donc de l’espace lointain. Ils n’en parlèrent pas jusqu’à « la publication, en 1973, par des chercheurs de Los Alamos, où est née la bombe atomique, d’un article sur ces émissions ».
La mission ???? SVOM vise à détecter les sursauts gamma, phénomène le plus lumineux observé depuis le Big Bang. Une énergie colossale !
Voici une vidéo pour mieux comprendre le @SVOM_mission. pic.twitter.com/9g9JCLpPH1
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On les appelle sursauts gamma (GRB). Et ils deviennent un sujet majeur de l’astrophysique, la communauté des chercheurs observant au fil des années qu’ils sont « très intense, très variable »qu’il y en a des courtes, moins de deux secondes, et des plus longues, interrogeant leur Source et leur origine, leur distance à la Terre.
Pour la Source, deux hypothèses dominent : les sursauts longs, les plus nombreux, seraient le produit d’une explosion d’étoile. « Un objet très massif, en fin de vie, qui va créer une super nova et un trou noir. L’éclatement est l’éjection d’une quantité phénoménale de matière de ce trou noir. Ejection de quoi, c’est quoi le moteur ? Mille questions se posent également.
Nous regardons l’aube des temps
Et les courtes rafales ? “Voir deux étoiles à neutrons, qui se rejoignent jusqu’à fusionner, puis créent un trou noir”émettent ce fameux jet. Mais où dans l’immensité de l’espace, à quelle distance de nous ?
« En 1997, cela a été réparé pour la première foisresumes Frédéric Piron: plusieurs milliards d’années-lumière, en dehors de notre galaxie, dans une galaxie très très lointaine. Dans l’espace, regarder au loin, c’est regarder le passé : la lumière qui vient de loin vient des temps anciens, de l’histoire de l’Univers. Ces sursauts peuvent donc signer la mort d’étoiles nées 500, 600 millions d’années après le Big Bang, « différents de ceux nés après » et il y a beaucoup à apprendre d’une histoire encore pleine d’inconnues.
« Je travaille sur ce sujet depuis vingt ansdit Frédéric Piron. J’ai commencé avec Fermi. Enrico Fermi, l’un des pères de la bombe, a donné son nom à un observatoire spatial de la NASA lancé en 2008 pour étudier les sources gamma. Un des outils qui ont permis de dénombrer certains « 10 000 éclats en cinquante ans. Mais la fraction dont nous connaissons la distance est petite. Svom contribuera à faire mieux, en accélérant le processus mis en œuvre.
“Nous ne localisons pas très, très bien les objets avec les rayons gammaexplains Frédéric Pironla Source du jet. C’est pourtant un préalable pour mesurer sa distance et la qualité de son observation, du visible aux gamma « durs » en passant par les gamma « X » et « mous ».
? #MissionSVOM ?️ Rencontre avec Florent Robinet qui a équipé le télescope MXT du satellite #SVOM logiciel embarqué d’analyse d’images en temps réel pour localiser les sursauts gamma avec une très haute précision.
Il est chercheur @CNRS à la@IJCLab d’Orsay@CNRSIdFSud pic.twitter.com/LkmQfkpj7l
— CNRS Nucléaire & Particules (@CNRS_IN2P3) https://twitter.com/CNRS_IN2P3/status/1804204815678845180?ref_src=twsrc%5Etfw
Rayons X gamma « dur » et gamma « mou »
Pendant une vingtaine d’années, une fois l’émission détectée, “le jeu consiste à repointer les télescopes le plus rapidement possible” sur la zone en question. « En couvrant 1/6ème du ciel côté nuit avec son instrument ECLAIRs »Svom améliorera la mesure de distance des sursauts et son alerte aux observatoires terrestres leur permettra d’orienter rapidement (automatiquement) leurs télescopes.
J-10 avant le lancement de SVOM ?
Cette semaine, présentation de l’instrument ECLAIRs. Conçu par des laboratoires français, il sera chargé de détecter les sursauts gamma afin que le satellite se réoriente très rapidement pour observer ces phénomènes. pic.twitter.com/xtNr9Jo9ko
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Deuxièmement, l’identification par ECLAIR d’un sursaut fera tourner le satellite lui-même, afin d’orienter ses propres télescopes MXT et VT, opérant dans les bandes X et visible, vers la Source d’émission.
« Nous voulons capter la « chose », affiner sa localisation le plus rapidement possible, pour avoir à terme une mesure de distance et une bonne couverture spectrale de l’objet et faire de la modélisation »commente l’astrophysicien montpelliérain, qui attend janvier et le début « opérations scientifiques de routine ».
“Svom est toujours en phase de test et d’étalonnagespecifies Frédéric Piron. Le repointage automatique de l’ensemble du satellite n’est pas une mince affaire. Cependant, pour capturer un point lumineux dans un espace insondable, le mot précision est… un euphémisme.
Algorithmes LUPM
“Svom a commencé à s’installer vers 2010, 2014 : le partenaire chinois a proposé la plateforme et le lanceur et la partie française – la France a une certaine expertise sur les sursauts – s’est organisée en consortium.”
L’équipe de six chercheurs et ingénieurs dirigée par Frédéric Piron, au LUPM, membre du consortium, associé à l’Institut d’Astrophysique de Paris, est chargée « développer la chaîne de traitement des données gamma des ECLAIR et GRM » – le quatrième instrument de Svom, qui travaille dans une gamme complémentaire d’ECLAIR.
Grâce aux algorithmes écrits par LUPM, dès qu’il y a une alerte, ils dressent la « carte d’identité » du phénomène, afin de le reconstruire, le caractériser, le classer (court, long). Un traitement décisif pour identifier rapidement ses propriétés et les partager avec la communauté mondiale.