Le président français Emmanuel Macron a nommé Michel Barnier au poste de Premier ministre, près de deux mois après que les élections anticipées en France se soient soldées par une impasse politique.
M. Barnier, 73 ans, est l'ancien négociateur en chef de l'UE pour le Brexit et a dirigé les négociations avec le gouvernement britannique entre 2016 et 2019.
Vétéran du parti de droite Les Républicains (LR), il a mené une longue carrière politique et occupé divers postes de haut rang, tant en France qu'au sein de l'UE.
Il lui faudra désormais former un gouvernement capable de survivre à une Assemblée nationale divisée en trois grands blocs politiques, aucun n'étant en mesure de former une majorité claire.
Connu en France sous le nom de Monsieur BrexitM. Barnier sera le Premier ministre français le plus âgé depuis l'instauration de la Ve République en 1958.
Il y a trois ans, il avait tenté, sans succès, de devenir le candidat de son parti pour affronter le président Macron à l'élection présidentielle française. Il avait déclaré vouloir limiter et contrôler l'immigration.
Il devrait succéder à Gabriel Attal, le plus jeune Premier ministre de l'histoire française, que le président Macron a nommé Premier ministre pour la première fois début 2024 et qui est resté en poste comme ministre par intérim depuis juillet.
Il a fallu 60 jours au président Macron pour se décider sur le choix d'un Premier ministre, après avoir appelé à une « trêve politique » pendant les Jeux olympiques de Paris.
Mais M. Barnier aura besoin de toutes ses compétences politiques pour traverser les semaines à venir, les socialistes de centre-gauche prévoyant déjà de contester sa nomination par un vote de confiance.
La présidence de M. Macron dure jusqu'en 2027. Normalement, le gouvernement est issu du parti du président, car ils sont élus à quelques semaines d'intervalle.
Mais celui qui s'est autoproclamé « le maître des horloges » a changé la donne lorsqu'il a convoqué des élections anticipées en juin et que ses centristes sont arrivés en deuxième position derrière le Nouveau Front populaire de gauche.
Le président Macron a interviewé plusieurs candidats potentiels au poste de Premier ministre, mais sa tâche a été compliquée par la nécessité de trouver un nom qui pourrait survivre à un vote de censure lors de sa première apparition à l'Assemblée nationale.
L'Elysée a déclaré qu'en nommant M. Barnier, le président avait assuré que le Premier ministre et le futur gouvernement offriraient la plus grande stabilité possible et la plus large unité possible.
M. Barnier a pour mission de former un gouvernement rassembleur « au service du pays et du peuple français », souligne la présidence.
Le défi immédiat de M. Barnier sera de piloter le budget 2025 de la France et il a jusqu'au 1er octobre pour soumettre un projet de plan à l'Assemblée nationale.
Gabriel Attal a déjà travaillé cet été sur un budget provisoire, mais le faire passer devant les députés nécessitera toutes les compétences politiques de M. Barnier.
Sa nomination a déjà provoqué un mécontentement au sein du Nouveau Front populaire (NFP), dont le propre candidat au poste de Premier ministre a été rejeté par le président.
Jean-Luc Mélenchon, le chef de file de la France insoumise (LFI) – le plus grand des quatre partis qui composent le NFP – a déclaré que l'élection avait été « volée au peuple français ».
Au lieu de provenir de l'alliance arrivée en tête le 7 juillet, il s'est plaint que le Premier ministre serait « un membre d'un parti arrivé en dernier », en référence aux Républicains.
“Il s'agit désormais essentiellement d'un gouvernement Macron-Le Pen”, a déclaré M. Mélenchon, en référence au chef du Rassemblement national (RN) d'extrême droite.
Il a ensuite appelé les gens à se joindre à une manifestation de gauche contre la décision de M. Macron prévue samedi.
Pour survivre à un vote de confiance, M. Barnier devra convaincre 289 députés sur les 577 que compte l'Assemblée nationale de soutenir son gouvernement.
Marine Le Pen a clairement indiqué que son parti ne participerait pas à son administration, mais elle a déclaré qu'il semblait au moins répondre aux exigences initiales du Rassemblement national, en tant que personne qui « respecte les différentes forces politiques ».
Jordan Bardella, 28 ans, président du RN, a déclaré que M. Barnier serait jugé sur ses paroles, ses actes et ses décisions concernant le prochain budget de la France, qui doit être présenté au Parlement avant le 1er octobre.
Il a cité le coût de la vie, la sécurité et l'immigration comme des urgences majeures pour les Français, ajoutant que « nous gardons en réserve tous les moyens d'action politique si ce n'est pas le cas dans les semaines à venir ».
Barnier devrait bénéficier du soutien de l'alliance centriste du président, Ensemble. Yaël Braun-Pivet, présidente de l'Assemblée nationale et alliée de Macron, a félicité le candidat et a déclaré que les députés devront désormais jouer pleinement leur rôle : « Notre mandat nous y oblige. »
L'ancien négociateur du Brexit n'est apparu comme candidat potentiel que mercredi après-midi.
Jusqu'alors, deux autres hommes politiques expérimentés avaient été présentés comme les candidats les plus probables : l'ancien Premier ministre socialiste Bernard Cazeneuve et le chef de file régional des Républicains Xavier Bertrand. Mais il est vite apparu qu'aucun des deux n'aurait survécu à un vote de confiance.
C'est ainsi que M. Macron a justifié son refus de la candidate de gauche, Lucie Castets, une haute fonctionnaire de Paris qui, selon lui, aurait échoué à la première haie.
Le président a été largement critiqué pour avoir déclenché la crise politique en France.
Un récent sondage d’opinion suggère que 51 % des électeurs français pensent que le président devrait démissionner.
Il y a peu de chances que cela se produise, mais l'homme que M. Macron avait choisi comme premier Premier ministre en 2017, Édouard Philippe, a désormais proposé sa candidature trois ans plus tôt pour la prochaine élection présidentielle.