comment les gendarmes mènent à bien cette mission délicate

comment les gendarmes mènent à bien cette mission délicate
comment les gendarmes mènent à bien cette mission délicate
Publié le 31/10/2024 à 6h30Mis à jour le 31/10/2024 à 9h33

Écrit par Sophie Courageot

En cette période de Toussaint, les gendarmes ont accepté de parler d’une des facettes de leur métier. Un décès qui doit être annoncé subitement à une famille. Comment annoncent-ils les décès lors d’un accident de la route, d’un suicide ou de la découverte d’un corps ?

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Un gendarme ou un policier frappe à la porte. Nous avons tous peur de vivre cette scène un jour. Au cours de sa carrière, le major Cyril Willers, 55 ans, a dû annoncer au moins dix décès. Le plus dur : venir au domicile des gens pour le décès d’un enfant. “Evidemment, un gamin de 13 ans qui se suicide à moto, c’est dur pour l’enquêteur, et quand tu as devant toi la mère qui s’effondre, c’est impactant.” Ce jour-là, Cyril Willers demande au maire de la commune de l’accompagner.

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Image d’illustration.

© GUILLAUME BONNEFONT / MAXPPP

Dans les brigades de France, il n’y a pas de gendarme « spécialisé » dans ces annonces douloureuses. Lorsqu’un accident de la route survient et qu’un corps est découvert, il appartient généralement à l’officier de police judiciaire de prévenir les proches du décès. « Il y a un module de sensibilisation à l’école pour les plus jeunes. Désormais, dans la pratique, on ne laisse pas les jeunes gendarmes annoncer les décès. Nous veillons à ce que la mission s’appuie sur des personnes qui ont de l’expérience, car il faut s’entourer d’un certain nombre de précautions quand on va annoncer la nouvelle à une famille qui va subir le choc » explains Colonel Alban Delalonde, head of the Haute-Saône gendarmerie.

Malheureusement, nous ne soulagerons pas la douleur et le choc des gens ; nous devons encore le faire en faisant preuve d’empathie et de compréhension, sans nous éloigner de notre rôle de policiers.

Alban Delalonde, patron de la gendarmerie de la Haute-Saône.

En annonçant l’inacceptable, chaque gendarme est aussi rappelé sa propre vision de la mort. Il n’existe donc pas de formules « toutes faites » lorsque l’on sonne à la porte d’un logement annonçant une mauvaise nouvelle.

Cyril Willers, qui commande aujourd’hui la brigade de gendarmerie de Dampierre-sur-Salon (Haute-Saône) a appris au fil du temps à mener à bien cette tâche. Les policiers sont la plupart du temps en binôme lorsqu’ils signalent un décès.

Pour le suicide, la plupart du temps, les gens s’y attendent en raison de l’histoire de la victime. Ils disent qu’ils s’en doutaient. Ils subissent le coup bien plus qu’un accident de la route qui est un coup dévastateur.

Major Cyril Willers, commandant de la communauté de serrage de Dampierre-sur-Salon

“Je suis désolé, j’ai de mauvaises nouvelles à vous annoncer.”Cyril tente, avec des mots simples, d’avancer en une fraction de seconde vers la perte d’un être cher.

Il y a des gens qui vont tout de suite poser la question, est-ce que mon fils est mort ? Il faut leur dire la vérité tout de suite, car tourner autour du pot crée des souffrances supplémentaires.

Alban Delalonde, patron de la gendarmerie de la Haute-Saône.

D’autres auront besoin d’un peu plus de temps pour comprendre ce qui se passe. Et puis, il y a les questions auxquelles il faut trouver les mots justes pour répondre : “Comment est-il mort ?”, “A-t-il souffert ?”.

L’annonce d’un décès reste gravée. Nous n’oublions jamais. Cela reste enfoui au fond de mon esprit.

Major Cyril Willers, commandant de la communauté de serrage de Dampierre-sur-Salon

Une fois l’annonce d’un décès faite, les policiers passent généralement le relais à la famille, à un élu de la commune, aux pompiers, lorsqu’un traitement médical est nécessaire.

La mort n’est pas oubliée. 3 167 personnes ont perdu la vie en 2023 sur les routes de France. Le gendarme voit les restes, puis fait face aux familles. Un double traumatisme qu’il faut endurer. « La première fois que ça arrive, ça a un impact. Et puis petit à petit, on arrive à évacuer ça… On est, comme les pompiers, je pense, on en parle ouvertement quand on rentre à la gendarmerie » dit Cyril Willers.

« La notion de groupe est importante, on a généralement des gendarmes qui s’en sortent assez bien dans cette démarche d’annonce des décès. Nous avons malgré tout des ceintures de sécurité, des psychologues qui sont là pour soutenir les policiers lorsqu’ils ont des difficultés ou après avoir eux-mêmes vécu un choc traumatique. Le gendarme, c’est celui qui est lui-même confronté à la mort, avant même d’aller voir les familles » souligne le patron de la gendarmerie de la Haute-Saône.

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Après un accident de la route, la mission de la police est d’avertir les familles lorsqu’un décès survient.

© LIONEL VADAM / MAXPPP

Après 30 ans de carrière, le gendarme Willers sait que certaines images de ses interventions sur le terrain ne s’effaceront pas. Une mère qui ne veut pas lâcher son enfant sans vie, une autre avec ses petits autour d’elle sur le pas de la porte, et ce père qui, parti à vélo, ne reviendra jamais. La vie des gendarmes est aussi faite de ces fragments de vie qui disparaissent en un instant.

De la Haute-Saône aux territoires français, l’acceptation de la mort est différente selon chaque culture. « J’ai travaillé huit ans à l’étranger, à Tahiti par exemple, l’approche de la mort n’est pas la même. Cela se passe plus sereinement. En Martinique, on dit : « Dieu l’a voulu ». Ici, les gens s’effondrent, pleurent, le toucher de la mort n’est pas du tout pareil ».

Les forces de l’ordre sont confrontées chaque jour à ces morts subites et inacceptables liées aux accidents de la route, mais pas seulement. Les suicides et les morts naturelles constituent la majorité des annonces de décès faites quotidiennement par la police.

 
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