L’hypothèse est loin de faire l’unanimité. « Dans nos simulations, le manteau de Théia et celui de la Terre se mélangeaient plutôt bien » témoigne le planétologue Miki Nakajima de l’université de Rochester à New York. Ces dernières années, ses travaux se sont concentrés sur l’évolution de la structure interne des planètes rocheuses de notre système solaire.
“Je ne pense pas que le matériau de l’impacteur se serait complètement mélangé, mais le degré d’homogénéisation est sous-estimé dans cette étude”, ajoute le géodynamicien Maxim Ballmer de l’University College de Londres. Sans être associé à l’étude récemment publiée dans la revue NatureBallmer a collaboré avec Deng sur une étude connexe il y a quelques années.
Les scientifiques reconnaissent que ces régions à plus forte densité occupent depuis longtemps le manteau terrestre, mais leur âge et leur origine exactes font encore débat.
“Il existe une explication alternative à la formation de ces superpanaches”, ajoute Ballmer. Il évoque notamment une théorie selon laquelle le manteau solide que nous connaissons aujourd’hui était autrefois une épaisse couche de magma en fusion, avant de se différencier pour former les couches actuelles. La couche supérieure s’est solidifiée rapidement, rayonnant sa chaleur dans l’espace. La couche inférieure s’est solidifiée plus lentement et a donc eu le temps de former des régions plus ou moins denses, selon certaines études.
La prochaine étape sera de comparer les signatures chimiques des matériaux présents dans ces superpanaches et sur la Lune, composée en grande partie de Théia. “S’ils ont la même empreinte géochimique, ils doivent provenir de la même planète”, explique Yuan.
Cependant, prélever de nouveaux échantillons est plus facile à dire qu’à faire. Il est impossible de forer la Terre jusqu’à obtenir des superpanaches. Cela dit, comme nous l’explique Yuan, il arrive que des roches du manteau inférieur remontent à la surface, c’est notamment le cas des basaltes des îles océaniques.
La surface de la Lune est exposée à l’érosion spatiale depuis des milliards d’années et risque d’être contaminée par des météorites ; les chercheurs souhaiteraient donc également analyser des échantillons du manteau lunaire. Ceux dont ils disposent à ce jour proviennent majoritairement de la surface.
Pour obtenir de nouveaux fragments de la Lune, il faudra attendre une future mission de retour d’échantillons à son pôle Sud, où le manteau est plus exposé et accessible. D’ici là, les scientifiques continueront d’affiner leurs modèles pour tenter d’identifier le spectre de Theia.
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