Comme chaque semaine, nous vous présentons l’une des légendes de l’ASSE. Passons maintenant aux dix meilleurs joueurs de l’histoire des Verts. Ceux qui occupent une place à part au firmament du club. Ils ont marqué une époque, une génération. Ils ont participé à la légende et ont permis aux Verts d’être encore aujourd’hui spéciaux dans le cœur des Français. Voici le portrait du 4ème : Michel Platini (145 matches, 82 buts de 1979 à 1982).
Le meilleur joueur français signe dans le meilleur club de France
Michel Platini est né le 2 juin 1955 à Joeuf (Meurthe-et-Moselle). Il a connu les heures de gloire de l’équipe locale, l’AS Joeuf avant de rejoindre le centre de formation de l’AS Nancy-Lorraine, non sans être rebuté par Metz pour insuffisance respiratoire. En 1979, il est le meilleur international français, vainqueur de la Coupe de France en 1978 en inscrivant l’unique but du match en finale et avec déjà une Coupe du monde à son actif. Nancy a annoncé qu’il ne pouvait pas garder son bijou qu’il paie 6 000 francs par mois et le milieu de terrain attire les convoitises de tous les plus grands clubs français ou européens. Nantes, Marseille, le Paris SG, Barcelone, le Real Madrid, Valence, l’Inter Milan (avec qui il a signé un pré-contrat) et même le Bayern Munich sont prêts à verser à Platini le salaire de 1 million de francs par an, la somme qu’il réclamait. . Il y a bien sûr Saint-Etienne qui rêve d’embaucher le milieu international pour retrouver son prestige quelque peu perdu depuis la finale de Glasgow en 1976.
Et le 29 mai 1979, Roger Rocher, accompagné de Pierre Garonnaire et de Jean-Claude Marjollet, le secrétaire du club, parvient à faire discrètement signer Michel Platini pour deux saisons. En échange de cette transaction, Nancy reçoit la somme de 1 200 000 francs à titre d’indemnité de formation. Les dirigeants stéphanois ont emporté la décision sur leurs concurrents, car ils ont établi un montage financier en prenant quelques libertés avec la loi. La star française souhaitait un million de francs net par an. Aussi, Saint-Etienne s’est engagé à lui verser un salaire de 83 300 francs plus les primes et à lui rembourser en espèces le montant des impôts à payer.
Cela aura pour conséquence que Platini se retrouvera sur le banc des accusés lors de la douloureuse affaire du Fonds Noir. De plus, Rocher a accepté que le joueur négocie lui-même ses contrats publicitaires, ce qu’il avait toujours refusé jusque-là. Dominique Rocheteau s’en souvient encore, lui qui a dû s’incliner par décision de justice devant l’intransigeance de son président. Le 31 mai 1979, le journaliste Eugène Saccomano annonce lui-même sur les ondes d’Europe 1 la signature du joueur à l’ASSE. Bon joueur, il s’est incliné alors même qu’il avait usé de toute son influence pour que Platini choisisse Nantes conformément aux directives de son patron, Lagardère, également sponsor du FCNA.
Platini, un bilan mitigé à l’ASSE, mais des exploits
Lorsque Platini arrive à Saint-Etienne, il découvre un tout autre univers et met deux mois à s’acclimater aux exigences de Robert Herbin, dont la préparation physique était réputée et redoutée. Aux côtés de Johnny Rep, autre transfert star de l’été, il se montre cependant décisif pour permettre à l’ASSE de réaliser des débuts tonitruants en championnat. Les Verts ont remporté huit des dix premières journées pour seulement deux nuls, dont une victoire de prestige à Marseille, battu 5-3.
Malheureusement, une défaite à Lens 4-3, alors que l’ASSE menait 3-1 à un quart d’heure de la fin, a stoppé une machine qui semblait invincible. Pour ne rien arranger, Platini est grièvement blessé le 10 octobre 1979 avec l’équipe de France contre les Etats-Unis (importante entorse du genou). Ce qui a le don de provoquer la colère du staff stéphanois envers l’entraîneur Michel Hidalgo, coupable à leurs yeux d’avoir organisé une rencontre totalement inutile à cette période de l’année.
Saint-Etienne s’apprête à disputer, sans son stratège, le deuxième tour de la Coupe UEFA face au PSV Eindhoven après avoir éliminé Widzew Lodz de Boniek (futur coéquipier de Platini à la Juve). Pourtant, l’unité médicale stéphanoise fait des miracles et Platini peut être présent sur le terrain lors du match retour face à Eindhoven. Il a ensuite tenté de renverser une situation rendue délicate par la défaite 2-0 à l’aller aux Pays-Bas. Avec deux buts à son actif, il est au diapason d’une équipe qui réalise l’un de ses plus beaux exploits européens en dynamitant les Néerlandais 6-0 dont trois buts dans les cinq premières minutes de jeu.
