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Duje Ćaleta-Car, colosse tranquille – Ligue 1 – J10 – LOSC-OL

Les années mitigées à Marseille de ce Croate d’1,92 mètre arrivé de Salzbourg, en échange de près de 20 millions d’euros à l’été 2018, à seulement 21 ans, sont révolues. Un jeune garçon au look régulier dans ses chaussettes, souvent empruntées, laissant parfois même l’impression d’être un peu timide. Du cauchemar de sa première apparition marseillaise sur la pelouse des Costières, fin août 2018, à la demi-finale de Conference League dans le chaudron néerlandais de De Kuip, en avril 2022, pour l’une de ses dernières sorties sous le maillot marseillais. Deux naufrages et le symbole du séjour olympien d’un joueur pas encore prêt.

L’heure est venue, à l’été 2022, de traverser la Manche. Direction Southampton pour à peine plus de succès. Une saison, trois autocars et, bientôt, le placard à balais d’un navire à la dérive. Indésirable, Duje Ćaleta-Car débarque à Lyon en prêt à la surprise générale en toute fin du mercato estival 2023. Sa mission ardue est de faire oublier Castello Lukeba. Résultat, sous Laurent Blanc, quatre petits matchs cauchemardesques puis repart. Triquard, encore une fois, tant auprès du Président que sous Fabio Grosso. Jusqu’à l’arrivée sur le banc lyonnais de Pierre Sage en novembre.

Les ours, l’affect et la côte Adriatique

Comment remettre en selle un joueur en perte de confiance ? Adjoint du technicien rhodanien, Jamal Alioui se souvient des moments passés à tenter de récupérer un joueur au fond du trou avec une cuillère : « Duje a vraiment été très marqué par les mois précédents. Nous avons beaucoup parlé avec lui. C’est en créant de la proximité et en lui témoignant notre confiance que petit à petit, il a sorti la tête de l’eau. » Un projet d’envergure pour le personnel de l’époque à la recherche d’une charnière centrale fiable. Et chargé de jouer les psys de tout un vestiaire endommagé à remobiliser. ” Duje, c’est un oursrigole Jamal Alioui dix mois plus tard. Un garçon très discret qui a besoin de se sentir aimé. Pour lui, la confiance est un élément essentiel. Une première étape pour pouvoir bénéficier de tout ce que nous en retirons depuis plusieurs mois. »

On aurait pu s’offrir de belles vacances avec ses amendes pour retards lors de ses débuts à Liefering puis à Salzbourg.

Peter Zeidler

Un trait de caractère que reconnaît bien Peter Zeidler qui, à Leifering en 2014, identifiait déjà le défenseur lyonnais comme “un garçon avec une grande intelligence émotionnelle”. « C’est vrai qu’il faut l’aimer. Il a besoin de ça, de ne pas toujours être critiqué, indique l’ancien entraîneur de Bochum. Mais en même temps, c’était un joueur qui pouvait se mettre à l’aise avec un côté un peu paresseux. Il faut rester derrière lui et trouver le bon équilibre. On aurait pu s’offrir de belles vacances avec ses amendes pour retards lors de ses débuts à Liefering puis à Salzbourg. »

A Lyon, le joueur a appris à être à l’heure, mais Duje reste Duje. “ Les retards sont révolus, mais c’est vrai qu’il peut encore avoir ce côté un peu apaisé, sourit Jamal Alioui. À la fin de la saison dernière, j’en riais avec Nemanja Matić, qui est son meilleur ami au club, en lui disant : «C’est fou, Duje n’est jamais stressé. Nema m’a répondu : « Mais Jam’, il vient d’une région de Croatie (Šibenik, ville située sur la côte Adriatique) où il y a la mer, la tranquillité. Ce sont des gens qui, au fond, ne sont pas stressés. C’est sa culture. » Et pour continuer : « Mais oui, au début, il a fallu aussi le pousser à se remettre en question pour qu’il se demande aussi pourquoi il n’avait pas joué jusque-là, pourquoi ça n’avait pas marché pour lui à Marseille, à Southampton et ses débuts avec nous. Ce n’est jamais tout noir d’un côté et tout blanc de l’autre. »

