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Marianne St-Gelais | « Là, il n’y a plus que moi »

Marianne St-Gelais se sentait mal d’être en retard d’une quinzaine de minutes. Noah, bien au chaud dans son porte-bébé, se réveille désormais toutes les deux heures. Elle voulait l’allaiter pour que papa Raphaël n’ait pas d’ennuis lors de l’entretien de jeudi matin.


Publié à 1h38

Mis à jour à 6h00

Après les photos, le soleil d’automne était encore suffisant pour que nous choisissions de nous asseoir à la terrasse d’un café d’Hochelaga-Maisonneuve, notre vieux quartier. Avant même de pouvoir s’asseoir, elle croise Sébastien Cros, son ex-entraîneur qui coaché faisant ses débuts avec l’équipe canadienne à l’âge de 17 ans.

«Quand Marianne est arrivée, nous négociions un entraînement», a déclaré celui qui est entraîneur-chef adjoint de l’équipe canadienne. C’est le programme. “Oh non, je ne fais pas ça.” OK, parlons. Nous avons tout négocié, tout, tout.

— J’étais le seul de ses 14 athlètes à négocier, a ajouté le principal intéressé. C’était ma recette, ça me faisait peur, c’était trop.

— Après trois ans, par exemple, il ne faut pas manquer et formation », a déclaré Cros.

En 2010, St-Gelais a remporté deux médailles aux Jeux olympiques de Vancouver, dont l’argent au 500 mètres à l’occasion de son 20e anniversaire.

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PHOTO ANDRÉ PICHETTE, LA PRESSE ARCHIVES

Marianne St-Gelais a remporté deux médailles en courte piste aux Jeux olympiques de Vancouver en 2010.

Je montre ma course dans mes conférences et à chaque fois je me dis : j’ai été vraiment intense ! Je franchis la ligne d’arrivée et je ne fais que m’entendre crier !

Marianne St-Gelais

« Quand j’étais athlète, je m’en fichais, mais avec le recul, je me dis : voyons, je ne suis pas le seul à remporter une médaille ! »

Peut-être pas, mais rarement une médaille aura eu une telle résonance dans le monde sportif québécois et canadien au cours des 20 dernières années. La jeune femme de Saint-Félicien « là-là » a été instantanément adoptée par le public, une complicité qui perdure six ans après sa retraite. Mon cousin Steve, fier patrouilleur de la Mobility Squad que j’ai rencontré par hasard avant l’entrevue, l’a félicitée pour sa performance comme si elle patinait encore.

Même si ses trois podiums olympiques et plus de 100 médailles internationales parlent d’eux-mêmes, Patinage de vitesse Canada a sans doute voulu souligner son impact plus large en l’admettant dans son panthéon de la renommée samedi, en marge de la toute première étape des nouveaux Mondiaux. Circuit où elle sera analyste pour Radio-Canada.

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PHOTO BERNARD BRAULT, LA PRESSE ARCHIVES

Fortes émotions pour Marianne St-Gelais et ses coéquipières au relais 3000 m aux Jeux olympiques de 2018, alors que les Canadiennes ont finalement été disqualifiées.

Lorsqu’elle a reçu l’appel l’été dernier, Marianne St-Gelais, 34 ans, a constaté que cet hommage arrivait rapidement.

« C’est un grand honneur car nous ne comptons pas nos heures. En gros, c’était mon travail pendant des années. J’ai représenté mon pays et j’en étais fier. Vous le faites sans attendre de reconnaissance. Je me sens très choyé et je suis très heureux qu’ils aient pensé à moi. Il fallait finalement que j’apporte quelque chose au sport. »

Quitter la deuxième famille

Pour St-Gelais, cette intégration est une façon de renouer avec une famille dont elle fait partie depuis plus d’une décennie.

« Patinage de vitesse Canada est mon gang. Quand vous prenez votre retraite, votre gang se ferme, et ce n’est pas péjoratif. Voilà à quoi ressemble la performance. Ça roule. Tu pars ? Parfait, vous êtes remplacé, continuez votre vie et on passe à autre chose. Ça fait un peu mal. Ayoye, je ne suis plus là-dedans, vraiment plus, je ne suis pas du tout compté comme membre de l’équipe. Pour recevoir ceci [l’intronisation]c’est comme si tu faisais partie du gang. »

St-Gelais a connu une deuxième pause puisqu’elle a passé deux ans comme entraîneure au Centre régional canadien à l’aréna Maurice-Richard. Elle était si bonne que Cros et Marc Gagnon lui ont proposé de se joindre à eux comme entraîneur en équipe nationale.

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PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Marianne St-Gelais

Mais elle avait déjà pris la décision de revenir chez elle, au Saguenay–Lac-Saint-Jean, pour retrouver ses grands espaces, son esprit de fraternité, ses parents, ses deux sœurs et son frère.

