« Que les annonceurs obligent les plateformes à certifier leurs chiffres »

« Que les annonceurs obligent les plateformes à certifier leurs chiffres »
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Pouvez-vous rappeler brièvement à nos lecteurs l’histoire et le rôle de l’ACPM ?

STÉPHANE BODIER. Au lendemain de la Première Guerre mondiale, plusieurs grandes entreprises américaines, dont certaines sont encore présentes aujourd’hui comme Ford et Coca-Cola, souhaitent développer leurs activités en France. A cette époque, il n’existait que deux principaux moyens de communication : les panneaux publicitaires et la presse. A Paris et sa région, dix quotidiens étaient en circulation, dont quatre revendiquaient un tirage dépassant le million d’exemplaires. De grands annonceurs américains, déjà familiers avec le marketing et la publicité, ont rencontré les rédacteurs de ces journaux qui exagéraient souvent leurs chiffres de diffusion. Les annonceurs exigent la preuve de la véracité de leurs chiffres : l’OJT (plus tard l’OJD) est ainsi née. En 2015, l’Alliance des personnalités de la presse et des médias (ACPM) est née de la fusion de l’OJD et de la SAS AudiPresse, pour former une entité unifiée chargée de certifier et de mesurer l’industrie des médias. Depuis sa création, l’ACPM a élargi son champ d’action, depuis la certification de la distribution des médias imprimés, l’analyse du lectorat, jusqu’aux statistiques sur les sites Web et les applications, le streaming radio numérique, et grâce à des mesures plus récentes telles que la certification des podcasts et des expositions sur écran numérique (DOOH). Les données fournies par la CMPA jouent un rôle crucial dans un marché médiatique concurrentiel. Ils offrent un niveau de fiabilité et de crédibilité et permettent aux éditeurs et aux annonceurs de prendre des décisions éclairées.

L’Observatoire ACPM 2024 a lieu ce 25 avril. Que pouvez-vous déjà révéler ?

Pour commencer, parmi les 1 900 membres liés à notre diversification dans la mesure d’audience des sites, des applications, de l’affichage dynamique, des web radios et des podcasts, l’ACPM contrôle 600 titres de presse. Selon l’Observatoire, 95 % des Français lisent la presse au moins une fois par mois, et pour la première fois, le nombre de lecteurs de la presse numérique dépasse celui de la presse écrite. La transformation numérique de la presse a commencé il y a une vingtaine d’années. C’est le premier média à avoir adopté tous les canaux numériques. De nombreux éditeurs commencent à créer des newsletters, des vidéos et développent leur présence sur les réseaux sociaux. Le terme « omnicanal » est en vogue dans le secteur. Les audiences numériques continuent de croître : la première vague S1 2024 de notre étude OneNext, publiée le 23 avril, indique que 82 % des Français lisent la presse en ligne, principalement sur mobile (plus de 50 % des sondés). Dans l’ordre, les Français privilégient la lecture sur mobile, puis sur papier, sur ordinateur et enfin sur tablette. La presse est devenue un média numérique, même si le format papier fait son bonheur pour certaines familles [en particulier pour la presse quotidienne régionale (PQR)].

L’ACPM a enrichi ses activités en mesurant la fréquentation des web radios en 2013, du DOOH en 2017 et, en 2020, des podcasts. Pourquoi étiez-vous sur ce terrain ?

Il y a une vingtaine d’années, nous avons acquis une expertise dans l’utilisation des données first party en contrôlant le trafic des sites web, notamment via la gestion des logs. Les journaux fournissent des informations telles que l’adresse IP et l’heure de connexion d’un utilisateur. À la CMPA, nous avons élaboré des normes pour garantir que tous nos associés certifiés présentent et classent les bûches de la même manière. Nous sommes en mesure de collecter ces journaux à grande échelle à l’aide de serveurs et d’outils qui traitent des milliards de points de données. Nous sommes également en mesure de vérifier leur qualité afin de détecter d’éventuelles fraudes ou utilisations de bots. Avec l’évolution des médias, notamment l’émergence de l’audio numérique et de l’affichage numérique, il est essentiel pour ces nouveaux acteurs de présenter des données certifiées. Forts de notre expertise en analyse de logs, nous avons pu étendre notre contrôle à ceux-ci. Cette évolution s’est produite naturellement. Depuis avril 2022, la CNIL nous a reconnu comme sous-traitant de données personnelles conformément à ses lignes directrices et au RGPD. Il est important de rappeler que toutes les données traitées sont anonymisées, sécurisées et que notre traitement est transparent pour nos membres, limité dans le temps, pour des finalités définies et approuvées. Nous imposons ce même cadre rigoureux à nos développements et à nos sous-traitants.

Les données de One Next Global sont combinées avec celles de l’étude Global Internet de Médiamétrie. Que pouvez-vous dire de cette collaboration ?

L’ACPM travaille avec Médiamétrie depuis une quinzaine d’années. Yannick Carriou, PDG de Médiamétrie, comprend bien notre complémentarité : l’ACPM met à disposition de Médiamétrie des logs contrôlés et certifiés. Je pense qu’à l’avenir, il faudra travailler davantage ensemble, notamment parce qu’un certain nombre de plateformes ne sont pas encore mesurées, que ce soit Netflix, YouTube, Meta, Amazon… Et ce, alors que tous les médias nationaux sont contrôlés. Les annonceurs devraient exiger des plateformes qu’elles certifient leurs chiffres avant d’y investir. Alors que les Européens ont une culture de transparence, ces nouvelles plateformes arrivent sur le continent et disent aux annonceurs : « Je suis coté en bourse et je me mesure ». Car c’est là le paradoxe : il y a cent ans, les annonceurs américains exigeaient que la presse française certifie sa distribution. Ce serait une juste récompense pour ce que les annonceurs demandent à toutes les plateformes, qu’elles soient américaines ou chinoises, de faire de même.

 
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