le marché du magazine en 2024

le marché du magazine en 2024
le marché du magazine en 2024

Comment se porte le marché du magazine ? A l’aube du 34e Salon du magazine, les 11, 12 et 13 octobre à la Halle des Blancs-Manteaux à Paris (IVe arrondissement), ses acteurs s’accordent généralement sur leur difficulté à toucher le lectorat. « Il faut chercher le lecteur aujourd’hui, avant que ce ne soit l’inverse »confirme Aurélie Juliadirecteur de The Revue des Deux Mondes.

Il est vrai que le secteur est constitué en grande partie de titres artisanaux et personnels appartenant au domaine universitaire. Il existe également des revues historiques bénéficiant d’une meilleure diffusion, et d’autres soutenues par des maisons d’édition. Récemment les mooks ont également participé à la recomposition de l’offre.

Garder l’équilibre

L’association Entretiensqui organise le Salon de la revue, compte au moins 2 500 titres francophones actuels dans son annuaire en ligne continuellement mis à jour. Créée en 1986, elle informe et accueille les magazines sur le marché par un travail de veille permanent.

« Ce sont des petites structures peu impactées par les évolutions du marché compte tenu de leur tailleanalyser Yannick Keravecdirecteur deEntretiens. C’est un mouvement continu du marché, une énergie perpétuelle. Les revues recherchent un équilibre et ne s’appuient pas sur des apports extérieurs, c’est une économie de résistance. En prenant du poids, on a peur de perdre le contrôle. »

Leur ambition n’est pas commerciale mais plus artistique, épanouissante et tournée vers la création. Tous les auteurs ne sont pas rémunérés, ce qui peut parfois faire de leurs contributions un passe-temps et un besoin de partage.

Faibles tirages

« Les revues jouent depuis longtemps un rôle dans la recherche, ce sont des laboratoires. Les auteurs y ont aussi fait leurs dents, c’est l’antichambre de l’édition », dit Mathieu Mulceydirecteur de la publication de L’amorceun magazine sur l’antispécisme et pour la cause animale rattaché à la maison Eliott dont il est le fondateur. Déjà existant en numérique, il a publié son premier numéro papier au printemps 2024 comprenant un article de Pierre ChanteurPhilosophe australien internationalement reconnu sur la question animale.

Avec un tirage moyen compris entre 800 et 1 000 exemplaires, leur premier numéro s’est vendu à ce jour à plus de 500 exemplaires. « L’objectif financier n’est pas de perdre de l’argent et de rester en équilibre. La revue a davantage une vocation éditoriale et intellectuelle. je n’ai pas compté prendre une retraite précipitée grâce à cet avis »il rit.

Entretiens compte une soixantaine de nouveaux titres par an. À l’inverse, il est difficile de suivre ceux qui arrêtent de publier, car de nombreuses revues ont des rythmes de publication irréguliers, voire aléatoires.

Difficile de classer

En termes de format, le papier prend le pas sur le numérique après l’essor précoce de l’informatique. Certains magazines comme L’amorce deviennent des hybrides. Une hybridité qui se retrouve aussi dans les thématiques abordées et rend les revues difficilement compréhensibles par les libraires, qui se demandent souvent comment les classer. «Ils sont très réticents à l’idée d’avoircritique Mathieu Mulcey. Cela ajoute de la difficulté à être présent et on voit une tendance, même si le premier numéro s’est vendu raisonnablement, je m’étonne de la réticence des libraires. »

Rayon revue littéraire chez Gibert Joseph – Photo ANTOINE MASSET

Chez Gibert Joseph, boulevard Saint-Michel (VIe arrondissement), première librairie de France en termes de chiffre d’affaires, les magazines sont classés par genre sur différents étages. Les littéraires au premier, les philosophiques au 3èmee et les scientifiques à 5e Par exemple. La librairie reçoit 10 magazines par mois dans la section littéraire. Placés au pied d’un présentoir, ils sont peu mis en valeur.

At the Compagnie bookstore, rue des Écoles (Paris Ve arrondissement), un couloir entier est dédié exclusivement aux magazines, quel que soit leur genre. « C’est un rayon qui ne fait que diminuer. Nous prenons 20 exemplaires pour les gros titres et un ou deux pour les plus modestes comme ceux sur la poésie »explique un vendeur.

Section revues scientifiques chez Gibert Joseph – Photo ANTOINE MASSET

Autre obstacle à la pérennité de certaines revues : la diffusion et la distribution. « C’est très compliqué de s’affranchir de la proximité géographique dans les villes moyennes et petitesprésente Yannick Keravec. Ils doivent faire la tournée des libraires et faire leurs stocks chez eux. Il existe de nombreux processus commerciaux complexes à développer, tels que les frais de port et d’expédition. »

Éclairer ou être éclairé

On retrouve également cette hybridité dans The Revue des Deux Mondescréé en 1829. Initialement dédié aux voyages, il s’adresse désormais à des lecteurs connaisseurs de géopolitique et de littérature. Avec aujourd’hui neuf parutions par an, 40 000 abonnés, 5 000 ventes par numéro pour un tirage de 12 000 exemplaires, ses finances restent stables. « Nous essayons d’avoir un budget équilibré. Il faut savoir que tous nos auteurs sont payés”proclaims Aurélie Julia.

Autrefois, de grands noms de la littérature signaient les pages du magazine comme Victor Hugo, Honoré de Balzac ou même Charles Baudelaire et son Fleurs du mal en 1855. The Revue des Deux Mondes continue d’accueillir des écrivains comme Raphaël Doanou pour converser avec d’autres comme Kamel Daoud pour son roman Houris (Gallimard), sélectionné dans plusieurs grands prix.

Aurélie Julia déplore néanmoins un manque de visibilité de la part des médias pour le monde des magazines en général. « Nous n’avons plus assez de soutien. Les émissions dédiées sur France Culture et Notre-Dame ont par exemple disparu. C’est rare qu’on parle de critiques dans les médias et je ne comprends pas ce décalage. »

Le monde du magazine continue néanmoins d’exister, avec un vaste écosystème tapi dans l’ombre qui ne demande qu’à être mis en lumière. Le 34e édition du Salon de la revue à Paris assumera ce rôle le temps d’un week-end.

 
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