La combustion des bâtons d’encens dans une église arménienne, la cuisson du riz au lait assaisonné à la cannelle, le sillage iodé de la presqu’île de Crozon… Pour Hirac Gurden, « les odeurs sont des liens émotionnels entre le passé et le présent « . Grâce aux pouvoirs extraordinaires de l’odorat, toute la force du lien sensoriel est réveillée, et ce, in utero. Un fœtus de 6 mois sent le liquide amniotique ! Et lorsqu’on demande au scientifique ce qu’est une odeur, sa réponse est simple : « L’odeur c’est la vie ! »
EN VUE
L’odorat semble parfois être considéré comme le parent pauvre des sens. Or, nous sommes équipés d’environ quatre cents types de récepteurs, des microcapteurs biochimiques qui réagissent aux odeurs. Ils fonctionnent avec des combinaisons infinies pour détecter tout ce qui nous entoure. La nature étant bien conçue, tous les neurones olfactifs se renouvellent tout au long de la vie. Hirac Gurden explique : « Le système sensoriel du cerveau spécialisé dans le traitement des odeurs construit une représentation mentale de ce que nous sentons. De ce fait, notre mémoire sensorielle nous permet d’adapter notre comportement à notre environnement, en s’appuyant sur les expériences passées. Par exemple, une forte odeur de brûlé nous alerte de la présence d’un danger et nous fait réagir en conséquence. Mais celui modéré dégagé par un barbecue n’induit pas le même effet comportemental. Il existe différents types de mémoire. L’un d’eux stocke des informations à court terme, qui seront rapidement effacées, tandis qu’un autre préservera dans le temps des souvenirs qui resteront bien stockés dans notre cerveau. Dans ce cadre, les informations peuvent être organisées sous forme d’épisodes. C’est à cette famille de mémoire, dite épisodique, qu’appartient la madeleine de Proust. Ce type de mémoire est stocké dans les synapses et les neurones qui font partie des structures cérébrales en souffrance. »
QUAND L’ODEUR PARTIT
En France, environ 6,5 millions de personnes souffrent d’un trouble de l’odorat plus ou moins sévère. En cas de perte totale, on parle d’anosmie. Elle peut apparaître après un épisode de Covid-19, une sinusite chronique, un rhume ou à cause de polypes nasaux. Elle peut également être provoquée par certaines pathologies neurologiques, comme les maladies d’Alzheimer et de Parkinson. Il est alors judicieux de recourir à des protocoles de rééducation utilisant une stimulation olfactive quotidienne, pendant une durée minimale de douze semaines. Protocoles développés par Hirac Gurden, basés sur les travaux de recherche du professeur Thomas Hummel, expert de renommée mondiale en olfaction. Pour cela, il suffit de respirer les huiles essentielles de citron, de clou de girofle, de rose ou de géranium rosat et d’eucalyptus. Parfums à compléter avec de la menthe poivrée et des grains de café. Disponible gratuitement sur www.anosmie.org
Hirac Gurden est l’auteur de Feel. Comment les odeurs agissent sur notre cerveau (Les Arènes)
