Alors que l’humanité s’adapte à des défis majeurs tels que les pandémies, les crises climatiques et les progrès rapides de l’intelligence artificielle, une nouvelle menace pourrait émerger dans un domaine encore peu exploré : celui des « formes de vie miroir ». « . Un collectif de 40 scientifiques de renommée internationale met en garde contre les risques posés par ces créations biologiques synthétiques.
Que sont les bactéries miroirs ?
Les bactéries miroirs sont un concept fascinant mais potentiellement dangereux. Les molécules naturelles présentes dans tous les êtres vivants ont une configuration asymétrique, appelée chiralité. Cette asymétrie s’apparente à la différence entre une main gauche et une main droite : elles sont similaires mais non superposables.
Des chercheurs en biologie synthétique ont démontré qu’il était possible de fabriquer des « molécules miroirs ». Ces versions inversées ne peuvent pas interagir avec les systèmes biologiques naturels. En théorie, cela ouvre des perspectives prometteuses, notamment dans le développement de médicaments plus stables ou de nouvelles applications industrielles.
Cependant, la création d’organismes entiers constitués de ces molécules, comme les bactéries miroirs, suscite de sérieuses inquiétudes.
Un risque pour les systèmes biologiques existants
Les bactéries miroirs pourraient échapper à tous les mécanismes de contrôle naturels. Notre système immunitaire, conçu pour reconnaître et combattre les agents pathogènes traditionnels, serait incapable de les identifier et de les éliminer.
“Le monde vivant actuel ne dispose d’aucun outil pour neutraliser ces formes de vie étrangères”, explique Oleg Melnyk, chercheur au CNRS. “Une bactérie miroir introduite dans l’environnement pourrait avoir des conséquences catastrophiques pour les êtres vivants”, ajoute-t-il.
Pourquoi créer ces formes de vie ?
Malgré les dangers, certains chercheurs envisagent des applications prometteuses :
- Santé : Les protéines miroirs pourraient permettre de concevoir des traitements médicamenteux résistants à la dégradation naturelle.
- Parfumerie : Les molécules miroirs, dotées de propriétés olfactives uniques, pourraient révolutionner l’industrie des arômes.
- Recherche fondamentale : Comprendre pourquoi la vie sur Terre a choisi une certaine chiralité plutôt qu’une autre pourrait éclairer les mystères de l’évolution.
Malheureusement, ces bénéfices ne semblent pas justifier les risques colossaux liés à la prolifération d’organismes de synthèse incontrôlables.
Une sonnette d’alarme précoce
Selon Gregory Winter, prix Nobel de chimie 2018, le développement d’une bactérie miroir fonctionnelle pourrait être une réalité d’ici une décennie. Même si ce délai paraît ambitieux, les progrès rapides des biotechnologies rendent cette hypothèse plausible.
« Il faut débattre des enjeux éthiques et des risques avant que ces organismes ne deviennent une réalité », précise Yasmine Belkaid, immunologiste et directrice de l’Institut Pasteur.
Des solutions pour prévenir les risques
Face à ce danger potentiel, plusieurs mesures sont proposées :
- Des réglementations strictes : Imposer des restrictions internationales sur la création de formes de vie miroir.
- Transparence scientifique : Inciter les chercheurs à partager leurs travaux pour mieux identifier les risques.
- Sensibilisation du public : Informer les citoyens des enjeux liés à ces nouvelles technologies.
Conclusion : un avenir à surveiller de près
La création de bactéries miroirs illustre les dilemmes complexes posés par les progrès scientifiques. Même si certaines applications pourraient bénéficier à la société, les risques pour l’écosystème dans son ensemble restent immenses. Il est crucial que les décideurs politiques, les scientifiques et la société civile travaillent ensemble pour anticiper les conséquences et éviter tout piège irréparable.
