« En D5, j’ai redécouvert ce qui fait la magie du football » – – OGC Nice

Ça fait quoi de passer de la Ligue 1 à la D5 ?

C’est rafraîchissant. J’ai redécouvert ce qui fait la magie du football, loin du monde professionnel de plus en plus exploité et plein d’argent. En D5, on revient à des valeurs simples. Plus de problèmes. Quand on entre sur le terrain, il n’y a pas de millions d’euros en jeu ni de qualification pour la Ligue des champions à chercher. C’est juste du plaisir et ça se sent. Ensuite, en D5, on peut vraiment parler de football amateur car même au niveau régional, il y a de l’agressivité, il y a beaucoup d’enjeu. Là, quand vous faites une erreur, vous pouvez même dire à l’arbitre que vous avez commis une erreur.

Est-ce le plus grand favori ?

Oui. Et puis pour nous, l’histoire est belle parce qu’elle est partie de rien. A la fin de l’été, j’ai croisé David Soubieux, le chef d’équipe du centre d’entraînement Gym. Le club lui a laissé les clés pour créer une nouvelle équipe « réserve » pour lui permettre de conserver le numéro associatif et de conserver l’équipe féminine et les équipes de jeunes. David a pris cela à cœur. Il a commencé à chercher des joueurs et m’a donc proposé de rejoindre l’équipe. Mes conditions étaient simples : qu’il n’y ait aucune restriction. Nous avons un entraînement et un match par semaine. Si je ne peux pas venir, je ne viens pas. David m’a dit OK, et à la fin, j’arrive toujours. (Rires.)

Comment ça s’est passé au début ?

Nous avons fait un premier entraînement au cours duquel nous nous sommes découverts. Il y avait des stadiers, des membres du staff, des employés du club. On a essayé d’augmenter l’intensité, de faire ce qu’on pouvait sans trop savoir où on allait. Cela a commencé par un 7 contre 7 avec un seul gardien. Et pour le premier match, nous étions 14, mais nous avons dû nous passer d’un joueur qui n’avait pas sa licence, d’un joueur qui s’est blessé pendant le match et d’un autre qui a dû partir à la mi-temps. Pour le deuxième, nous n’étions que 11 avec une semaine de formation. Nous avons gagné 2-1, mais nous avons explosé physiquement. Au club, c’était assez chaotique…

Vous avez vite goûté au folklore du football amateur…

C’est vrai. Contre Fontonne, le match a débuté avec une demi-heure de retard car la tablette pour saisir la feuille de match ne fonctionnait pas. Cela a dû être fait à la main. L’arbitre voulait faire une entrée comme en Ligue des champions alors qu’on s’en fichait. (Rires.) Les lumières ont fini par s’éteindre au milieu du match à cause du minuteur et il a fallu attendre la fin d’un autre match sur le terrain voisin pour pouvoir terminer le nôtre.

J’ai croisé un mec sous la douche, il m’a dit : “Mais tu es Jérémy Pied ?” Eh bien ouais.

Jérémy Pied

Y avait-il d’autres joyaux comme celui-ci ?

Pour le match contre Castel, Mickaël Bucher (un autre ancien pro, NDLR) nous dit dans le groupe WhatsApp qu’il a un problème avec sa moto, qu’il sera en retard. Finalement, il est arrivé au dernier moment et a débuté sur le banc. Lorsqu’il est entré dans la seconde période, il nous a fait gagner d’une volée du pied gauche dans la lucarne. C’est ça le foot.

Ça et les collations après les matchs ?

Ouais. Contre Tourrette-Levens, on a organisé ça. Nous devions prendre les boissons, eux devaient avoir les pizzas. Parfois, c’est l’inverse. A Castel, pareil, nous avons partagé le repas. Nous avons même partagé les douches avec une autre équipe. J’ai croisé un gars sous la douche, il m’a dit : « Mais êtes-vous Jérémy Pied ? » Eh bien ouais. C’était drôle. Et quand on s’intéresse à eux, ils sont comme des fous.

Y a-t-il encore des petites traces du monde professionnel ?

