Son dernier match de rugby remonte au 30 novembre 2024, sur la pelouse d’Aimé-Giral. Une éternité à l’échelle d’Esteban Abadie, marathonien champion. Le troisième ligne qui, de Brive en passant par Toulon, avait réalisé la performance – c’est le moins qu’on puisse dire – d’enchaîner 50 matches de Top 14. Avant d’être finalement laissé au repos par Pierre Mignoni, après avoir disputé les six premières journées avec son nouveau club de la rade la saison dernière.
Alors évidemment, quand il faut mettre le clignotant et se ranger sur le côté parce que la carrosserie couine, ce n’est pas évident à gérer. Dans la tête, d’abord. « Cette période n’a pas été facile pour lui, » raconte son coéquipier et ami, Teddy Baubigny. “Este”, c’est un gars qui joue tous les matchs”. Le principal concerné confirme : « Comment l’ai-je vécu ? Difficilement. Ça m’énerve toujours de ne pas jouer, surtout dans une période où l’équipe gagne. Mais bon c’était les vacances, j’ai eu la chance de pouvoir profiter de ma famille. J’ai pris le temps de respirer un peu aussi. Les saisons sont longues et fatiguantes.
« Je suis plutôt du genre à vouloir sauter les étapes »
Victime d’une déchirure au mollet gauche lors de ses 60 minutes à Perpignan, « Este » a dû se montrer patient. « Déjà, parce que je n’avais pas le choix, il sourit, le visage encore marqué par son combat face au Racing 92. Mais en réalité, je suis plutôt du genre à vouloir sauter les étapes et revenir le plus vite possible. J’ai bien vu qu’avec des blessures musculaires, ce n’était pas possible. J’ai déjà vécu la même chose l’année dernière avec le veau. Vous ne pouvez pas échapper à la blessure. Il faut prendre son temps et laisser ses muscles se régénérer. Il a fallu être patient. » Un discours soutenu par Enzo Hervé, son coéquipier depuis l’époque briviste : « Dès qu’il s’est blessé, il avait envie de revenir rapidement. Il voulait être avec nous. Cela prouve l’implication qu’il a pour ce groupe et au quotidien, c’est génial.
Entré à partir du 6e minute contre le Racing après la blessure au genou de Charles Ollivon (le capitaine toulonnais passera une IRM ce lundi pour connaître la nature exacte de sa blessure), Esteban Abadie a joué 74 minutes pour son retour. Treize plaquages (un raté), une touche volée, le natif de Manceau semblait des plus à son aise. Il valide : «Je pense vraiment à Charles. Se retrouver blessé par un ami est ennuyeux. Mais au final, ce fut un bon crash test après une blessure musculaire. Ça a tenu, donc je suis content.
“Cela apporte clarté et sécurité”
Si après la victoire (36-24), tout le vestiaire s’inquiétait du capitaine Ollivon, les Toulonnais savouraient toujours le retour d’un des hommes forts du club. « J’avoue que j’aurais préféré le voir arriver un peu plus tard, témoigne Paolo Garbisi, touché. Mais Esteban est un joueur clé pour nous, notamment en marge. Cela apporte clarté et sécurité. C’est quelqu’un qui connaît parfaitement son métier. Offensivement et défensivement, il est précieux. Et quand on parle de remises en jeu, c’est un poison pour les équipes adverses. Sinon, en dehors du terrain, c’est une vraie personnalité… un leader, bien sûr. Avec un bandeau noir vissé sur la tête, Esteban Abadie a enfin repris, avec aisance et aisance, ce qu’il aime : jouer. Reste à espérer, désormais, qu’il puisse faire ce qu’il aime le plus : continuer, encore et encore.