En seulement cinq mois, Montauban a changé de visage. Une réussite collective, portée par un nouveau staff et un nouveau type de management qui a plié toutes les cartes. Reportage au cœur de la nouvelle vie montalbanaise.
Lorsque la journée commence à Sapiac, la rosée du matin est encore présente. Là sur la pelouse, et sur les fenêtres de la salle de musculation qui abrite déjà les joueurs blessés. Désormais, les journées sont condensées. Nous arrivons tôt mais nous partons plus tôt. Et en les voyant ainsi s’épanouir, on se demande comment Sébastien Tillous-Borde et son staff ont réussi à reformer un groupe soudé en quelques semaines. « Il y a une sorte d’osmose entre les joueurs. Je crois que c’est la réussite du début de saison. confirme Jérôme Bosviel. Pour commencer, n’oublions pas l’essentiel : un staff qui a choisi de travailler ensemble. « Le changement complet de personnel a été une bonne chose. Ce n’est pas une portée recomposée. Il n’y a pas de guerre. On voit qu’ils passent du temps ensemble et qu’ils s’apprécient”, assure Fred Quercy.
Un autre type de gestion
Lorsqu’on se promène dans les baies de Sapiac en milieu de semaine, il règne une ambiance familiale. Il suffit de regarder ces deux petits gars s’amuser en marge. « Pendant les vacances, le fils de Fred est là parfois. Alors je prends le mien aussi. Ils ont le même âge, ils s’entendent bien. Nous essayons de nous entraîner comme une famille et d’être comme une seule en dehors du terrain aussi », » glisse le responsable USM au milieu de deux allers-retours entre le terrain et le bureau. Et comme dans une vraie famille, chacun a son petit caractère qui le rend attachant. “Arrête de crier Jo!” lâche l’un des préparateurs physiques. “Je ne crie pas, je parle fort”, rétorque Snyman en traînant ses sacs de pêche. “J’en ai marre de filmer ces choses tous les jours” justifie l’entraîneur des avants avec un sourire narquois. De son côté, André Hough veille à ce que rien ne soit laissé de côté en répartissant soigneusement ses blocages sur le terrain, tout en fustigeant son homologue sud-africain. Ces deux-là ressemblent un peu à Chip et Dale. Lorsqu’ils animent les séances, Sébastien Tillous-Borde en profite pour passer du temps avec ceux qu’il n’a pas encore vu.
Alors que les entraînements séparés battent leur plein, avec les avants d’un côté et les trois-quarts de l’autre, l’entraîneur se dirige vers le côté des joueurs blessés. Les plus avancés dans leur rééducation sont en pleine séance d’habiletés avec Antoine Lanne-Petit. Le gérant vient taquiner certains d’entre eux, en glissant toujours un mot gentil. Et ce qui pourrait être une simple anecdote prend tout son sens quand on connaît ce staff et son mode de fonctionnement. Aujourd’hui, personne n’est mis à l’écart et la bande de Tillous-Borde s’efforce d’impliquer tout un groupe au-delà d’une simple équipe type. « On sent que Seb veut concerner tout le monde. Il est toujours positif. Il n’y a pas de gars mis à l’écart ni de différences comme il peut y en avoir avec certains entraîneurs qui ne se soucient pas forcément des joueurs sur lesquels ils ne comptent pas”, analyse à juste titre Thomas Larregain qui est lui aussi de retour en pleine forme après une année difficile où il a enchaîné les pépins physiques. “Je lui ai dit avant son retour qu’il allait sûrement faire son meilleur match depuis son arrivée à Montauban”, raconte “STB”.
Tôt le matin ou plus tard dans la journée, les marches en acier qui mènent au bureau des entraîneurs sont toujours occupées. Avant l’annonce de la composition, le staff prend le temps d’expliquer aux joueurs hors groupe pourquoi ils ne joueront pas le prochain match. « Sébastien nous parle beaucoup. C’est toujours un manager positif et c’est rassurant. Il parvient à nous maintenir impliqués dans le projet », assure le jeune troisième ligne, Corentin Coularis qui compte trois feuilles de match cette saison. Par ses qualités techniques bien sûr mais surtout son côté ensoleillé, son expérience de joueur, sa patience et son expérience de l’échec aussi, Sébastien Tillous-Borde a tout changé. Aujourd’hui, chacun a son temps de parole, sa place et chaque proposition mérite d’être entendue.
« Il avait connecté le klaxon au frein !
Le mot cohésion a également retrouvé tout son sens. Sur le parking où se garent les Sapiacains, une voiture attire le regard. Une sorte de fourgon vert. Très kitsch. Elle est customisée avec un becquet sur lequel sont fixées des bandes dorées qui flottent dans les airs pendant la conduite, des autocollants USM partout ou encore une machine à bonbons accrochée entre les deux sièges. “As-tu vu ce que Jo a fait?” » ricanent les joueurs dans le couloir en route vers les vestiaires. « C’est énorme ! Je pense que cette semaine ce sera pour Cottin”. Le fameux « capot ». Cette saison, l’auteur du meilleur « ballon » du match hérite du van pour une semaine et doit procéder à au moins une personnalisation. « Chaque lundi, nous commençons par ce match. Qu’on reste sur une victoire ou une défaite peu importe, en commençant par ça, il y a tout de suite une énergie qui se met en place. Bien sûr, le personnel peut avoir la cagoule», smiles Sébastien Tillous-Borde.
Cette semaine-là, Johan Snyman a été applaudi pour son implication. Mais après plusieurs jours durant lesquels il n’est pas passé inaperçu dans la ville, nul doute que le Sud-Africain ne se trompera plus de tee lors des matchs ! “En gros, il nous fallait quelque chose de drôle qui permettrait aux gars d’éviter de faire des bêtises, explique Jérôme Bosviel qui dirige le groupe des animateurs de cohésion. Chaque semaine, nous choisissons trois ou quatre actions et votons à l’aide de l’applaudimètre. Ce n’est pas nécessairement quelque chose qui se passe sur le terrain. Cela pourrait être autre chose.. Cameron Ruiz, préparateur physique, en a également fait les frais. Mais sa personnalisation, bien qu’ingénieuse, a dû être avortée : « Il avait connecté le klaxon au frein ! Il a fallu l’enlever, c’était trop dangereux” », lance en riant Robin Girou, team manager. Comme soulagé de ses démons passés, Sapiac semble enfin apaisé. Qu’y a-t-il pour continuer sur cette lancée ?