La Chambre des représentants des États-Unis a voté ce samedi 20 avril un programme d’aide militaire à l’Ukraine d’un montant de près de 61 milliards de dollars. Cela aurait dû être fait depuis des mois, souligne Elizabeth Sheppard-Sellam, directrice des relations internationales et politiques à l’université de Tours. Une fois de plus, la division des élus républicains est apparue au grand jour.
Peut-on parler d’un vote historique ?
En soi, non : ce vote aurait dû avoir lieu depuis plusieurs mois déjà. Ce qui est historique, c’est le chaos qui l’a précédé à la Chambre des Représentants. Avec une incroyable division des élus républicains imputable à Donald Trump. Sur les quatre textes votés, celui relatif à l’aide à Israël n’a pas été débattu. Mais ceux que nous appelons les MAGA (Pour Rendre sa grandeur à l’Amérique) a tout fait pour torpiller le vote, en multipliant des amendements qui n’y étaient pour rien, notamment sur l’immigration aux Etats-Unis.
Comment expliquer le revirement du leader républicain à la Chambre, Mike Johnson, farouchement opposé au vote, puis soudain en faveur ?
Il a déclaré qu’il « ne pouvait plus jouer à des jeux politiques » parce qu’il refusait d’envoyer des soldats américains en Europe si l’Ukraine perdait la guerre. Avant d’exprimer cette position, qui a été suivie par la moitié de ses troupes, je pense qu’il a dû négocier avec les démocrates pour avoir leur soutien, au cas où son camp voterait pour le destituer. Et puis, il ne faut pas oublier que Trump lui-même l’a publiquement soutenu, affirmant qu’il faisait « un très bon travail ».
« Le Parti républicain est littéralement corrompu par les pro-russes »
Le Parti républicain peut-il recoller les morceaux ?
Mike Johnson a déclaré qu’il était « un républicain à la Reagan », ajoutant qu’il croyait en « la paix par la force ». Il est le représentant de la ligne historique du parti antisoviétique. Mais c’est de moins en moins majoritaire. Le Parti républicain est littéralement corrompu par les pro-russes. Sa représentante la plus éminente, Marjorie Taylor-Greene, une élue géorgienne aux théories racistes et conspirationnistes, a également voté contre la suspension des relations commerciales avec la Russie. Sans surprise, c’est elle qui a la première réclamé le limogeage de Mike Johnson.
Le vote en faveur de l’aide à l’Ukraine est-il une victoire pour Joe Biden ?
Je ne le pense pas, du moins pas dans la perspective de l’élection présidentielle ; peut-être que cela lui permettra de grappiller quelques points au sein de son propre parti. L’Ukraine n’est pas vraiment un problème pour les Américains, à moins qu’il ne soit évidemment nécessaire d’envoyer les garçons; très peu devraient être capables de le localiser sur une carte. D’une manière générale, la politique étrangère ne les passionne pas, sauf peut-être ce qui se passe en Israël. Les Américains votent avant tout sur des questions internes et économiques.
