Demi Moore ou la revanche d’une brune à Hollywood

Demi Moore ou la revanche d’une brune à Hollywood
Demi Moore ou la revanche d’une brune à Hollywood

CHRONIQUE – Elle vient d’être nominée pour l’Oscar de la meilleure actrice pour Le fond. Et a remporté un Golden Globes. Itinéraire d’une actrice longtemps sous-estimée.

C’est une histoire comme seul Hollywood sait nous raconter. Et dont je suis un client particulier. Et pour cause, tous les éléments d’un bon scénario sont réunis : des scandales, de l’amour, des échecs, une traversée du désert… Et à la fin : une récompense. Un Golden Globe pour Demi Moore. Et peut-être même l’Oscar puisqu’elle vient d’être nominée dans la catégorie de la meilleure actrice. Dans sa robe de déesse couture signée Armani, l’actrice est entrée dans l’histoire le 5 janvier dernier. Une revanche pour celle dont la longue et prolifique carrière a, à mes yeux, plutôt été boudée. Et évidemment, à elle aussi : « Cela fait plus de 45 ans que je fais ce métier et c’est la première fois que je gagne quelque chose en tant qu’actrice » a-t-elle glissé dans son discours. Dans une vidéo partagée sur Instagram, ses filles ont laissé exploser leur joie devant leur télévision. Un petit sentiment de fierté partagé par toute une génération (dont je fais partie) qui l’a vue percer, puis s’égarer avant ce retour en grâce.

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Car Demi Moore, pour moi, c’est le cas complexe d’une actrice qui s’est trop vite vue définie par son physique à l’écran et par ses relations à la ville. Dans Proposition indécente (1993), Je l’ai trouvé incandescent. Pour l’adolescente que j’étais dans les années 90, elle se battait, comme Meg Ryan, pour le premier rôle dans le cœur des fans de comédies (plus ou moins) romantiques. Ou encore Julia Roberts, qui s’en amuse dans Coup de foudre à Notting Hill (1999) : « Je sfoilm strip teasae

“Je suis sûre que Demi sera ravie” répond-elle à celui qui confond son personnage d’actrice bankable et la félicite pour Fantôme (1990), tant ce film est emblématique.

Mais très vite, j’ai compris que l’actrice ne faisait pas partie de celles qui respectent forcément les règles. Surtout lorsqu’il s’agit d’un milieu hollywoodien où il n’est pas forcément de bon ton de faire ce qu’on veut. Encore plus quand on est une femme.

Ainsi, Demi Moore ose renoncer à ses cheveux longs la veille du tournage de Fantômeau grand désarroi du réalisateur Jerry Zucker. Et propose ainsi l’une des coiffures les plus cultes de l’histoire du cinéma, que je dois avouer avoir essayée avec moins de succès. Plus tard, elle se met en danger dans des rôles qui cassent les codes. Elle se met nue Strip-tease (1996), se rase la tête pour Sur un pied d’égalité (1997)… Une prise de risque qui ne rapporte pas vraiment. Je repense aux critiques acerbes qui ont mis au pilori sa performance. Ou ceux qui ont préféré souligner le choix « courageux » d’opter pour la coupe GI. De toute évidence, sa carrière ne tenait qu’à un cheveu.

D’autant que l’action est plutôt l’affaire de Bruce Willis, son compagnon de l’époque, véritable star et icône des années 90, qui enchaîne les blockbusters tout en faisant exploser les immeubles et le box-office. Tout cela en maniant à la fois le pistolet et l’humour. Et Demi ? Elle s’investit pleinement dans un rôle sur mesure aux yeux de la société : celui de mère. En arrière-plan, elle élève leurs trois filles, aux prénoms improbables pour le public français : Rumer née en 1988, Scout LaRue en 1991 et Tallulah en 1994.

Ce qui ne l’empêche pas, une fois de plus, de bousculer les codes. Elle fait scandale en posant nue et enceinte de 7 mois devant l’objectif d’Annie Leibovitz en août 1991. Une photo à la Une de Salon de la vanité ce qui a conduit au retrait du magazine de certains kiosques à journaux. L’Amérique est choquée. Mes grands-parents aussi. Demi Moore libère cependant les corps des femmes enceintes, considérés comme tabous à l’époque. Avec ce cliché d’une maternité puissante, elle crée un précédent et sera par la suite imitée à de nombreuses reprises. Encore une fois, nous aurions dû dire merci.

