L’armée ukrainienne bat en retraite. Après une année 2023 marquée par une quasi-immobilité du front, et des assauts quasi continus de l’armée russe contre les positions ukrainiennes tout au long de l’année 2024, Moscou est parvenue en octobre à conquérir plus de territoire qu’elle n’en avait. a conquis en un mois depuis l’été 2022. Pas encore une guerre de mouvement ni un effondrement des défenses ukrainiennes, mais le signe des difficultés qui s’accumulent pour Kiev.
A la fin de l’été, l’armée russe semblait s’apprêter à prendre d’assaut la ville de Pokrovsk, pôle logistique important, vers laquelle elle a pu avancer au printemps après la chute de la ville d’Avdiivka en FÉVRIER. Ayant atteint moins de dix kilomètres, les troupes russes bifurquent finalement pour poursuivre leur effort plus au sud, afin de menacer d’encerclement les défenseurs ukrainiens déployés là-bas. Avec un certain succès.
Retranchées dans le bastion de Kurakhové, les troupes de Kiev doivent aujourd’hui faire face à la menace arrivant du nord, de l’est et maintenant du sud depuis la chute, début octobre, de la ville de Vouhledar, 20 000 habitants avant la guerre. , véritable verrou à l’angle sud-est du front sur lequel les assauts russes sont brisés depuis 2022. Les Russes sont ainsi sur le point de prendre par derrière les dernières positions fortifiées ukrainiennes du secteur. « Si la tendance actuelle se poursuit, l’Ukraine pourrait perdre Kurakhové avant 2025. » estime l’analyste Emil Kastehelmi sur X. La perte de la ville faciliterait l’avancée sur Pokrovsk et, au-delà, vers l’ambition annoncée de prendre toute la région du Donbass.
« Pression maximale »
Cet objectif est encore loin. Si elle bat en retraite, l’armée ukrainienne ne se dissout pas et maintient des positions fortes. Mais les difficultés se font également sentir sur d’autres points du front. A Chassiv Yar, les Russes parviennent à franchir en octobre le canal qui constitue la principale ligne de défense ukrainienne. Plus au nord, Moscou imprime actuellement “pression maximale” vers la ville de Koupiansk, selon son maire Andriï Bessedine. Dans la région frontalière de Koursk, l’armée russe a réussi à reprendre la moitié du territoire conquis par l’Ukraine lors de son offensive surprise cet été.
Les raisons des progrès russes actuels sont nombreuses. Là où elles battent en retraite, les troupes ukrainiennes peinent à stabiliser leurs positions en construisant rapidement des fortifications. Leurs positions défensives subissent également de plein fouet les frappes de bombes planantes, imprécises mais d’une puissance redoutable, que l’armée de l’air russe effectue sans entrave, faute de capacités antiaériennes suffisantes du côté ukrainien.
À cela s’ajoute un problème de ressources humaines. L’armée ukrainienne peine à mobiliser, entraîner et équiper de nouvelles unités, et se retrouve dépassée en nombre par l’armée russe, qui compte environ 500 000 hommes en Ukraine selon Michel Goya, ancien colonel des troupes de marine et historien militaire. . Plus particulièrement, l’Ukraine souffre de la qualité inégale de ses unités, certaines étant nettement moins expérimentées et correctement équipées que d’autres.
L’inconnu du 5 novembre
Mais ce sont précisément les formations les plus expérimentées qui se sont retirées cet été du front du Donbass pour attaquer la région de Koursk. Leur absence fut cruellement ressentie pour contenir l’avancée russe. Les problèmes de coordination lors des rotations d’unités ont également ouvert de malheureuses opportunités sur le front, dont la Russie a pu profiter localement.
Enfin, il y a les problèmes matériels. L’aide proposée par les alliés de Kiev reste insuffisante selon les Ukrainiens, qui déplorent que l’Occident ne cherche plus à les mettre en position de gagner, mais de survivre. Les autorités ukrainiennes se plaignent également de la lenteur des livraisons. Selon le président Volodymyr Zelensky, seuls 10 % de l’aide américaine approuvée par le Congrès en avril est parvenue à ce jour à l’Ukraine.
Certes, les avancées de Moscou ont un prix extrêmement élevé. Les pertes russes se comptent chaque jour par centaines de morts et de blessés. La guerre a englouti un tiers du budget national et l’économie russe a commencé à montrer des signes de stagflation (un mélange de croissance atone et d’inflation). Mais la Russie conserve la capacité de poursuivre la guerre, d’autant qu’elle a récemment reçu le renfort de milliers de soldats nord-coréens. L’Ukraine, à l’inverse, pourrait bien voir le soutien occidental s’effondrer si par hasard Donald Trump remportait l’élection présidentielle américaine le 5 novembre.