À pareille époque l’an dernier, Pier-Olivier Lestage tentait de guérir dans l’ombre.
Publié à 1h36
Mis à jour à 5h00
Lors du dernier match de la saison, qui n’a eu aucune incidence sur le classement, le joueur de ligne offensive a subi une déchirure de grade 3 du ligament collatéral médial au genou droit lorsqu’un joueur des Tiger-Cats de Hamilton s’est affaissé du côté de son articulation.
Malgré un travail de rééducation dur et presque désespéré, sa jambe ne s’est pas rétablie assez rapidement. Il a donc raté les séries éliminatoires et l’occasion de voir son nom gravé sur la Coupe Grey.
S’en suit une période tourmentée pour Lestage. Période durant laquelle il fut tiraillé entre l’envie de faire la fête avec ses frères d’armes et l’envie de se retirer par fierté de ne pas avoir pleinement contribué au triomphe.
Lire l’article « Pier-Olivier Lestage : celui qui n’a pas son nom sur la Coupe Grey »
Avant le dernier match de la saison en cours, disputé contre les Blue Bombers de Winnipeg au Stade Percival-Molson il y a deux semaines, Lestage espérait deux choses : gagner et surtout ne pas revivre le même cauchemar. L’équipe a perdu d’un point, mais Lestage s’en est sorti indemne.
« J’y avais peut-être un peu pensé la veille, mais le jour du match, ce n’était pas dans ma tête », a rappelé le joueur de Saint-Eustache au terme du premier entraînement de l’équipe. la semaine dernière.
Pour éviter d’être affecté ou influencé par sa malheureuse expérience, Lestage a tenté de dissiper tous les doutes de son esprit.
Je n’ai pris aucune précaution, assure Lestage. Bien sûr, j’y ai pensé, mais j’ai essayé de ne pas trop y penser, parce que c’est quand on y pense que des choses comme ça arrivent.
Pier-Olivier Lestage
Comme un funambule s’imaginant perdre l’équilibre ou un acteur se voyant oublier son texte sur scène.
À quelques jours de la finale de l’Est, le joueur vedette des Alouettes évolue sans le moindre problème physique. Il porte toujours une attelle par précaution, mais il affiche un grand sourire à l’idée de pouvoir enfin fouler la piste de danse pour le grand bal d’automne.
« C’est rare qu’on ait le temps de réfléchir à ce qui s’est passé l’année dernière. Je suis heureux d’être en santé et je suis prêt à relever n’importe quel défi et, surtout, prêt à remporter une Coupe Grey. »
Précaution et amélioration
Depuis son arrivée dans le nid, Lestage occupe un rôle clé au sein de la ligne offensive. Véritable général, l’arrière gauche s’est encore illustré cette saison en disputant les 18 matchs de son équipe.
Le titre de joueur de ligne offensive par excellence des Alouettes, déterminé par vote des représentants des médias et des membres de l’organisation, lui a également été décerné.
Selon Luc Brodeur-Jourdain, l’entraîneur responsable de la ligne offensive, la capacité de Lestage à économiser sur ses mouvements et à bouger plus intelligemment explique son succès et son impact sur la progression de l’équipe.
L’ancienne gloire des Alouettes est notamment revenue sur une conversation que lui et son héritier avaient eue à la fin de la dernière saison. « On a eu des discussions sur le niveau technique, comment positionner ses genoux dans ses blocs. »
De manière très technique, Brodeur-Jourdain explique que Lestage « avait tendance à se cambrer et à exercer une pression sur le ligament collatéral interne », réduisant ainsi la qualité de son mouvement et augmentant les risques de blessure.
P.-O. a travaillé dur pour maintenir une bonne répartition du poids sur ses jambes. Dans ses mouvements latéraux, il maintient la bonne posture. Lorsque les joueurs de ligne défensive utilisent la technique du bélier, il existe un point d’ancrage où ses ligaments sont moins sollicités que l’an dernier.
Luc Brodeur-Jourdain, coach responsible for the Alouettes offensive line
Grâce à son œil d’ancien joueur, Brodeur-Jourdain comprend facilement pourquoi Lestage est devenu un problème pour les équipes adverses : « C’est un joueur qui joue un football rapide et qui bouge extrêmement bien sur le terrain. Alors lorsque vous êtes actif, que vous êtes constamment en mouvement, que vous n’êtes pas immobile, toutes les chances sont de votre côté. »
Il évoque même « une part innée en lui : le facteur agressif pour jouer un poste comme la ligne offensive ».
Pour gagner
Lestage le soulignait plus tôt, il veut soulever la Coupe Grey à tout prix. Pour y parvenir, les Alouettes devront survivre à la finale de l’Est contre les Argonauts de Toronto. « Bien sûr, je suis heureux de ne pas être blessé. C’est amusant, mais ça ne change rien à la préparation, ça reste pareil», affirme-t-il, refusant de s’emballer.
Tout comme Lestage, Brodeur-Jourdain croit en la force du collectif. Un collectif expérimenté, certes, mais qui ne prend rien pour acquis. Surtout sachant à quel point la performance du quarterback Cody Fajardo dépendra de la protection offerte par sa ligne offensive en séries éliminatoires.
Les Alouettes ont brillamment relevé le défi l’an dernier contre les Argonauts à Toronto, avec une victoire de 38-17.
La différence cette fois ?
« Des attentes, mais c’est tout », rétorque Brodeur-Jourdain.
Il ne parle pas ici des « attentes externes ou des attentes de l’organisation », tient-il à préciser, mais plutôt de leurs attentes personnelles.
« À partir du moment où tu gagnes un championnat, tu soulèves le trophée, tu te dis que c’est fini… Et tu penses tout de suite au suivant. »