Après une traversée du désert et une séparation, elle revient dans une nouvelle version d’elle-même au début des années 2000. Scandale à l’époque, elle flirte avec un acteur de seize ans son cadet, Ashton Kutcher, qu’elle épouse. en 2005. Le même que mes amis et moi aimions croiser le soir en rentrant du lycée dans la série C’est le spectacle des années 70. «C’est la cougar qui embrasse son côté quinquagénaire avec le jeune et beau mec. Elle s’impose comme une femme mûre, libérée, une femme libre. Mais pas militante car elle a toujours fait les choses avec sincérité», analyse Vincent Grégoire, Directeur tendances et insights consommation chez Nelly Rodi. Avant d’ajouter : « Elle a une forme d’authenticité. On sent qu’elle fait les choses avec ses tripes, avec son cœur et qu’elle ne calcule pas. Les médias le jugent trop vieux ? Elle répond avec une arme de séduction massive : son corps sculptural qui surgit des vagues dans une scène du remake de Dames drôles, Les anges de Charlie, où elle paraît plus jeune que Drew Barrymore, Lucy Liu et Cameron Diaz. Comme Vénus sortant des eaux mais revue et corrigée au scalpel.

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Le monde n’est pas prêt, toujours enfermé dans ses tabous et ses contradictions sur le corps féminin. Hollywood ne veut pas voir les femmes vieillir. Mais nous ne pouvons tolérer ceux qui, avec trop de conviction, défient les lois du temps qui passe. Elle aurait eu les genoux retouchés et les seins repulpés. Pour couronner le tout, l’idylle qui a fini par la convaincre s’est soldée par une fausse couche et un divorce en novembre 2011 après six ans d’un mariage très médiatisé. Et les rumeurs d’alcoolisme font rage.

En parallèle, Demi Moore peine à convaincre sur grand écran et tente quelques incursions dans des séries comme Empire. C’est finalement Instagram, réseau qu’elle a rejoint en 2018, qui va alors lui offrir un nouvel espace d’expression et lui rappeler nos bons souvenirs. Alors que les célébrités réclament et se réapproprient leur intimité, elle s’expose sans complexe. La critique est facile. Et puis, pendant le confinement, elle rassemble sa tribu, dont son ex-mari et sa nouvelle épouse. Dans l’art de la famille recomposée, elle réussit à insuffler quelque chose de cool, de libre.

C’est aussi à travers la mode qu’elle revient sur le devant de la scène. Kim Jones l’invite à monter sur le podium pour son premier défilé Fendi en janvier 2021. Là encore, la critique remporte la bataille. Plus que sa présence, on souligne son abus de chirurgie. A moins que ce soit un problème de maquillage ? Le débat inutile gronde. Quand ses homologues féminines revendiquent leur droit à l’âge et acceptent leurs rides à l’écran ou en photo, elle continue d’apparaître en bikini ultra sexy sur les réseaux.

Au premier rang des défilés de mode ou sur le tapis rouge, elle ne quitte jamais son chihuahua, Pilaf, et apparaît avec les cheveux trop longs pour être réels. Une fois de plus, elle joue à nouveau l’équilibriste, à la limite du ridicule, telle une version sexygénarienne de Paris Hilton. Et je ne sais pas vraiment quoi en penser.

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Mais il est difficile de ne pas s’attacher. Du fait de son quotidien, elle partage presque tout : les petites joies (elle devient grand-mère) et les grandes tragédies (Bruce Willis souffre d’aphasie). Toujours en famille, ils sont solidaires. Et Demi gagne en sympathie. « On sent que c’est dans une sorte de modernité douce, apaisée, bienveillante. Elle fait bouger les lignes sans revendiquer de nouvelles façons de vivre. Elle fait les choses pour elle-même, sans se soucier de ce que les gens vont dire », souligne la pionnière.

Et puis, comme pour conjurer la réputation dont elle était prisonnière, elle accepte de jouer dans Le fond. Ou l’histoire d’une femme prête à tout pour ne pas vieillir. Le film impressionne à Cannes. Et lui donne un coup de pouce. Je la trouve parfaite pour le rôle. “En réalité, je ne vois pas quelle autre actrice aurait pu l’incarner aussi bien”, ajoute Vincent Grégoire. Dans le film de Coralie Fargeat, qui l’a choisie après avoir lu ses mémoires À l’envers Publié en 2019, Demi Moore « swingue et en même temps, elle est vulnérable. Elle est à la fois victime et maîtresse. Comme si incarner à l’écran ce qui lui a toujours été reproché dans la « vraie » vie lui offrait enfin le fameux ticket d’or. Celle qui lui ouvre les portes d’une industrie qui l’a toujours considérée au mieux comme une actrice de « pop-corn », comme elle l’a rappelé dans son discours. Au pire comme une femme qui refuse de vieillir. À l’image de cette mise en abîme, Demi Moore a gagné la reconnaissance de ses pairs : « Quand ce scénario audacieux, courageux et complètement fou est arrivé sur mon bureau, l’univers m’a dit que ce n’était pas fini pour moi… » Preuve que même pour les électrons les plus libres, Hollywood sait orchestrer des fins heureuses, notamment lorsqu’il s’agit de mea culpa.

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