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Grande année pour… la démocratie

La démocratie a connu une année mouvementée partout dans le monde. Et pas particulièrement fantastique.

Aux États-Unis, Donald Trump, homme politique aux tendances autoritaires, a remporté l’élection présidentielle.

En , le pays est tellement divisé politiquement qu’il est incapable de former un gouvernement stable depuis les élections de juillet.

En Corée du Sud, le président a tenté (sans succès, heureusement !) d’imposer la loi martiale, une première depuis la démocratisation du pays dans les années 1980.

« Il y a des signes de déclin de la démocratie libérale. Le déclin que nous observons depuis plusieurs années se poursuit», affirme Ruth Dassonneville, professeure de sciences politiques à l’Université de Montréal et titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur la démocratie électorale.

Pour diverses raisons, les citoyens sont de moins en moins satisfaits de leur démocratie.

Dans 31 pays répertoriés par le Pew Research Center, 54 % des citoyens sont insatisfaits du fonctionnement de la démocratie dans leur pays, contre 45 % qui en sont satisfaits.1.

Dans un groupe de 12 pays riches (dont le Canada), 64 % des citoyens sont insatisfaits.

Un revers rassurant pour nous : au Canada, il y a plus de gens satisfaits (52 %) que de gens insatisfaits (46 %) de notre démocratie. Idem en Suède, aux Pays-Bas, en Allemagne et en Inde.

En revanche, les Américains, les Grecs, les Français, les Italiens, les Japonais et les Espagnols ont à leurs trousses le moral démocratique.

Au début de la pandémie de COVID-19, le nombre de personnes insatisfaites a diminué. Mais depuis 2021, avec une inflation élevée, elle monte en flèche. C’est très inquiétant.

Qu’est-ce qu’une démocratie saine ?

Au-delà du vote tous les quatre ans, une démocratie saine, c’est avant tout des valeurs fortes comme les libertés civiles, une culture politique, la séparation des pouvoirs, l’indépendance des médias et des tribunaux, la présence des partis d’opposition. Bref, c’est un véritable Etat de droit.

La revue L’économiste calcule la force des démocraties dans 167 pays depuis 2006. Il devrait dévoiler son indice de démocratie pour 2024 en février prochain.

Dans le monde entier, la force de la démocratie a diminué presque chaque année entre 2016 et 2023, selon L’économiste.

Pourtant, la démocratie a progressé pendant des décennies, notamment après la chute du mur de Berlin en 1989. Cette tendance s’est inversée dans les années 2010.

En 2023, le Canada a atteint le 13e classement sur 167 pays, selon L’économiste. Son indice de démocratie est passé de 9,22 (sur 10) en 2019 à 8,69 en 2023.

Désinformation et extrême droite

Selon le professeur Ruth Dassonneville, deux phénomènes fragilisent lentement mais sûrement nos régimes démocratiques : la désinformation et la montée de l’extrême droite.

La désinformation a été identifiée cette année par le Forum économique de Davos comme le risque le plus important à court terme pour nos sociétés.

La désinformation nuit à la démocratie, qui fonctionne si les électeurs peuvent faire des choix éclairés lorsqu’ils sont bien informés.

Ruth Dassonneville, professeure de sciences politiques à l’Université de Montréal et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en démocratie électorale

Comment le combattre ? Selon des chercheurs européens, nous avons besoin de médias d’information fiables, diversifiés, non polarisés et qui jouissent de la confiance de la population.2.

Deuxième facteur qui met à mal nos démocraties : la montée de l’extrême droite.

Précision importante : le problème de l’extrême droite, c’est le mot « extrême », pas le mot « droite ». Les idées de droite (État moins imposant, libertés individuelles, etc.) sont aussi valables que celles de gauche.

L’extrême droite est une idéologie politique qui présente la plupart des caractéristiques suivantes : tendance à l’autoritarisme ou au recours à la violence, programme raciste, programme anti-immigration, idéalisation de la « pureté nationale », remise en question de la question du libéralisme (c’est-à-dire la conception d’un Etat capable de parvenir à un consensus)3.

Il ne s’agit pas de juger les citoyens qui votent pour l’extrême droite. La grande majorité d’entre eux éprouvent des frustrations légitimes. Mais la montée de ce courant qui se méfie de la séparation des pouvoirs et de la liberté de la presse a généralement des conséquences néfastes pour l’État de droit.

Au pouvoir en Italie depuis 2022, l’extrême droite a gagné du terrain dans plusieurs pays cette année. Il a profité du mécontentement des électeurs face à une inflation élevée, tandis que presque tous les gouvernements des pays où des élections ont eu lieu cette année ont subi une défaite ou une baisse de soutien.

Aux Pays-Bas, l’extrême droite fait désormais partie de la coalition gouvernementale.

En France, le Rassemblement national, groupe d’extrême droite, est le parti qui a recueilli le plus de voix (37%) aux élections législatives de juillet.

Aux États-Unis, le président élu Donald Trump bénéficie du soutien de l’extrême droite. Certaines de ses déclarations (refus de reconnaître sa défaite en 2020, menaces de représailles contre ses opposants politiques) s’apparentent à celles d’un dirigeant autoritaire.

Comment contrer l’extrême droite ?

Est-il possible pour les partis politiques et les gouvernements d’inverser cet appétit croissant pour l’extrême droite ?

C’est une tâche difficile, admet Ruth Dassonneville.

Le politologue donne néanmoins deux conseils.

“La première chose est de bien gouverner et d’écouter les citoyens, pour éviter que l’extrême droite ne dise que la démocratie ne marche pas”, estime Ruth Dassonneville. Cependant, cela est compliqué parce que les gouvernements sont contraints par toutes sortes de phénomènes mondiaux sur lesquels ils ont peu ou pas de contrôle. [COVID-19, inflation…]. L’extrême droite, avec son discours facile, profite de chaque crise extérieure. »

Ensuite, ils doivent éviter d’adopter le discours de l’extrême droite. Pour éviter de le normaliser, d’une part, mais aussi parce que cette stratégie ne fonctionne pas, d’autre part.

“L’extrême droite étant arrivée la première avec ce type d’idées, elle est généralement perçue par l’électorat comme la plus compétente pour les appliquer”, estime M.moi Dassonneville.

En 2025, nous espérons inverser la montée de l’extrême droite.

1. Consultez l’étude du Pew Research Center

2. Consultez l’étude « Resilience to Online Disinformation : A Framework for Cross-National Comparative Research » (en anglais)

3. Consultez la définition de l’extrême droite de l’équipe Perspective mondiale de l’Université de Sherbrooke

Qu’en penses-tu? Participer au dialogue

 
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