un an après le 7 octobre, la société israélienne est divisée sur la question des otages

un an après le 7 octobre, la société israélienne est divisée sur la question des otages
un an après le 7 octobre, la société israélienne est divisée sur la question des otages

Samedi 31 août, les corps de six otages enlevés lors de l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023 ont été retrouvés dans la bande de Gaza. Une terrible découverte qui a depuis poussé des dizaines de milliers de manifestants dans la rue et accru la pression sur Benjamin Netanyahu, accusé par une partie croissante de la population israélienne de ne pas en faire assez pour libérer les otages.

Selon un décompte de l’AFP, sur les 251 personnes enlevées le 7 octobre, 97 se trouvent toujours dans la bande de Gaza, parmi lesquelles 33 ont été déclarées mortes par l’armée israélienne. Denis Charbit, politologue à l’Université ouverte d’Israël et auteur de Israël, l’impossible État normal (Calmann Lévy), analyse pour Public Sénat cette fracture ouverte dans la société israélienne, alors que le pays s’apprête à commémorer un an après le massacre.

Un an après les massacres du 7 octobre, le gouvernement israélien s’apprête à organiser une cérémonie officielle de commémoration. L’initiative est controversée dans la société israélienne, notamment parmi les proches des victimes et des otages, pourquoi ?

C’est un projet qui fracture l’opinion israélienne, d’abord parce que la guerre n’est pas finie. Surtout, des otages sont toujours détenus dans la bande de Gaza et nous soupçonnons, à tort ou à raison, le gouvernement israélien et Benjamin Netanyahu de ne pas être suffisamment disposés à parvenir à un accord avec le Hamas. Une partie de la responsabilité incombe aussi évidemment au Hamas dans l’échec des négociations pour la libération des otages, mais une fenêtre d’opportunité s’est présentée cet été et Netanyahu n’a pas relevé le défi. Pour une partie de la société israélienne, tant que la question des otages n’est pas résolue, aucune commémoration n’est possible.

La deuxième raison qui explique cette polémique est que le Premier ministre a confié la responsabilité de l’organisation de cette cérémonie à la ministre des Transports, Miri Regev. Elle est régulièrement chargée d’organiser ces événements officiels, mais elle est aussi l’une des personnalités politiques les plus controversées au sein du Likoud. [le parti de droite nationaliste de Benyamin Netanyahou]. Ce n’est donc pas la personnalité la plus susceptible de susciter un moment de communion solennelle.

Miri Regev n’a pas hésité à annoncer au moins deux mesures controversées entourant l’organisation de cette commémoration. Premièrement, la cérémonie sera fermée au public et retransmise uniquement à la télévision, comme pour éviter que Benyamin Netanyahu ne soit sifflé ou chahuté par les manifestants. Elle a également décidé que la commémoration n’aurait pas lieu dans un kibboutz, alors même que c’était l’institution la plus touchée par les massacres du 7 octobre.

Cette opposition aux commémorations symbolise-t-elle aussi, plus largement, une forme de fracture qui s’est ouverte dans la société israélienne, autour de la question de la libération des otages ?

Je dirais même que cette question des otages est la seule division que la société israélienne s’est permise dans ce conflit. Une guerre a toujours le mérite de fédérer une population, les enfants du pays participent tous à l’effort, qu’ils soient riches ou pauvres, ouvriers ou chefs d’entreprise. La seule division profonde que l’opinion publique s’est permise concerne la libération des otages : est-ce une priorité absolue, ou est-ce un objectif de guerre parmi d’autres ?

Quel rôle Benjamin Netanyahu joue-t-il dans cette fracture de la société ? On voit que les manifestations pour contester sa gestion du conflit se multiplient.

Bien entendu, Benjamin Netanyahu joue un rôle clé dans cette fracture. C’est autour de son nom que se cristallisent les accusations de ne pas faire de la libération des otages une cause prioritaire. Nous devons également comprendre qu’une famille d’otages n’est pas seulement une famille à laquelle un père, un fils ou une fille a été enlevé. L’épreuve d’avoir un proche en otage s’ajoute à d’autres malheurs, celui d’avoir perdu des proches dans les massacres du 7 octobre, souvent aussi celui d’avoir perdu son logement. C’est aussi pourquoi l’opinion publique israélienne est si touchée et préoccupée par la situation de ces familles.

Après le 7 octobre, pendant de longs mois, les associations de familles d’otages ont refusé de se joindre aux autres mouvements d’opposition au Premier ministre, notamment contre la réforme du système judiciaire menée par son gouvernement. Leur seul mot d’ordre étant la libération des otages, ils n’ont pas souhaité se mobiliser pour une autre cause.

Mais, après la découverte, le 31 août, des corps de six otages abattus par le Hamas, ces associations familiales ont décidé de se joindre aux cortèges de manifestations en opposition au gouvernement de Netanyahu. Cette découverte a suscité un grand émoi dans la société israélienne, qui affirme que ces otages auraient pu être sauvés grâce à des négociations.

Sur le plan international, les appels au cessez-le-feu se multiplient, Joe Biden a récemment fait pression sur Benjamin Netanyahu pour qu’il revienne à la table des négociations. En ignorant ces appels, le premier ministre ne risque-t-il pas de se retrouver isolé sur la scène internationale ?

Quoi qu’on pense de Benjamin Netanyahu, on observe à ce niveau qu’il possède une certaine habileté, une capacité à tenir tête à Joe Biden pour imposer ses propres conditions dans les négociations, sans rompre avec les États-Unis dont le soutien est primordial.

Benyamin Netanyahou joue beaucoup sur cette ligne de crête, il prend le risque de l’isolement, mais c’est un risque calculé. Il estime en tout cas que négocier aujourd’hui un cessez-le-feu serait prématuré, car cela donnerait encore trop de pouvoir au Hamas. Il attend aussi sûrement les élections américaines, qui pourraient changer la face de ces négociations.

 
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