A l’approche des nominations aux Oscars, « Emilia Pérez » fait l’objet de vives critiques de la part des spectateurs mexicains.
Beaucoup reprochent à Jacques Audiard une vision caricaturale de leur pays et d’avoir tourné en France en studio.
Le cinéaste a répondu pour la première fois à la controverse dans une interview accordée à CNN Mexique.
Malgré sa moisson de récompenses depuis Cannes, Émilie Pérez ne fait pas l’unanimité. Le film de Jacques Audiard, qui raconte l’histoire d’un trafiquant de drogue qui veut opérer sa transition de genre, fait l’objet de vives critiques de la part de personnalités mexicaines et d’internautes. Il est accusé, pêle-mêle, de livrer une vision caricaturale du pays, de ne pas parler la langue espagnole dans laquelle les dialogues ont été écrits ou encore d’avoir tourné en France en studio.
Beaucoup regrettent également qu’il n’ait choisi qu’une seule actrice mexicaine pour l’un des rôles principaux. Adriana Paz incarne la veuve d’une victime de trafic qui trouve l’amour avec l’héroïne. Emilia est interprétée par l’Espagnole Karla Sofía Gascón, son avocate par la star américano-dominicaine Zoe Saldaña et son ex-femme par la chanteuse américaine Selena Gomez.
Peut-être que les questions posées par Emilia Pérez sont inappropriées. Mais je ne les trouve pas inintéressants
Jacques Audiard
Jusqu’ici, Jacques Audiard, 72 ans, était resté silencieux face à ces attaques qui ont encore pris de l’ampleur après les Golden Globes où le film a glané quatre prix, dont celui de la meilleure comédie ou film musical. Alors queÉmilie Pérez vient de décrocher 11 nominations aux Bafta Awards, et avant que les nominations aux Oscars ne soient annoncées dans quelques jours, le cinéaste français y répond pour la première fois dans une interview à CNN Mexique.
L’auteur deUn prophète rappelle que s’il a choisi de situer l’intrigue au Mexique, c’est parce qu’il s’est inspiré d’un personnage de fiction mexicain créé par l’auteur Boris Razon dans son roman Écouter. Et que son idée initiale était d’écrire «un opéra en espagnol, une langue que j’aime», même s’il ne le parle pas. Et s’il optait finalement pour un film de cinéma, »on n’est pas dans une forme de réalisme», estime-t-il.
-“Si les choses semblent offensantes, je serai prêt à m’excuser. je suis vraiment désolé», assure-t-il toutefois avant de mettre en garde. “Le cinéma n’apporte pas de réponses, il pose des questions. Peut-être que les questions posées Emilia Pérez est déplacé, je ne sais pas. Mais je ne les trouve pas inintéressants. Je ne veux pas être prétentieux, mais ce sont des thèmes universels.»
Comme il l’avait déclaré lors de la promotion du film, Jacques Audiard rappelle qu’il envisageait de tourner dans des décors naturels, au Mexique. Mais après plusieurs voyages de repérage, il sent finalement que ses choix esthétiques nécessitent de travailler en atelier, ceux de Brie-sur-Marne en région parisienne en l’occurrence. Ce qui ne veut pas dire qu’il ne s’intéresse pas à la culture locale, bien au contraire.
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Le cinéaste révèle ainsi que pour la scène finale de la procession, il s’est inspiré de la légende locale de Jesus Malverde, un bandit du XIXe siècle considéré comme « le saint patron des cartels » car il volait les riches pour redistribuer aux pauvres. Et qui fait encore aujourd’hui l’objet de grandes célébrations populaires.
“Je suis conscient qu’il y a une controverse“, concludes Jacques Audiard. “Mais je dirais à ceux qui alimentent cette polémique de voir le film. Et de juger de la qualité des questions posées par le film. Ne vous y trompez pas, c’est un film très optimiste. Et je veux citer André Breton : « Échangez des idées épuisées contre des idées épuisées ».
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