Oui. Par exemple, nous avons travaillé des décors à l’entraînement pour en faire une arme. Lors du premier match, j’ai tiré beaucoup et bien, mais personne n’a touché le ballon. D’où j’étais, je trouvais que les autres n’attaquaient pas assez le ballon. Nous avons travaillé sur le timing et le placement en formation. Le week-end suivant, centre, tête, but. Deux fois. Victoire. Répétez ensuite le match suivant. Comme des pros.

Comment vos adversaires vous voient-ils ?

Honnêtement, la plupart des jeunes ne sont pas impressionnés. Certains disent qu’on est vieux, qu’on n’aura pas grand chose à faire et qu’on a avec nous des gars qui pour certains n’ont jamais trop joué. Mais c’est le contraire. Notre règle d’or est de s’amuser, bien sûr, mais de tout donner et de ne jamais abandonner. D’ailleurs, plusieurs joueurs ont vraiment des qualités et pourraient jouer bien au-dessus.

Mais les supporters du Gym que vous affrontez doivent avoir des hallucinations, non ?

Certains sont très jeunes. Je pense que leur entraîneur leur dit qui nous sommes avant le match. Sinon, quand c’est le plus ancien, oui, on est reconnu. Mardi, lors d’un match amical, à un moment donné, un gars est tombé, je l’ai récupéré et je me suis excusé. Il m’a dit en riant : « Non mais c’est un honneur » !

Combien d’anciens pros y a-t-il dans l’équipe ?

Il y a Romain Genevois qui tient la maison derrière, Franck Dja Djédjé devant et Johan Audel, Mickaël Bucher et moi pour contrôler l’environnement.

Bientôt, nous jouerons une équipe de D1 en Coupe d’Azur. Pour les managers, c’est un peu comme si vous jouiez au PSG.

Jérémy Pied

A part les anciens pros, quel est le niveau ?

Franchement, il y a de bons joueurs. Valentin, un des kinés, est très fort. Il vient d’un petit village et a rapidement abandonné le football, mais pour moi, c’est quelqu’un qui ne serait pas ridicule de s’entraîner avec des équipes professionnelles. Il y en a trois ou quatre vraiment intéressantes.

Est-ce que tout le monde s’entraîne assidûment ?

Oui, vraiment. Bon, ces derniers temps, personne ne voulait venir un mardi soir parce qu’il y avait la Ligue des Champions (rires), mais le coach a été malin, il a profité de ce mardi soir pour mettre à l’épreuve plein de nouveaux joueurs. Cela a permis de renforcer l’équipe avec un défenseur, un milieu de terrain et un attaquant. Maintenant, au lieu d’avoir entre 11 et 14 ans comme au début, on est entre 15 et 18 ans. Ça change tout.

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Est-ce que les gens viennent te voir jouer ?

Des amis, des gars du staff viennent donner de la voix. Là, on se dit qu’avec l’enchaînement des bons matches, ça pourrait venir. Mais bon, le jeudi soir à 20h15 aux Francs Archers, c’est compliqué…

Jouez-vous la semaine parce que les membres du staff ne peuvent pas le faire le week-end ?

Oui, c’est ça. On fait tout pour s’adapter aux kinés, aux stadiers qui font les matchs avec les pros. Pour l’instant, cela ne pose pas de problème aux adversaires. En tout cas, à ce niveau-là, les équipes sont dans un rayon très proche autour de Nice.

Et les joueurs du Gym, est-ce qu’ils venaient vous voir quand ils ne jouaient pas pendant la semaine ?

Oui. Contre Fontonne, j’ai tourné la tête et j’ai vu Pablo Rosario, Melvin Bard, Gaëtan Laborde et compagnie au bord du terrain. Je me suis dit : « Qu’est-ce qu’ils font là ? » (Rires.) C’est ce que j’aime dans ce club, il y a une cohésion folle.

Quel est l’objectif de la saison ?

Evidemment, en tant que compétiteur, je dirais la montée. Mais déjà, bientôt, nous allons jouer une équipe de D1 en Coupe d’Azur. Pour les managers, c’est un peu comme si vous jouiez au PSG.

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Photos : OGC Nice.

 
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