Les autorités sont de moins en moins réticentes à modifier les prix. Les effets de ces mesures vont souvent dans une direction différente de celle souhaitée.
Dans un pays où règne l’inflation, une augmentation des prix ne correspond pas à une augmentation de la valeur. Ne confondons pas prix et valeur. Charles Gave, président de l’Institut des Libertés, le rappelait récemment : une augmentation du prix d’une maison ne signifie pas forcément qu’elle a pris de la valeur. Par exemple, les restrictions doivent simplement empêcher la construction de nouvelles maisons tandis que le prix des bâtiments existants augmente sans que leur valeur ne change. Ce type d’illusion monétaire est courant lorsque les injections de devises abondent.
L’évolution des prix ne reflète pas toujours un changement dans la relation entre l’offre et la demande. Cela est particulièrement vrai pour les prix qui dépendent de l’action gouvernementale ou qui sont déterminés directement ou indirectement par l’État. Cette dernière tente souvent de réduire les prix ou de les contrôler, par exemple sur le marché immobilier. Toutefois, un plafonnement des prix entraîne une pénurie. Mais qu’en est-il de la santé ?
Une étude très intéressante examine les conséquences d’une baisse des prix administrés dans le secteur des technologies médicales, en particulier ses effets sur l’innovation (The long terme Impacts of réglementé Pricecuts: Evidence from Medicare, Yunan Ji and Parker Rogers, WP 33083, octobre 2024 , NBER).
« Les introductions de nouveaux outils « medtech » sont en baisse de 25 % et les demandes de brevet sont en baisse de 75 %.
Le secteur de la santé fait l’objet d’innombrables subventions. Les dépenses du gouvernement américain dans ce secteur atteignent 4 300 milliards de dollars par an. Ces quantités sont si importantes que de nombreuses critiques sont apparues faisant référence à divers « gaspillages ».
Forte baisse des prix aux Etats-Unis
Les appels à des économies dans les soins de santé semblent donc logiques. Pourquoi ne pas baisser les prix ? La baisse des prix analysée par cette étude n’est pas anodine. Elle découle de diverses réformes intervenues ces dernières années, par exemple dans le remboursement des produits achetés. Nous avons constaté une baisse des prix nationaux de 9,5 % en 2009 sur les catégories d’instruments médicaux les plus chères, des enchères de fournitures entre 2011 et 2016, et de nouvelles réductions de prix à l’échelle nationale en 2016.
Selon cette étude, les prix de certains instruments médicaux ont diminué de 61 % sous Medicare en dix ans. Les consommateurs de ces produits (fauteuils roulants, pompes à insuline et autres équipements médicaux à domicile) étaient sans aucun doute enthousiastes. Mais, selon l’étude, les actions de Medicare réduisent les revenus des fabricants d’instruments, la qualité des produits et les coûts de production.
Cette branche de la technologie médicale a également bénéficié de nombreuses innovations ces dernières années. L’étude cite l’oxygénothérapie portable, qui a remplacé les réservoirs d’oxygène lourds et dangereux, ou les glucomètres en continu sans qu’il soit nécessaire de consulter un médecin.
Mais l’innovation a souffert de ces baisses de prix gouvernementales. Selon cette étude, l’introduction de nouveaux outils « medtech » a diminué de 25 % et les demandes de brevet ont diminué de 75 %.
Les producteurs des produits en question ont en effet réduit leur capacité d’innovation et procédé à des délocalisations de production à l’étranger ce qui a entraîné une augmentation du taux de défauts de ces produits. Selon les travaux de Ji et Rogers, la valeur d’une innovation réduite peut compenser entièrement les économies résultant de la réduction des prix administrés. Les auteurs de l’étude proposent de mieux calibrer les baisses des prix administrés pour ne pas impacter l’innovation. Il est clair que les autorités devraient prendre des mesures sur les instruments offrant les marges bénéficiaires les plus élevées. Il s’agirait cependant d’identifier les raisons pour lesquelles certains produits offrent des marges élevées. Si le bénéfice médical est très élevé, pourquoi pénaliser les producteurs les plus performants ? La question amène inévitablement à se demander s’il ne vaudrait pas mieux faire confiance à la concurrence et au marché pour que le prix joue son juste rôle de signal.