La suite de la saison ne sera cependant pas aussi brillante avec une élimination prématurée et humiliante en quarts de finale de la Coupe UEFA face au Borussia Mönchengladbach (1-4, 0-2). En championnat, l’ASSE doit se contenter d’une troisième place bien en deçà des objectifs affichés et des moyens investis.
En route vers le 10ème titre de l’ASSE
La deuxième saison de Platini avec les Verts est plus réussie. Elle s’illustre par un coup de tonnerre à Hambourg et un 5-0 en 8e de finale aller de Coupe UEFA, en forme de mise au point pour l’ancien Nancéien. Vexé d’avoir été critiqué avec l’équipe de France face à l’Allemagne de l’Ouest (1-4), le numéro 10 stéphanois a voulu remettre les compteurs à zéro en inscrivant un doublé revanchard. Malgré la déroute face à Ipswich au tour suivant (1-4, 1-3), il a été l’un des artisans qui ont permis à l’ASSE de remporter son dixième titre de champion de France. Un titre qui aurait pu s’accompagner d’un doublé sans une défaite écrasante en finale de la Coupe de France face à Bastia (1-2).
La perspective de disputer pour la première fois la Coupe des clubs champions européens l’a peut-être incité à signer pour un an supplémentaire, mais il refuse toujours de s’engager, conformément aux souhaits du Rocher, pour deux ans. à l’ASSE. Il devine le déclin inéluctable des Verts.
Il ne pense pas dire cela bien, car la saison 1981-82 a été celle de tous les regrets. Saint-Etienne a été éliminé de la C1 dès le tour préliminaire face au Dynamo Berlin (1-1, 0-2). Elle a ensuite dû céder son titre de championne de France lors de la dernière journée de championnat malgré un ultime baroud d’honneur face à Metz à Geoffroy-Guichard avec une victoire éclatante (9-2). Pour son dernier match sous le maillot vert, Platini a brillé lors de la finale de la Coupe de France contre le Paris SG où il a inscrit deux buts. Cela ne suffit pas et l’ASSE doit perdre aux tirs au but.
Il est temps pour lui de tirer sa révérence. Le club connaît depuis le printemps des turbulences qui vont également l’impacter. Le 30 avril 1982, dans le plus grand secret, il se rend à Turin et accepte de signer à la Juventus Turin, le club stéphanois récupérant une indemnité de 1 280 000 francs conformément au contrat signé avec les Verts. Cet engagement coupe l’herbe sous le pied de nombreux prétendants, notamment Bordelais, dont le président, Claude Bez et son directeur sportif, Didier Couecou, se trouvaient au même moment chez Platini pour espérer le convaincre de signer en Gironde.
Une étoile vers la Juventus
Sa carrière à l’étranger est couronnée de succès. Malgré des débuts difficiles, il s’impose dans la terrible équipe de la Juventus et ses six champions du monde. Il y passe cinq saisons où il se constitue jusque-là un palmarès très médiocre. Il a remporté deux championnats d’Italie (1984 et 1986), une Coupe d’Italie (1983), une Coupe des Coupes (1984), une Super Coupe d’Europe (1984), une Coupe des Champions (1985), une Coupe du Championnat Intercontinental des Clubs (1985). Seule la finale de la Coupe des clubs champions européens au Heysel, dans les circonstances que l’on connaît, malgré le but victorieux, ternit une carrière remarquable.
Avec l’équipe de France, l’homme aux 72 sélections et 41 buts remporte le Championnat d’Europe des nations en 1984, inscrivant neuf buts. Un record à battre dans une phase finale européenne. Cependant, il n’a pas pu éviter une défaite en demi-finale de la Coupe du monde 86 au Mexique. Triple ballon d’or (1983, 1984 et 1985), il parvient en 1987, à l’âge de 32 ans, à mettre fin à sa carrière et à entamer une brillante reconversion.
Le 1er novembre 1988, Platini devient sélectionneur de l’équipe de France, en remplacement d’Henri Michel, limogé pour mauvais résultats. Même s’il n’a pas réussi à qualifier la France pour la Coupe du monde italienne, il a brillamment obtenu son billet pour le Championnat d’Europe en Suède en 1992 grâce à huit matches et huit victoires en phase de poules face à des adversaires comme l’Espagne et la Tchécoslovaquie. Malheureusement, la France est éliminée dès le premier tour et il décide de démissionner.
Porteur de la flamme olympique aux Jeux olympiques d’hiver d’Albertville en 1992, il participe à l’organisation de la Coupe du monde 98 en France. Il est co-président du comité d’organisation de la Coupe du monde 1998 avec Fernand Sastre. Et c’est toujours une réussite. Aux côtés de Joseph Blatter à la FIFA, il est élu président de l’UEFA le 26 janvier 2007, mandat qu’il conserve jusqu’en 2015.