Langage corporel discutable, contextes difficiles

Partenaire de Duje Caleta-Car à l’OM entre 2018 et 2020, Bouna Sarr identifie le langage corporel de son ancien copain de jeu parmi les causes de ses difficultés dans les Bouches-du-Rhône. « C’est vrai qu’à Marseille, c’était parfois compliqué pour lui, surtout au débutse souvient l’ancien joueur du Bayern. Il est arrivé très jeune (21 ans) dans un contexte particulier. Il ne se sentait pas en confiance et l’image quelque peu nonchalante qu’il pouvait projeter ne l’aidait pas. Les Marseillais aiment les joueurs qui se donnent à fond sur le terrain. De l’extérieur, il peut paraître un peu maladroit, détaché. Pourtant, franchement, ce n’était pas le cas. »

Les Marseillais aiment les joueurs qui se donnent à fond sur le terrain. De l’extérieur, il peut paraître un peu maladroit, détaché. Pourtant, franchement, ce n’était pas le cas.

Bouna Sarr

A Marseille, Duje Ćaleta-Car ne sera jamais vraiment apprécié. L’histoire d’un serpent qui se mord la queue, ses débuts ratés n’ayant pas incité les sulfureux supporters marseillais à l’adorer et à lui apporter la dose de confiance qu’elle semble nécessaire à son ravitaillement. « Je ne suis pas surpris de le voir aussi fort à Lyon aujourd’hui, continues Bouna Sarr. Il a pu y trouver beaucoup plus de confiance qu’à Marseille, et Duje, en confiance, est un potentiel défenseur de haut niveau. Que ce soit athlétiquement ou au rebond, il est très fort. Un défenseur complet. »

Coéquipier de l’homme à Southampton lors de la saison 2022-2023, Romain Perraud se souvient aussi d’un joueur de grande qualité qui s’est retrouvé une nouvelle fois dans un contexte compliqué outre-Manche : « C’est dommage car on voyait bien quel joueur il pouvait être. Malheureusement, cela ne s’est pas passé comme il le souhaitait à Southampton. On voyait bien qu’il n’était pas forcément content. Au début, ça se passait bien avec Hasenhüttl puis, à un moment donné, la direction a fait le choix de le mettre dans une sorte de loft. Mais même après cela, il ne s’est jamais plaint, est resté professionnel, a pris soin de lui. »

Un peintre nature apprécié de tous

Pas fait pour la machine à laver d’un footballeur plus exposé que jamais à l’ère des réseaux sociaux, le Duje ? Son utilisation d’Instagram donne un début de réponse. Au cœur d’un environnement dans lequel l’application photo est omniprésente dans la communication des acteurs du jeu, Ćaleta-Car se démarque. Typiquement, la mésaventure de Gift Orban après le match contre Auxerre (2-2) ne risque pas de lui arriver. L’égocentrisme ? Très peu pour lui aussi. Sur sa page Instagram, seulement quatre photos. Mi-juillet, la publication de l’un d’eux lui a même valu une séance de réprimandes de la part des très connectés Clinton Mata et Gift Orban. « Il a enfin posté quelque chose »rigole son ami la défense angolaise dans les commentaires. L’international croate de 28 ans serait apparemment plus préoccupé par le bonheur de sa famille que par son nombre de joueurs. abonnés. « Duje semblait très proche de sa famille, avec un petit cercle. Pas un garçon extravagant avec un énorme réseau », rappelle Nasser Larguet, entraîneur intérimaire à l’OM en février mars 2021.

A Marseille comme ailleurs, s’il n’y a pas toujours l’unanimité sur le terrain, Ćaleta-Car met tout le monde d’accord sur l’aspect humain. “ Dans un vestiaire, même si c’est une personne très discrète qui a tendance à rester dans son coin, cela ne l’empêche pas de s’intégrer », glisse Bouna Sarr. Surprenant même ses anciens coéquipiers avec de jolies touches. ” C’est quelqu’un de bon cœur, confides Romain Perraud. En dehors du football, on ne l’a pas beaucoup vu car il consacrait tout son temps à sa famille, mais par exemple, je suis récemment devenu papa, et Duje, qui n’est pas du tout un téléphoniste, a fait un message à sa femme pour lui dire félicite-moi. Pourtant, nous nous étions un peu perdus de vue. Cela m’a touché. » Autant de traits de caractère appréciés désormais associés à une régularité impressionnante sur le terrain qui lui a permis de revenir en sélection croate après deux ans d’absence. «Ça lui a fait aussi beaucoup de bien»conclut Jamal Alioui, ravi de voir son protégé (enfin) arriver à maturité.

Dans la tête de Bruno Genesio

 
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