De passage pour ainsi dire par Québec, elle a rencontré Raphaël Maheux, un ancien défenseur des Remparts, qui a participé à un camp de l’Avalanche du Colorado et qui joue aujourd’hui pour le Marquis de Jonquière, dans la Ligue du Nord. Américain, lorsqu’il ne travaille pas comme courtier hypothécaire.

« Je lui ai dit : je vais au Saguenay, je ne vais pas au Québec pour toi ! », a-t-elle raconté tandis que le principal concerné, souriant, écoutait l’interview de Noé blotti contre sa poitrine.

“Il a six ans de moins que moi, ça ne marchera pas.” Je ne veux pas de petits enfants, je suis prêt à fonder une famille. Je me suis vraiment auto-saboté, mais Raphaël est très facile à vivre. Il disait : Hé, ma fille, je ne t’ai pas demandé de m’épouser. On se verra, on passera un bon moment ensemble, on verra où ça nous mène. »

Noah est né le 9 mai, deux semaines avant la date prévue. « Un sprinteur, comme moi ! »

Marianne St-Gelais avait imaginé un scénario où Raphaël, qui connaissait le sexe grâce à l’échographie, le lui révélait en lui présentant le bébé. Finalement, elle a accouché par césarienne d’urgence (il s’était retourné avant la poussée). Les souvenirs de la mère sont donc flous.

“Heureusement qu’il y a une photo!” C’est Raphaël qui me l’a dit, mais en même temps, ses petites boules sont apparues sur le dessus ! Tout cela apporte des émotions car votre projet est chamboulé. Après ça, c’est un grand high. Vous ne le connaissez pas, vous ne le comprenez pas. Ce n’était pas l’accouchement que je souhaitais, mais c’était néanmoins un bon accouchement. »

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PHOTO ROBERT SKINNER, LA PRESSE

Marianne St-Gelais and Noé

Pour « briser un peu l’isolement et sortir de la maison », elle participe aux réunions hebdomadaires d’un groupe de mères. Lorsque Noé s’est retourné pour la première fois dos à ventre, elle a dû contenir son enthousiasme pour ne pas perturber la dynamique de la discussion, se contentant d’un SMS au papa.

« Épanouie », la nouvelle maman éprouve des émotions différentes de celles vécues dans le sport. «C’est une Source de fierté», a déclaré celle qui reprendra son travail de co-animatrice matinale à Rythme 98.3 à la fin de son congé de maternité en avril.

« Vous vous dites : Mon Dieu, j’ai fait ça. Vous l’aimez et en même temps vous avez peur. Nous avons peur parce que nous voulons qu’il ne leur arrive rien. C’est très mixte. Ce n’est pas juste : je gagne une médaille. Parce que j’étais très égoïste, très égocentrique. C’était moi, j’allais là-bas, pour y parvenir. Là, il n’y a plus que moi. »

Ce sera pour peu de temps, samedi, qu’elle sera présentée à la foule à l’aréna Maurice-Richard, qui fut sa résidence pendant 10 ans. Ce sera comme une réunion de famille pour Marianne St-Gelais, désormais immortelle.

Lions, coqs et érables à glace

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PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

William Dandjinou, champion canadien de patinage de vitesse sur courte piste

La température plus fraîche ne ment pas : ça sent le patinage de vitesse autour de l’aréna Maurice-Richard, premier théâtre du nouveau Circuit mondial de patinage de vitesse sur courte piste, de ce vendredi à dimanche. Deux membres de l’équipe néerlandaise marchaient sur un sentier du parc Maisonneuve jeudi matin, à la veille de la journée de qualification ce vendredi. Peut-être discutaient-ils du nouveau nom de leur équipe, les Lions, qui s’inscrit dans la volonté de la fédération internationale de donner de la couleur à son circuit redessiné.

Un peu plus au sud, coin Ontario et De La Salle, l’entraîneur Sébastien Cros a renoué avec son ancien coéquipier Ludovic Mathieu, adjoint du directeur technique national à la Fédération française des sports de glace. Les Français de Quentin Fercoq se feront appeler les Coqs, en espérant faire du « cocorico » comme aux Jeux de Paris.

Le champion canadien William Dandjinou, qui avait tressé ses cheveux encore afro la veille, s’est arrêté pour saluer son entraîneur et Marianne St-Gelais, soulignant que Maxime Laoun, médaillé d’or au relais aux JO 2022, et Rikki Doak, qui courra le 500 m ce vendredi, j’ai mangé un morceau à l’intérieur du café. Les « Ice Maples » sont prêts à chauffer l’évaporateur (scusez).

 
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