“Erdogan viole le droit international et les frontières en toute impunité, sans que personne ne dise rien”, prévient le porte-parole des forces kurdes au Rojava

“Erdogan viole le droit international et les frontières en toute impunité, sans que personne ne dise rien”, prévient le porte-parole des forces kurdes au Rojava
Descriptive text here

La Turquie annonce qu’elle lancera, après les élections locales du 31 mars et la fin du Ramadan le 10 avril, une nouvelle et vaste offensive dans la région autonome kurde d’Irak. La cible d’Ankara : les positions du PKK dans les montagnes du Kurdistan irakien, déjà ciblées depuis des mois par les raids aériens turcs.

Nous sommes sur le point de boucler la boucle. Nous espérons que cet été nous aurons définitivement résolu la question de nos frontières avec l’Irak. » claironne le président turc Recep Tayyip Erdogan, réaffirmant également l’objectif de prendre le contrôle d’un couloir de 30 à 40 kilomètres au nord de la Syrie.

Le commandant Nouri Mahmoud, porte-parole des YPG, les Unités de protection du peuple qui ont libéré le nord-est syrien des jihadistes de Daesh, décrypte cette stratégie expansionniste. Entretien.

La Turquie a l’intention d’envahir une partie du Kurdistan irakien d’ici l’été. Quelles seraient les conséquences pour vous, au Rojava, alors que l’armée d’Ankara occupe déjà une partie du nord-est de la Syrie ?

Erdogan affirme que cette opération à grande échelle pourrait s’étendre au Kurdistan irakien jusqu’à la ville de Sulaymaniyah. Au Rojava, chaque jour, des drones mènent des opérations ciblées, tuant des combattants engagés dans la résistance à l’occupant turc et à ses supplétifs islamistes et jihadistes.

Quel est l’objectif de ces opérations annoncées ?

Tout porte à croire que cette stratégie expansionniste, au Rojava comme dans la région autonome kurde d’Irak, vise, à l’échelle du Moyen-Orient, à repousser la région dans un passé lointain, avec le rêve d’un retour aux frontières de « Misak-ı Millî», le pacte national hérité de l’Empire ottoman. Le projet néo-ottoman d’Erdogan, à long terme, est l’expansion de son territoire national au prix, si nécessaire, du rétablissement des anciennes frontières de l’Empire ottoman.

Quelle contre-offensive pouvez-vous développer dans la marge de manœuvre étroite dont vous disposez aujourd’hui ?

Erdogan a tous les pouvoirs entre ses mains. Dans son pays, il peut compter sur le soutien des nationalistes, des islamistes et des conservateurs. L’opposition en Turquie est très affaiblie. De l’autre, il bénéficie du soutien des salafistes, des jihadistes qui sont sur nos terres mais aussi de ceux qu’il héberge et incube en Turquie.

Il a bâti autour de lui une incroyable armée de forces obscures prêtes à agir. Alors que nous, qui représentons 30 % du territoire et de la population en Syrie, ne sommes pas reconnus par les instances internationales.

Cependant, Erdogan continue de mener des opérations contraires aux conventions internationales. Il viole les frontières en toute impunité, sans que personne ne dise rien. Il a carte blanche. C’est pour nous un sujet de grande préoccupation : il agit comme bon lui semble, sans que personne ne dise rien. Chacun défend ses intérêts au détriment des gens qui résistent, qui ont mené une révolution.

Notre principale force, face à ces attaques, face à ces opérations imminentes, c’est le soutien de notre peuple, de toutes les communautés du Rojava, du nord-est de la Syrie, Kurdes et non-Kurdes, qui sont derrière nous, à nos côtés. . Sans ce soutien populaire, nous ne pourrions pas tenir le coup.

Notre peuple résiste héroïquement à l’embargo qui nous est imposé. Nous sommes étouffés de tous côtés. Et ce sont nos peuples qui se gèrent eux-mêmes, qui organisent la vie quotidienne, la réponse aux besoins fondamentaux. En tant que branche militaire, nous résistons aux envahisseurs. Mais en tant que soldats, seuls, nous n’arriverions à rien sans ce soutien civil, sans cette organisation sociale mise en place et gérée directement par notre peuple.

Constatez-vous un regain d’activisme de la part des groupes islamistes armés ?

C’est un risque important, car ils n’ont jamais été complètement éradiqués. Nous avons entre 10 000 et 15 000 jihadistes de Daesh dans nos prisons et 50 000 membres de leurs familles dans le camp d’Al-Hol, avec des enfants. Leurs idées, leurs obsessions réactionnaires y sont entretenues, diffusées.

Mais, actuellement, ce qui devient dangereux, c’est qu’ils commencent à bouger petit à petit, sous le regard d’une communauté internationale qui reste passive, silencieuse. Il n’y a pas de réelle réaction. Pour nous, la lutte contre les djihadistes n’a jamais cessé.

Vous évoquez le camp d’Al-Hol et les jihadistes prisonniers entre vos mains. Pourquoi devraient-ils être votre responsabilité ?

En réalité, il ne s’agit pas d’un problème kurde-kurde, d’un problème du nord-est de la Syrie, du Rojava. Il s’agit d’un problème international. Des centaines de personnes dans nos rangs sont obligées de prendre soin de ces prisonniers, de ces familles. C’est un énorme fardeau financier. Nous ne pouvons pas continuer ainsi. Ces gens doivent être jugés.

Nous ne pouvons pas détenir indéfiniment des individus, quels qu’ils soient, sans procès, sans condamnation. Et il faut essayer de comprendre ce qui les a conduits dans cette voie, pour trouver des réponses durables. Cela ne peut pas être la seule responsabilité des Kurdes. La communauté internationale doit reconnaître l’administration autonome du nord-est de la Syrie, le Rojava. Et elle doit jouer son rôle auprès de ces familles, de ces prisonniers.

Les pays occidentaux ont abandonné militairement les Kurdes et leurs alliés au Rojava. Quelles leçons en tirez-vous ?

L’Occident et l’Europe considèrent la Turquie comme un allié stratégique. C’est le cas. Ils voient Erdogan comme un allié, car il étouffe son pays et réduit au silence l’opposition. En Turquie, Erdogan contrôle tout. S’il n’était plus là, l’opposition pourrait respirer, elle représenterait un allié bien plus digne, avec des valeurs partagées.

Il y a une posture de conciliation, nous préférons fermer les yeux sur les actions d’Erdogan. Alors qu’il constitue un danger, non seulement pour nous, mais aussi, à long terme, pour ses « alliés » européens et occidentaux.


Nous n’avons pas pu confirmer votre inscription.


Votre inscription est confirmée.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV Le prix de l’excellent casque JBL Tour One M2 tombe à moins de 200 €
NEXT DIRECT. La SIG Strasbourg au coude à coude avec la JDA Dijon (50-49) dans le troisième quart-temps de la finale de la Coupe de France de basket