Incendies mortels dans le Vieux-Montréal, l’art de jouer avec le feu

Incendies mortels dans le Vieux-Montréal, l’art de jouer avec le feu
Incendies mortels dans le Vieux-Montréal, l’art de jouer avec le feu

Cela ressemble à un mauvais scénario de film à petit budget. Deux incendies criminels dans le Vieux-Montréal, où les touristes abondent. Deux immeubles patrimoniaux appartenant au même propriétaire, avec des pièces décrites par les locataires de passage comme dangereuses. A peine « un débarras », dira un touriste ; un vrai « nic-a-feu », un autre tranchera. Aux deux adresses, des morts tragiques avec, en toile de fond, la menace silencieuse d’une guerre de paiement de protection qui serait supporté par les restaurateurs et patrons de bars de la métropole.

Le coroner en chef a bien fait de suivre l’intuition du ministre de la Sécurité publique. Les similitudes entre ces tragédies sont étranges. Son choix de confier à la coroner Géhane Kamel la présidence de l’enquête publique sur la mort d’une touriste française et de sa fille de sept ans au 402, une auberge de jeunesse de la rue Notre-Dame, la semaine dernière, est logique. M.moi Kamel travaille déjà sur l’épineux dossier des sept décès survenus à la Place D’Youville, survenus dans des circonstances similaires en mars 2023. Elle aura tout le temps de les regrouper.

Ce faisant, non seulement sa vision s’en trouvera élargie, mais elle n’aura pas à emprunter deux fois les mêmes chemins. Le temps gagné sera précieux, car cette double enquête publique s’annonce éminemment complexe.

Par deux fois, on a assisté à une transposition désastreuse du célèbre modèle du fromage suisse à Montréal. En gestion des risques, ce modèle compare les mécanismes de sécurité mis en place pour éviter les accidents à des tranches de fromage alignées. Le pire se produit lorsque les trous – les failles de nos systèmes – s’alignent.

Il y aura plusieurs sections à examiner ici. L’incendie de la Place D’Youville, qui accueillait des hébergements illégaux Airbnb, avait déjà permis d’identifier plusieurs des acteurs qui devront se présenter au coroner. On pense à l’administration Plante, à la Sécurité publique, mais aussi à la Société de l’industrie touristique du Québec et à Tourisme Québec, qui se livraient à l’époque à un jeu inélégant du « qu’est-ce que c’est ? -pas-moi-c’est-lui. Cette indolence généralisée a grandement nui à l’avancement du dossier et il faut y mettre un terme.

Nous attendrons également de pied ferme le Service de sécurité incendie de Montréal (SIM). En mars 2023, Devoir avait révélé que le 402 abritait deux pièces sans fenêtres ni issue de secours. Incapables d’expliquer comment une firme d’architectes et un inspecteur municipal auraient pu approuver de telles transformations, l’Ordre des architectes du Québec et l’administration Plante avaient promis des réponses qu’on attend toujours.

Dépêchée sur place, la SIM a constaté l’absence de système d’alarme incendie et de détecteurs de fumée, des non-conformités qui ont depuis été rectifiées. «Le bâtiment était sûr», a soutenu le SIM. Même si les médias ont été aux trousses des deux chambres non conformes qui faisaient encore récemment l’objet de plaintes sur les sites de réservation en ligne, la SIM a tenu bon : elle ne dispose « d’aucune information en ce sens. Ce type de réponse obtuse frise le refus de discuter, alimentant un dialogue de sourds qui mine la confiance du public.

La composante criminelle ajoute une couche supplémentaire de complexité. La coroner Géhane Kamel ne pourra lancer son enquête que lorsque le Service de police de la Ville de Montréal aura complété ses investigations. Les enquêteurs devront être diligents, car les familles des victimes, ainsi que les Montréalais, mais aussi les touristes inquiets du laxisme en matière de prévention des incendies dans la métropole, ont droit à des réponses et à des mesures correctives.

Parce que l’environnement ne s’autorégulera pas.

Mardi, Le Journal de Montréal On a appris que le propriétaire des deux immeubles incendiés, Émile Benamor (dont les bureaux ont été criblés de balles dans la nuit de mardi à mercredi), avait récemment reçu une tape sur les doigts de la part de la SIM pour un autre de ses immeubles. Situé sur la rue Prince, l’immeuble abrite depuis le mois d’août une auberge de jeunesse exploitée par les mêmes personnes que Le 402. La SIM a constaté une absence de moyens d’évacuation conformes et des moyens d’évacuation en mauvais état. Un air de déjà vu ?

M.moi Kamel a une tâche immense devant elle : identifier les failles de nos mécanismes de défense et les corriger – ou à tout le moins les atténuer – afin d’éviter qu’elles ne s’alignent à nouveau.

D’ici là, ceux qui veillent à notre sécurité ont le devoir de redoubler d’ardeur si nous ne voulons plus jouer avec le feu. À commencer par l’administration Plante qui, après avoir promis un blitz d’inspections, a connu un été particulièrement calme sur ce front. Il est grand temps de retirer les éperons et de recentrer les priorités sur la tâche de sauver des vies plutôt que de se contenter d’une obsession frivole sur l’espacement d’un auvent ou la hauteur des plantes sur une terrasse.

Nous ne voudrions certainement pas voir l’expression « jamais deux sans trois » se confirmer sous nos yeux horrifiés.

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