News Day FR

Fred Zinnemann en pleine restauration

Cette année, le festival Lumière consacre une rétrospective à Fred Zinnemann, qui Le Train sifflera trois fois conduit à la postérité mais une partie de son œuvre est menacée d’oubli. Parallèlement à d’autres initiatives, cette rétrospective suscite un ensemble de restaurations.

Au tour du héros

Il suffit de regarder deux films de Fred Zinnemann pour se rendre compte qu’il creuse inlassablement le même sillon. Son obsession est la fidélité de l’individu à ses idées, à ses valeurs. Ce que l’homme est prêt à endurer, à sacrifier pour vivre en paix avec sa conscience.

Gary Cooper comme shérif de Haut midiassume seul la défense d’une ville car les habitants ont renoncé à leurs efforts. Montgomery Clift en simple soldat Tant qu’il y aura des hommes refuse de remonter sur le ring malgré la pression de son supérieur. Paul Scofield comme Thomas More Un homme pour l’éternités’oppose au roi Henri VIII qui veut se remarier. Un authentique pêcheur mexicain rassemble ses misérables collègues pour forcer leur patron à les augmenter. Les rebelles d’Alvarado.

A Lyon, pour le plus grand plaisir des cinéphiles

Ainsi Fred Zinnemann interroge inlassablement la notion de héros, jette un regard sur ce à quoi il doit faire face : violence, famille, humiliation, torture, trahison, manipulation, corruption, lâcheté, mort… Mais le héros, forcément solitaire, selon Zinnemann, est ce n’est pas Zorro, ce n’est pas John Wayne. Il ne s’agit pas d’une attitude triomphale mais plutôt d’un état douloureux ; ce n’est pas un geste glorieux mais un comportement incompris. Il montre même que cet attachement infaillible aux principes n’est pas exempt d’ambiguïtés, pas aussi noble qu’il y paraît, peut-être même carrément borné.

Académique?

Fred Zinnemann fait-il toujours le même film ? Apparemment pas puisque cela change de genre : western, mélodrame, biopic, drame familial, fresque historique, documentaire… Mais ce ne sont pas ces changements de milieux et de périodes qui donnent une valeur artistique, c’est la forme. Comme le disait si bien Victor Hugo : « La forme est la substance qui remonte à la surface ». Autrement dit, Fred Zinnemann a-t-il un style ? Est-il reconnaissable au-delà de son thème ?

Véritable machine à produire des Oscars, il n’était guère apprécié par la critique de la Nouvelle Vague qui lui qualifiait d’« académique ». Il vit enfermé dans cette boîte depuis plus de soixante ans. Cette rétrospective a été l’occasion de dépoussiérer une filmographie, d’offrir de nouvelles perspectives, de libérer un cinéaste de sa réputation.

Né en 1907 dans l’Empire austro-hongrois, Fred Zinnemann se destinait à la musique lorsque la vision de quelques films le détourna vers le cinéma. En 1929, il tourne son premier long métrage à Berlin avec trois amis : Robert Siodmak, Edgar Ulmer et Billy Wilder. Les hommes dimanche est une œuvre d’une liberté improbable pour l’époque. Pas de scénario mais une idée : capter l’air du dimanche, le jour où l’on passe un bon moment. Un coup de chapeau révèle la tension dans un couple et fait exploser la jalousie féminine. Académique?

Son prochain long métrage a été tourné en Amérique, comme beaucoup d’autres cinéastes juifs. Il a d’abord trouvé du travail dans le documentaire. Il écrit la naissance d’une grève dans Les rebelles d’Alvarado. L’influence du cinéma russe en général et d’Eisenstein en particulier est évidente. Académique?

Concours : gagnez des places de cinéma en participant à notre quiz spécial Donald Trump pour la sortie de « The Apprentice »

Épouse-t-il les idées socialistes ? Ce qui est sûr, c’est qu’il existe une lecture politique de Le train sifflera trois fois. En 1952, ces travaux entrent en contact avec la chasse aux sorcières menée par le sénateur McCarthy. C’est le portrait d’un homme menacé et abandonné par son propre peuple. Son destin s’exprime dans un seul et sublime plan de grue, qui voit Gary Cooper devenir de plus en plus seul et minuscule alors que quatre tueurs se dirigent vers lui. Ce western prend le contrepied de nombreux archétypes du genre, qu’il s’agisse des grands espaces (on ne quitte pas la ville), des immenses ciels nuageux (il fait gris), des crépitements d’armes (juste le cliquetis de l’horloge). ). Académique?

Le style de Zinnemann est aussi, visiblement, une direction d’acteur d’une grande sobriété. Gary Cooper (Haut midi) , Frank Sinatra, Donna Reed (D’ici à l’éternité), Paul Scofield (A L’homme pour toutes les saisons), Vanessa Redgrave, Jason Robards (Julie) lui en seront éternellement reconnaissants en brandissant leur Oscar.

Le moment est venu de relire l’ouvrage de Fred Zinnemann. Trois fois.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

Related News :