Il n’a pas les yeux menthe mais Eddy Mitchell conserve son regard perçant, concentré sur ses deux actualités, une autobiographie sans concession et un 40ème album de musique « authentique » avec ses « Amigos ».
Son livre, simplement intitulé « Autobiographie », contient de nombreux souvenirs de cette figure de la chanson française et convoque des amis proches, des Vieilles Canailles Jacques Dutronc et Johnny Hallyday à son épouse Muriel Bailleul, toujours à ses côtés.
Raconter sa vie depuis Belleville dans les années 1950 jusqu’aux plateaux de cinéma et de télévision, les hauts et les bas : l’exercice était nécessaire à 82 ans, l’âge pour regarder dans le rétroviseur.
C’est là que se sont écoulées ses six décennies de carrière, l’ère des Chaussettes Noires, les hits à gogo, les concerts mais aussi les ornières, les foutues addictions comme celle des jeux d’argent. “Je ne vais pas le cacher car il y a des témoins”, sourit Eddy Mitchell.
C’est en effet sa femme qui l’a éloigné des casinos : « C’est elle qui m’a dit ‘ça suffit maintenant’. Parce qu’il fallait quand même entre 16 heures et 6 heures du matin.
L’artiste confie également avoir pris une résolution : « J’arrête de fumer ». Il y a environ un mois, une pneumonie l’a frappé, l’obligeant à reporter la sortie de son disque. Depuis, il va mieux et prétend être « meilleur ».
– Inquiéter –
Même s’il a arrêté de jouer, « Schmoll » continue de rouler, tant qu’il fait « En cabriolet Pontiac », comme il le chante dans la ballade country rock qui ouvre « Amigos », disponible vendredi.
Ses compagnons de voyage sont des écrivains et compositeurs de choix : Alain Souchon, Alain Chamfort, William Sheller, Sanseverino, Pascal Obispo.
« Ce sont des gens que j’admire, que j’aime. Donc ça se fait naturellement», glisse-t-il. «C’est toujours agréable d’être en studio avec des musiciens.»
Bien sûr, Johnny manque. « Jusqu’au dernier moment, je pensais qu’il y arriverait. Il ne pouvait pas mourir. C’était impossible”, raconte Mitchell dans son livre, bouleversé par la perte de son “frère” de cœur, suite à un cancer du poumon en 2017.
Autre « disparition cruelle » cinq ans plus tard : celle de Pierre Papadiamandis, son compositeur fétiche derrière des classiques dont « La Dernière Séance ».
Cependant, la musique reste essentielle. « Cela représente que je suis encore en vie », résume l’artiste.
“C’est surprenant d’avoir un méchant mais, d’avoir un bon succès, c’est toujours agréable et surprenant” aussi, dit-il, évoquant des chansons qui ont rencontré leur public, comme “Sur la route de Memphis”, pour lesquelles il n’avait pas imaginé un tel enthousiasme.
– « Boi-boîtes » et streaming –
Désormais, Eddy Mitchell écoute « surtout du jazz, des grands orchestres ». La nouvelle génération n’a guère son oreille et l’utilisation accrue de machines électroniques et de logiciels dans la composition ne l’intéresse « absolument pas ».
« J’aime le vrai beurre », compare-t-il, en référence à la « vraie musique », créée selon lui au plus près de la réalité.
“J’ai toujours été anti-boi-box”, ajoute-t-il.
Anti quoi ?
«Je les appelle des boi-box. Ce sont de fausses piles. Les machines qui fabriquent des basses, qui fabriquent des guitares. C’est une horreur. Il y a beaucoup de gens qui les utilisent. Certaines personnes les utilisent. disent les musiciens quand ils ne savent pas écrire trois notes », raconte « Monsieur Eddy ».
Autre cible, les plateformes d’écoute de musique en ligne. Il leur reproche un prisme quantitatif et une « dégradation totale » de la qualité sonore, les titres étant le plus souvent compressés.
Le franc-tireur dégaine encore : « Le streaming, c’est de la merde. Vous l’écoutez là-bas (un téléphone, NDLR), ce n’est pas possible.»
Mieux vaut « écouter des CD au minimum et des vinyles autant que possible », préconise-t-il, à contre-courant de la tendance générale. Mais peu importe.
« Je m’en fiche, mais alors, complètement. Je suis prêt à être un vieux con si je dois parler de ça. Il y a des choses plus sérieuses», assène le rockeur qui n’a pas perdu sa voix grave, ni sa liberté de ton.
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